SELON LES CONCEPTIONS psychologiques actuelles, le sentiment et le comportement religieux des individus répondraient à des mécanismes mentaux complexes qui pourraient s’être constitués au fil du temps conjointement aux processus cognitifs régissant les interactions sociales, dont ceux à la base de la Théorie de l’esprit, et auraient été pérennisés par la mise en jeu de certaines fonctions cognitives clés telles que la mémoire. Des analyses factorielles ont, de fait, établi qu’il existe bel et bien une telle structure psychologique et que celle-ci s’organise autour de deux éléments principaux, à savoir la conviction de l’implication de Dieu dans tous les aspects de notre vie et de sa capacité à réagir à nos comportements, nos écarts étant notamment susceptibles de déclencher sa colère divine.
Considérant cette structure psychologique validée, Jordan Grafman et ses collaborateurs ont voulu savoir quels sont les processus cognitifs qui sous-tendent le sentiment religieux en identifiant pour cela les foyers d’activation cérébrale qui leur correspondent. Cette équipe s’est donc appuyée sur la méthode d’échelonnement multidimensionnel, qui consiste à reconstituer une carte d'individus à partir d'une matrice de similarités ou de dissemblances entre ces derniers, pour établir, dans une première étude, les éléments psychologiques à la base du sentiment religieux et identifier, dans une seconde étude, leur substrat neural en ayant recours aux techniques d’imagerie fonctionnelle cérébrale.
Pour la première étude, ont été recruté 26 personnes droitières, d’un âge moyen de 37,7 ans, qui présentaient des degrés variables de religiosité alléguée. Ils ont été invités à évaluer le degré de similarité ou de dissemblance de 70 propositions ayant trait aux convictions religieuses et assemblées par paires en employant pour cela une échelle de Likert à sept niveaux allant de « parfaitement similaire » à « absolument pas similaire ». Les résultats ont ensuite été analysés par la méthode d’échelonnement multidimensionnel en appliquant différents facteurs limitatifs linéaires aux dimensions identifiées.
Cette analyse a révélé que seulement trois des dimensions évaluées présentaient un haut niveau de corrélation indépendante avec trois facteurs limitatifs linéaires. En clair, Grafman et coll. ont ainsi confirmé une notion précédemment formulée, à savoir que la croyance en Dieu a trois éléments fondateurs majeurs : la conviction de l’existence d’une puissance surnaturelle qui veille sur nous et guide nos actes, le sentiment que ladite puissance est capable de réactions émotionnelles pouvant aller de l’amour à la colère (avec, en corollaire, une éventuelle volonté de punition) et la culture religieuse acquise du fait à la fois des influences doctrinaires et de l’implication personnelle.
La seconde étude a consisté à demander à 40 sujets dont les caractéristiques démographiques étaient similaires à celles des 26 premiers s’ils adhéraient ou non aux propositions qui étaient à la base de l’étude précédente, le but étant d’objectiver par IRM fonctionnelle les réponses induites par ces propositions au sein du cerveau.
Les auteurs ont ainsi constaté que les propositions en rapport avec chacune des trois dimensions psychologiques précédemment identifiées « allumaient » des structures cérébrales connues pour moduler les fonctions cognitives de nature adaptative. Plus précisément, les propositions se rapportant à la première dimension (la perception de l’implication de Dieu dans notre vie) ont activé les circuits neuronaux des deux circonvolutions frontales inférieures, qui régissent notre compréhension des actions d’autrui ; de même, les propositions relatives à la deuxième dimension (la réactivité émotionnelle de Dieu) ont suscité des réponses au sein de la circonvolution frontale moyenne et de l’aire 11 de Brodmann situées dans l’hémisphère droit lorsqu’elles avaient trait à la « capacité de Dieu à faire montre d’amour » et au niveau de la circonvolution temporale moyenne et de l’aire B21 siégeant dans l’hémisphère gauche lorsqu’elles concernaient la « capacité de Dieu à exprimer de la colère ». Enfin, les propositions en rapport avec la troisième dimension (la culture religieuse acquise) ont activé de multiples aires cérébrales situées aussi bien à gauche qu’à droite.
Autre observation intéressante de cette étude par imagerie, les structures cérébrales activées par les trois dimensions prédéfinies ont été les mêmes chez les participants qui s’étaient déclarés croyants et chez ceux qui estimaient ne pas avoir de sentiment religieux. Qu’on l’admette ou non et quel que soit le nom qu’on lui donne, le sentiment d’une puissance supérieure serait donc en nous, découlant d’un processus évolutionnaire qui remonte aux fondements de l’espèce humaine.
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