C’est par un simple article sur le blog conso du « Monde » que tout a commencé. Le 4 novembre, une certaine Andrea H. Japp y conte sa mésaventure. À la suite d’un abcès dentaire, elle se voit prescrire un antibiotique par son médecin, puis le même médicament par son dentiste. La bloggeuse se fait délivrer une première fois le traitement dans une pharmacie, puis tente de l’obtenir une seconde fois pour disposer, selon ses dires, « d’une boîte d’avance ». Pour ce faire, elle se rend dans une autre pharmacie qui, consultant son DP, lui refuse la délivrance… Le hic, c’est que la bloggeuse se rappelle avoir toujours refusé la création de son DP (et même à 4 reprises). Pas contente, elle dépose une plainte auprès du Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens du Centre-Val de Loire. Plainte laissée sans suite par l’instance au motif que « cette erreur n’est pas constitutive d’une faute justifiant une faute disciplinaire ».
Au-delà de cet étonnant épilogue disciplinaire, la plainte d’Andrea H. Japp lève un lièvre. Car le cas de DP ouverts sans le consentement du patient ne semble pas isolé. Une enquête menée en 2012 par le Collectif interassociatif sur la santé (CISS) avait ainsi conclu que seulement la moitié (52 %) des Français possédant un DP aurait donné expressément leur autorisation.
Fréquentes ou accidentelles, ces ouvertures de DP sans consentement ne laissent par Isabelle Adenot indifférente. La révélation de ces abus, et surtout leur traitement médiatique au parfum de scandale, « chagrine et contrarie » la présidente de l’Ordre qui confie au « Quotidien » : « à l’Ordre, nous avons bien reçu quelques courriers pour dénoncer de telles pratiques. Et une enquête menée par la Cour des comptes nous avait alertés sur ce point, il y a plusieurs années. Voilà pourquoi nous n’arrêtons pas de le dire et de le répéter aux confrères : l’ouverture du DP est conditionnée par le consentement exprès du patient. » Sans nier la réalité du problème, Isabelle Adenot veut aussi relativiser : « le DP accepté un jour, oralement, va travailler silencieusement pour le patient durant des années. Si, 4 ou 5 ans plus tard, on l’interroge sur l’existence de son consentement, il l’aura bien souvent oublié. »
Pour un consentement écrit
Pour la présidente de l’Ordre, cela ne fait pas de doute, tout le problème vient de ce consentement exprès prévu par la loi. « Ce consentement verbal, c’est une parole contre une autre, voilà ce qui met en danger le pharmacien », estime-t-elle. Voilà aussi pourquoi, elle plaide depuis longtemps pour un consentement écrit. « J’ai demandé à plusieurs reprises, mes courriers au ministère de la Santé et à l’ASIP* en attestent, que ce consentement soit signé. J’ai toujours essuyé des refus. » Autre tentative, autre refus : « j’ai écrit 4 ou 5 fois au directeur de la CNAM pour demander l’autorisation d’apposer l’autocollant "j’ai un DP" sur la carte Vitale. Une expérimentation a même été programmée avec fabrication de quelques stickers. Mais l’assurance-maladie a, chaque fois, refusé au motif qu’elle était propriétaire des cartes… »
Choqués par cette nouvelle polémique, au comptoir des officines les pharmaciens s’interrogent (voir ci-dessous) : alors qu’il a été conçu dans l’intérêt et pour la sécurité des patients, pourquoi le DP n’est-il pas automatiquement ouvert ?
Rendre le DP obligatoire, comme c’est le cas par exemple en Espagne ? La présidente de l’Ordre ne veut pas se résoudre à cette option. « Le consentement exprès est obligatoire, martèle-t-elle. On ne fait pas le bien-être des gens sans leur volonté. Si les patients adhèrent, très bien. Sinon, ils auront un moins bon service, mais ce sera de leur responsabilité. » Enfin, rappelle Isabelle Adenot à qui voudra l’entendre, si un patient veut savoir qui a ouvert son DP, l’information lui sera donnée. S’il souhaite le fermer, l’Ordre le fermera.
Début novembre, 32 278 593 DP avaient été créés en France.
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