Les groupements sont décidément dans le collimateur des députés. Cette fois, au nom de la lutte contre la financiarisation, il s’agit d’exonérer de certaines charges les groupements en sociétés coopératives ou réseaux de commerce associé.
Surprise à l’Assemblée nationale ce 6 novembre, avec l’adoption d’un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 visant à proposer des exonérations fiscales pour les pharmaciens qui s’engagent dans des groupements établis en coopératives. Le député Bertrand Bouyx (Calvados, Horizons) d’une part, et le député Cyrille Isaac-Sibille (Rhône, Les Démocrates) d’autre part, ont déposé chacun leur tour le même amendement. Le but : lutter contre la financiarisation. « L’ensemble de la chaîne pharmaceutique est régulé. Il y a un maillon de la chaîne qui n’est pas régulé : ce sont les groupements », justifie le député Cyrille Isaac-Sibille, qui s’était déjà fait remarquer avec un amendement visant à supprimer les groupements non majoritairement détenus par des pharmaciens lors des discussions en commission des affaires sociales. Pour poursuivre son raisonnement devant les députés présents dans l’hémicycle et qui, visiblement, « ne connaissent pas les groupements », il oppose la forme coopérative « qui est vertueuse » et qui « rend de réels services aux pharmaciens », à « une forme sous société généralement détenue par la finance, par des fonds de pension, et qui prélèvent une part importante de la filière du médicament. On me dit plusieurs centaines de millions d’euros. »
Concrètement, pour les sociétés coopératives ou les réseaux du commerce associé, l’amendement propose une « exonération complète des prélèvements qui, ensemble, ont un taux de 17,2 % : CSG à 9,2 %, CRDS à 0,5 % et le prélèvement de solidarité à 7,5 % », fait remarquer le rapporteur général Thibault Bazin, qui estime que les deux députés vont « très très loin ». « Je ne suis pas sûr que cela soit la méthode la plus efficace, poursuit le rapporteur général. Il faut qu’on s’attelle au problème de la financiarisation, mais ce n’est pas l’objet d’un PLFSS. »
Qu’importe, si Bertrand Bouyx, lui-même pharmacien, retire son amendement devant l’avis défavorable du gouvernement et du rapporteur général, Cyrille Isaac-Sibille, lui, maintient le sien, qu’il a par ailleurs travaillé avec le Collège des pharmacies de la Fédération du commerce coopératif et associé (FCA). « Le principe des groupements coopératifs et des commerces associés est de redescendre toute la création de valeur, plus concrètement les euros perçus par le groupement, directement aux pharmaciens. Il s’agit ici d’une exonération des revenus issus de la coopérative et des commerces associés », explique Domitille de Bretagne, présidente de Giropharm et membre du Collège des pharmaciens de la FCA. « Nous souhaitions porter une alternative pour rester indépendants et pour autant rester groupés et profiter des avantages du groupement. Si on est proactif pour porter des missions de santé publique, les mettre en place seul, c’est compliqué », poursuit-elle.
Pour Laurent Filoche, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine, « encore une fois, on mélange tout. Je rappelle que le plus grand représentant de la FCA, c’est Michel-Édouard Leclerc. » Il regrette cette nouvelle scission au sein de la profession : « On est tous dans le même bateau, sachant que nous sommes attaqués de toute part. » Pour Domitille de Bretagne, « c’est déjà une belle première victoire. C’est l’intérêt de notre modèle coopératif dans la lutte contre la financiarisation et dans l’indépendance du pharmacien qui est reconnu. »
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