« JE VOULAIS être industriel. » Voilà pourquoi le parcours de François Chast comprend, à la marge de ses diplômes de pharmacie, un écart par l’Institut d’études politiques. Mais les hasards de la vie le portent vers le monde hospitalier. Poussé par son chef de service, il passe sa thèse et obtient la médaille d’argent à 25 ans. Premier pharmacien de la famille avant que sa propre fille devienne officinale bien plus tard, il arrive sur le marché du travail en 1975, date à laquelle Simone Veil promulgue la loi de séparation de la pharmacie et de la biologie. Les pharmaciens en poste choisissent prioritairement la biologie, ce qui permet au nouveau diplômé d’obtenir rapidement un poste de chef de service au Kremlin-Bicêtre à moins de 26 ans, puis un poste équivalent à l’Hôtel-Dieu en 1979. « 30 ans plus tard, j’y suis toujours. »
Aujourd’hui, le service de pharmacie hospitalière de l’Hôtel-Dieu se compose de trois activités : un laboratoire de pharmacologie et toxicologie, « l’un des plus importants en France et la seule consultation médicojudiciaire de Paris » ; une unité pharmaceutique d’accueil des malades ambulatoires, créée lors de la fermeture de la vente aux particuliers de la pharmacie centrale des hôpitaux ; et une unité de préparation stérile ophtalmologique et oncologique.
« Il s’agit du premier centre européen de collyres hospitaliers, que nous envoyons vers 80 établissements dans toute la France, mais aussi à domicile si nous possédons les documents de prescription et d’assurance-maladie », annonce avec fierté le praticien. Un développement sans commune mesure avec la situation de 1979, où le seul outil de travail était une balance de Roberval.
Membre titulaire de l’Académie nationale de pharmacie depuis 1996, il était jusqu’alors secrétaire de la commission des substances vénéneuses et dopants, un sujet qui le passionne. Élu président de l’institution pour 2010, François Chast n’en tire aucune gloire. « Même s’il est toujours agréable d’être reconnu par ses pairs, nos vraies satisfactions sont ailleurs comme le fait de sortir un malade d’une mauvaise passe ou de faire quelque chose d’exceptionnel au plan scientifique, technique ou professionnel. »
Professeur associé à l’université Paris-Descartes, il est passionné par toutes les disciplines qu’il approche : pharmacocinétique, toxicologie, sciences pharmaceutiques et juridiques appliquées à la dispensation des médicaments, pharmacologie oculaire, mais aussi histoire de la pharmacie. « J’ai beaucoup de considération pour la chose historique, la contemplation de nos prédécesseurs, de leurs œuvres et de leur cheminement intellectuel. » Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont l’un s’intitule « Histoire contemporaine des médicaments ». Le plaisir d’écrire !
Une équipe en or.
Comment parvient-il à tout concilier ? En réduisant « les temps morts » : la nuit, le week-end, les vacances, et ses trajets en métro sont l’occasion de travailler. En comptant sur une femme compréhensive, elle-même prise par son métier de communicante. En s’appuyant sur « une équipe en or à l’Hôtel-Dieu, des collaborateurs que je considère comme les meilleurs des hôpitaux de Paris. »
Quant à ses projets à la tête de l’Académie, il aimerait créer une 6e section transversale. « Les problèmes de santé publique touchent à l’épidémiologie et les relations de l’homme et de son environnement : réchauffement climatique, ondes électromagnétiques, etc. La société impose une réflexion à ses élites scientifiques, dont l’Académie doit faire partie, même si elle doit rester fidèle aux sciences fondamentales comme la chimie dont je suis amoureux. »
Deuxième projet : « mettre en pièces les idéologies obscurantistes pour que la réflexion scientifique l’emporte sur l’opinion, le savoir sur le croire. En tant que scientifiques, nous devons avoir une attitude rigoureuse dans nos affirmations ». Troisième objectif : trouver un mode de dialogue pour dédramatiser les débats au sein de l’Académie.
Embrassant d’un regard les soixante dernières années, François Chast se dit le plus heureux des pharmaciens, même s’il aurait volontiers cumulé plusieurs vies pour connaître les joies d’autres métiers, comme celui d’architecte, par exemple. « J’ai beaucoup donné et beaucoup reçu, j’ai une carrière agréable avec d’immenses satisfactions et j’espère que ça va continuer. »
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