CHAQUE année, les indicateurs économiques de l’officine s’enfoncent un peu plus dans le rouge. Et 2010 n’échappe pas à la règle, selon les derniers chiffres présentés par le président de la commission Économie de la FSPF*, Philippe Besset, à l’occasion de la Journée de l’économie organisée par « le Quotidien ». Pour la première fois, l’évolution du chiffre d’affaires officinal passe en effet sous la barre du zéro. Déjà, la marge baissait régulièrement mais, fait inédit, l’activité est désormais aussi en recul. « Nous allons devoir apprendre à vivre avec une économie en décroissance, c’est extrêmement difficile à faire », observe Philippe Besset. Confrontée à divers plans médicaments comprimant toujours davantage les prix et les volumes des médicaments remboursables, la pharmacie subit aussi de plein fouet la crise avec une baisse des ventes des spécialités non remboursables et de parapharmacie.
L’enquête économique annuelle réalisée par la FSPF (1 053 bilans clôturés en 2010) confirme cette baisse de l’activité de la pharmacie française. Certes, l’enquête montre que la marge est en légère progression, mais cela s’est fait au prix d’une très forte compression des charges de l’officine, avec notamment un blocage des salaires en 2010. L’élargissement du champ des médicaments génériques a également permis d’améliorer quelque peu la rentabilité, souligne Philippe Besset. Au final, on assiste à un arrêt de la dégradation des revenus des titulaires, dont le résultat par pharmacien s’élève à 90 000 euros en 2010. Un chiffre qui ne doit pas faire oublier que, sur les dix dernières années, le pouvoir d’achat des pharmaciens a tout de même baissé de 25 % et que 40 % des titulaires ont aujourd’hui un revenu inférieur au salaire net d’un pharmacien gérant.
La situation ne devrait pas s’améliorer l’an prochain compte tenu des nouvelles mesures touchant le médicament envisagées dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2012 (« le Quotidien » du 26 septembre). Un PLFSS qui pourrait coûter 150 millions d’euros de perte de marge pour l’officine, évaluent les syndicats. Les nouvelles dispositions vont entraîner « une stagnation de 80 % de l’activité officinale », prévoit Bernard Charles, président du Centre d’étude et de formation hospitalière (CEFH) et ancien député. Ce qui lui fait dire que les pharmaciens ont raison de se battre pour faire évoluer leur rémunération vers une part d’honoraire.
La fin d’un cycle.
Dans un tel contexte, la modification du mode de rémunération paraît en effet plus que jamais incontournable pour la pérennité du réseau. « Nous arrivons à la fin d’un cycle, affirme ainsi Philippe Besset. Si l’on ne change pas de modèle économique, nous allons l’an prochain dans le mur. » Mais attention ! « Le changement de rémunération ne résoudra pas tout comme un simple coup de baguette magique, prévient Francis Mégerlin, maître de conférence à la faculté de pharmacie de Paris Descartes. Mais plus on attend, plus les faibles vont aller vers la mort. » Gilles Bonnefond, président de l’USPO**, insiste, lui, sur le fait que « dans dix ans, le marché pharmaceutique ne sera plus du tout le même qu’aujourd’hui », notamment avec la mise en place de nouvelles règles de mise sur le marché des médicaments et de prix de plus en plus bas.
Le projet d’introduire une part d’honoraire, défendu par les trois syndicats représentatifs, associe des impératifs d’amélioration de la qualité du service pharmaceutique, de sécurité du patient, mais aussi économiques, résume Philippe Gaertner, président de la FSPF. Les pouvoirs publics semblent prêts à accepter. Le gouvernement a en effet inscrit dans le prochain PLFSS un article modifiant la portée de la convention avec l’assurance-maladie lui permettant d’envisager la rémunération sous forme d’honoraires.
Un moment qualifié « d’historique » par les organisations professionnelles qui souhaiteraient une entrée progressive du nouveau dispositif sur cinq ans. Pour eux, outre le maintien d’une part de marge commerciale, la nouvelle rémunération devrait comprendre trois types d’honoraires de dispensation (au patient, à la dispensation et à la ligne) et une indemnisation de missions, exonérée de TVA. Un projet qui convient également au Collectif des groupements, comme l’a souligné son président, Pascal Louis. L’heure est maintenant aux négociations.
** Union des syndicats de pharmaciens d’officine.
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