Le Quotidien du pharmacien. Communiquer sur son image et ses valeurs est devenu aujourd’hui une démarche incontournable pour les entreprises, au risque de vider ces concepts de leur sens. Représentant les pharmaciens et leurs officines, les groupements doivent-ils obligatoirement communiquer sur des valeurs ?
Xavier Pavie. Pour les clients, les pharmaciens font tous la même chose. Il est donc impératif que les groupements les aident à échapper à l’uniformisation. Et pour cela, ils ont avant tout besoin de trouver eux-mêmes un positionnement différenciant.
Cependant, leur rôle n’est pas de positionner leurs adhérents sur une politique de prix bas - ce qui est trop souvent le cas et qui n’est pas une valorisation en soi -, mais bien de leur adresser des solutions dans des zones de singularités, en les aidant à se positionner sur leur véritable valeur ajoutée, en l’occurrence les services.
Comment parvenir, dans ce cas, à fédérer les adhérents autour de valeurs communes ? La question est de savoir qui, du pharmacien ou du groupement, a des valeurs. Je défends le pharmacien en tant que tel et je serais tenté de dire qu’un groupement résulte d’un groupe de pharmaciens partageant des valeurs communes.
C’est donc l’ensemble de ces pharmaciens qui forme un groupement et non un groupement qui va imprimer des valeurs à ses adhérents. Ce constat m’amène à dire que la nécessité fondamentale d’un groupement est de sélectionner ses adhérents.
La migration d'adhérents de grands groupements vers des petits groupements émergents traduit-elle cette évolution ?
Je pense qu’il existe une limite aux groupements. La question consiste à savoir fixer un nombre maximal d’adhérents au-delà duquel les valeurs communes se diluent et le positionnement est difficile à tenir.
Il est certain que l’avenir n’appartient pas aux groupements massifs si les pharmaciens comprennent l’importance de leur propre rôle. Sans limiter leurs effectifs, les groupements ne pourront plus subsister à l’avenir. L’ancien modèle des groupements sélectionnés pour leurs conditions d’achat, mais sans image forte, ne tiendra plus longtemps. Les groupements doivent se réinventer. Certains groupements importants ont bien perçu cette nécessité et sont déjà en train d’opérer cette mutation.
Quelles sont les valeurs clés que doit décliner un groupement au nom de ses adhérents ?
C’est une question importante. En tout cas on peut dire qu’un groupement dont l’image et les valeurs reposent essentiellement sur le prix bas se fera vite surpasser par un autre. Les valeurs qui permettent aux pharmaciens et à leur groupement de se différencier sont celles qui correspondent à une segmentation de clientèle. Aussi, les valeurs véhiculées par le groupement seront intimement liées à leur segmentation.
À titre d’exemple, des titulaires qui partagent un intérêt commun pour le troisième et le quatrième âge et le maintien à domicile, pour les sportifs, ou encore pour les jeunes familles, peuvent se regrouper autour de valeurs communes qui seront relayées par leur groupement. Cette segmentation fonctionne très bien dans d’autres secteurs de l’économie, dans les transports aériens ou la grande distribution alimentaire, par exemple, pourquoi ne pourrait-elle pas être appliquée à la pharmacie ?
Le groupement serait-il alors chargé de la communication de ces valeurs ?
Il faudrait réfléchir à cette communication. Gardons à l’esprit que la publicité, en tant que telle, n’est pas nécessaire aux pharmaciens. Car à quelles fins dédier un budget pub de plusieurs millions ? Pour délivrer quel message différenciant ? Avez-vous déjà vu de la pub pour Uber, pour Facebook, Google ou encore pour une école ?
À l’instar de ce qui se passe pour ces entreprises de services, c’est le bouche-à-oreille qui est la meilleure publicité pour le pharmacien.
Toujours dans le domaine de la communication, l’image véhiculée par le groupement a-t-elle son importance ?
Plutôt que l’image, qui renvoie à la perception et à la représentation, et donc à la subjectivité, je préfère parler de la segmentation qui appartient au domaine de l’objectivité, de la rigueur.
J’opterais donc pour le positionnement plus que pour l’image, qui est un terme difficile à manier. Il ne faut pas oublier que l’image est réductrice. Elle s’inscrit sur un axe unique. Sacrifier le profil de son officine à l’image d’un groupement peut être très risqué, voire néfaste, à terme. Le retour sur investissement n’est pas garanti.
L’enseigne, qui prend de plus en plus d’envergure, répond-elle davantage aux besoins des pharmaciens en termes d’image et de valeurs ?
L’enseigne est un moyen, certes, mais elle n’est pas aussi déterminante que certains voudraient le faire croire. Car la construction d’une image est plus compliquée. Et s’il est louable de vouloir dégager une dimension personnelle et singulière, y compris avec des moyens de marketing innovants, il faut se demander si c’est ce que recherche vraiment le client.
Pour ma part, je pense qu’il reste préférable de tenir ses promesses en termes de segmentation. Le facteur émotionnel ne s’inscrit jamais dans la durée si vous n’adhérez pas aux valeurs que vous avez annoncées. À titre d’exemple, le succès des pharmacies adhérant au concept « naturel » dépasse la simple personnalité du créateur. Il tient essentiellement à la segmentation, qui est le point de rencontre entre deux aspirations. Dans ce cas, ni les valeurs, ni l’image ne seront plaquées. Au contraire, dans le cas d’une segmentation forte, valeurs et image émaneront tout naturellement.
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