L’Association américaine de microbiologie vient notamment de publier de premiers résultats dans « Journal of Virology ». L’étude s’est penchée sur certains gènes du système immunitaire, les antigènes des leucocytes humains (HLA pour human leukocyte antigen), qui sont impliqués dans la reconnaissance des agents pathogènes. « Comprendre comment la variation des HLA peut affecter le cours de l’infection par le Covid-19 pourrait aider à identifier les individus à risque plus élevé de la maladie », indiquent les auteurs.
Dans une analyse in silico, les chercheurs ont constaté que, parmi les 145 génotypes de HLA étudiés, certains allèles, les HLA-B*46 : 01, avaient moins de peptides de liaison prédits pour le SARS-CoV-2. Ces allèles pourraient ainsi être associés à une forme sévère de Covid-19. Une étude de 2003 avait abouti à un résultat similaire dans le SARS-CoV.
L’analyse a également permis de constater que d’autres allèles, les HLA-B *15:03, étaient en capacité de présenter des peptides SARS-CoV-2 hautement conservés, « qui sont partagés entre les coronavirus humains courants », soulignent les auteurs. Ce constat suggère que ces allèles pourraient permettre une immunité croisée basée sur les cellules T.
Selon les chercheurs, le typage HLA, « rapide et peu coûteux », pourrait être réalisé en même temps que les tests de dépistage en vue d’« améliorer l’évaluation de la gravité virale ». De même, quand un vaccin sera disponible, ce typage pourrait aussi être utilisé pour déterminer les individus prioritaires.
Une similitude avec la vasculopathie de l’enfant associée à STING
En France également, des équipes explorent la piste génétique. Une équipe de l’Institut Imagine, en collaboration avec l’hôpital Cochin*, se penche sur la similitude observée entre la réponse immunitaire constatée chez certains patients Covid +, soit l’« orage cytokinique », et celle à l’œuvre dans la vasculopathie de l’enfant associée à STING (SAVI), une maladie génétique rare également responsable d’une atteinte pulmonaire.
« Les patients SAVI présentent une mutation activatrice du gène STING qui conduit à la production en excès d’IFN et de cytokines inflammatoires comme l’IL-6 [interleukine-6 ]. Elle conduit aussi à une infiltration de cellules immunitaires, dont des lymphocytes B, dans les poumons, mimant en quelque sorte une infection virale respiratoire constante », explique Frédéric Rieux-Laucat, chef du laboratoire d’immunogénétique des maladies auto-immunes de l’Institut Imagine (INSERM/Université de Paris).
Une signature des voies immunitaires dérégulées
Son équipe travaille donc à partir d’échantillons sanguins à la caractérisation des cellules immunitaires des patients Covid +. « D’ici à quelques semaines, nous pourrions être en mesure d’établir une signature des voies dérégulées dans les différentes cellules immunitaires, qui constituerait un risque de complication. Cela pourrait aussi aboutir à des perspectives thérapeutiques personnalisées », poursuit Frédéric Rieux-Laucat.
Au sein de l’Institut Imagine, l’immunologiste Jean-Laurent Casanova, membre du conseil scientifique qui conseille les autorités, et le généticien Laurent Abel ont également lancé une recherche sur le rôle des variations génétiques dans les différentes réponses au Covid-19. Dans le cadre du consortium « Covid Human Genetic Effort », ils vont participer au séquençage des génomes d’au moins 500 malades, à travers le monde, explique-t-il dans une interview publiée le 16 avril dans le quotidien « Le Monde ».
* L’équipe de Frédéric Rieux-Laucat (Institut Imagine, Paris) et les services hospitaliers de l’hôpital Cochin à Paris, en particulier avec Benjamin Terrier en médecine interne et Solen Kernéis en infectiologie.