LE 8 MAI 2002, un attentat commis à Karachi (Pakistan) avait causé la mort de 15 personnes dont 11 ingénieurs français qui participaient à la construction de sous-marins. La piste islamiste a été aussitôt explorée, puis les enquêteurs se sont demandé si les criminels n’avaient pas reçu un ordre d’hommes d’affaires pakistanais, soudainement privés en 1995 des commissions occultes versées par la France pour gagner le contrat. Dès qu’il a été élu en 1995, Jacques Chirac a demandé à son ministre de la Défense de l’époque, Charles Millon, de vérifier qu’une partie des commissions versées aux intermédiaires pakistanais n’était pas revenue en France sous la forme de « rétrocommissions » qui auraient financé des officines de campagne électorale. L’homme désigné par cette enquête, c’était Édouard Balladur, dont on se souvient qu’il avait été candidat à la présidence contre M. Chirac. Si les commissions sont tollérées dans le cadre des transactions avec les gouvernements corrompus, les rétrocommissions, elles, sont totalement interdites. D’où la thèse des avocats des familles des victimes de l’attentat de 2002 : Jacques Chirac, en annulant tout versement aux intermédiaires, les aurait incités à commettre l’attentat.
Le 15 novembre dernier, M. Millon a confirmé au juge Renaud Van Ruymbeke que son « intime conviction » à l’époque était que des rétrocommissions avaient été payées à des Français. De son côté, Édouard Balladur n’a jamais pu expliquer le versement à sa campagne d’une somme en liquide d’environ 10 millions de francs, soit un million et demi d’euros. De surcroît, Nicolas Sarkozy, qui avait pris position en faveur de M. Balladur et dirigé sa campagne, était, à l’époque du contrat, ministre du Budget dans le gouvernement de cohabitation dirigé par M. Balladur. Comme Jacques Chirac en son temps, M. Sarkozy ne peut pas être poursuivi tant qu’il est président. Les précédents montrent que la justice est patiente puisque M. Chirac va comparaître devant un tribunal pour les salaires fictifs de la Mairie de Paris.
Cependant, si M. Balladur risque d’être sérieusement ennuyé par la justice au sujet des rétrocommissions, dont il a rejeté l’hypothèse avec mépris mais sans se justifier, le principal accusateur, Charles Fillon, n’a pas la moindre preuve des rétrocommissions. Les avocats des familles des victimes de Karachi sont prompts à incriminer le chef de l’État, mais remonter jusqu’à lui ne sera pas une tâche aisée pour les enquêteurs. En outre, la responsabilité de l’attentat, pour autant que le lien entre l’arrêt des versements et le crime puisse être jamais établi, incomberait plutôt à M. Chirac. Il n’empêche que le seul commentaire à ce jour de M. Sarkozy sur l’affaire se résume à une simple phrase : « C’est une fable ». Ni l’opposition, ni les avocats des familles, ni l’opinion ne le lâcheront sur ce dossier et, si les explications ne sont pas claires et convaincantes, le risque est grand que sa campagne pour 2012 soit compromise.
Éric Woerth assiégé.
L’autre affaire n’est pas moins compliquée. Coup sur coup, on a appris qu’Éric Woerth pourrait bien passer devant la Cour de justice de la République en tant qu’ancien ministre, ce qui aggraverait la détresse d’un homme qui a été renvoyé du gouvernement parce qu’il traîne trop de casseroles. On aura noté que, après avoir été défendu bec et ongles par ses collègues et par le président, il a été abandonné à son sort sans ménagements. Déjà soupçonné de conflit d’intérêts, de favoritisme à propos de la Légion d’honneur qu’il a remise à Patrice de Maistre, le fondé de pouvoirs de Mme Bettencourt, et d’avoir obtenu de l’argent de la richissime héritière pour la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, il pourrait être poursuivi dans une affaire obscure de vente par l’État, sans appel d’offres et à un prix bas, d’un coin de la forêt de Compiègne pour qu’il soit transformé en terrain de courses hippiques. Plusieurs élus socialistes ont porté plainte contre lui. Par ailleurs, l’affaire Bettencourt va être dépaysée à Bordeaux afin qu’elle échappe au conflit qui oppose le procureur Philippe Courroye et la juge Isabelle Prévost-Desprez qui se sont disputés comme des chiffonniers au sujet de la possession du dossier. Enfin, un tribunal a jugé recevable la demande de la fille de Mme Bettencourt qui souhaite qu’elle soit mise sous tutelle. Cette affaire menace davantage M. Sarkozy que celle de Karachi, mais la mort de 11 ingénieurs français en 2002 et l’immense indignation de leurs familles pourrait avoir un effet terrible sur l’image du président.
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