Portrait

Joël Baron, pharmacien en Bretagne et humanitaire au Burkina Faso

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Publié le 26/10/2017
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Joël Baron anime une association pour le développement d'une province du Burkina Faso, avec l'obsession que les Burkinabés soient autonomes, dans leurs projets, comme dans leur vie.
Baron

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Crédit photo : DR

Tout a commencé par des trousses de santé pour les écoles. Enfin, presque. Joël Baron, aujourd'hui pharmacien remplaçant après avoir été titulaire à Plouigneau (Finistère), a d'abord tâtonné. « Des clients de l'officine m'avaient attiré à une première réunion. J'ai pris un billet d'avion pour le Burkina Faso. » Il y fait plusieurs séjours, pendant plusieurs années, tout en essayant diverses formes d'aide au développement dans ce pays du Sahel.

Et un jour, il rencontre Moctar, son « ami frère », un directeur d'école dans la province du Boulkiemdé, au centre ouest du pays. Moctar anime l'Association pour le développement du Boulkiemdé (ADB) ; Joël Baron crée la même association ADB en Bretagne, à Lampaul-Guimiliau, une sorte d'annexe !

« On a vu des écoles sans trousse de santé », témoigne-t-il, alors que les enfants sont atteints de toutes sortes de petits bobos, fièvre, douleurs, maux de tête, maux de ventre, diarrhée, ou, plus graves, dysenterie, parasites, paludisme. Ce sera la première action concrète des ADB jumelles.

Le pharmacien collecte les fonds en France, sollicite des labos pour des consommables, du petit matériel. Au Burkina Faso, « l'infirmier d'un dispensaire burkinabé établit une liste de médicaments, de pansements, et Moctar nous envoie la demande. On se parle très souvent par Internet, je suis toujours au Burkina ! ». Quatre trousses de santé équipent des écoles la première année, quatre la deuxième année ; après dix ans, cinquante écoles en sont dotées. Il existe trois cent cinquante écoles dans la province.

Devenir autonomes

Une trousse est sous la responsabilité du directeur, d'un maître et de deux parents d'élèves. Ils doivent se cotiser pour bien entretenir la trousse. C'est le contrat dans cette action de développement : « Nous voulons que les Burkinabés soient autonomes. »

« En France, je présente l'association, le Burkina Faso, les actions de développement ; on organise des expositions dans des médiathèques, il y en a beaucoup en Bretagne. Nous vendons des objets, beaucoup d'associations bretonnes nous aident. Même s'ils n'ont rien, relève Joël Baron, les Africains vont encore donner. C'est leur force, la fierté de ce qu'ils font, parce qu'ils le font de façon autonome. Moctar en est le garant, et c'est la force de notre association. »

Plantes médicinales

Joël Baron se rend deux fois par an au Burkina Faso, avec deux ou trois des vingt-cinq membres de son association, chacun à ses propres frais. Il a construit là-bas une maison, pour limiter les frais, et qu'il prête contre entretien le reste du temps. Au départ, il se déplaçait en mobylette, mais a un peu ralenti : par 40 °C, passé 60 ans, on devient plus prudent !

Après les trousses de santé, les écoles ont demandé à créer des jardins scolaires, pour leur côté pédagogique, avec des plantes médicinales, et des plantes potagères, pour améliorer l'offre de la cantine. « On a financé là où la trousse de soins fonctionnait, et là où il y avait un puits. » Ont ensuite été plantés des arbres, dans la cour des écoles, puis dans la cour des enfants, pour qu'ils soient arrosés pendant les vacances. Des lunettes ont été distribuées, qui avaient été récupérées et triées par un jeune opticien de Rennes (Ille et Vilaine). « Vous m'avez rendu mes yeux », s'exclament les bénéficiaires à l'infirmier qui les dispense. L'infirmier s'aide ainsi pour détecter les cataractes.

Agroécologie

« Ils sont les acteurs de leur développement, s'enthousiasme Joël Baron. Nous recevons beaucoup de dons en Bretagne, des petites solidarités, bien plus généreuses que les grosses entreprises. » Ce qui ne l'empêche pas de les solliciter, comme ce site brestois d'un grand groupe : le mari d'une de ses préparatrices y est commercial.

« L'association a dix ans, et on a toujours l'impression de pouvoir en faire plus, constate Joël Baron. En Afrique, celui qui s'en sort aide les autres. » Le confrère rêve à présent d'une activité complémentaire : « Créer le paradis au milieu de la sécheresse », grâce à l'agroécologie. Une idée qui lui est venue après un stage chez Pierre Rabhi, cet agriculteur, poète et romancier, fondateur du mouvement Colibris.

Jacques Gravend

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3383