MODALITÉS de calcul des hausses de loyer, augmentation du loyer lors du renouvellement du bail, répartition des charges entre bailleur et locataire… Les points de friction possibles avec le propriétaire des locaux commerciaux dans lesquels l’officine est exploitée ne manquent pas. Or, même si le loyer n’est pas le poste de frais le plus important pour une pharmacie, il peut devenir une charge difficile à supporter en période de baisse d’activité. « Dans Paris intra-muros, le poids du loyer peut facilement représenter 3 à 4 % du chiffre d’affaires hors TVA, soit près de 15 % de la marge commerciale. C’est une charge qui n’est plus tenable aujourd’hui, et c’est ce qui explique que, parfois, les vendeurs parisiens n’arrivent pas à trouver un repreneur », explique Philippe Becker, responsable du département Pharmacie de Fiducial.
Mais il n’y a pas que le loyer lui-même qui peut poser problème. La tendance générale pour les baux commerciaux, aujourd’hui, est de reporter sur le locataire un maximum – quand ce n’est pas la totalité – des charges du local, alors que cette répartition appartient au domaine de la liberté contractuelle. Une fois le contrat de bail signé avec une clause qui met tous les travaux et toutes les charges au débit du locataire, il est trop tard.
Avant de s’installer dans des nouveaux locaux ou au moment de la reprise du droit au bail d’un titulaire précédent, un examen très attentif du contrat de bail s’impose donc. Le droit des baux commerciaux étant très spécifique, mieux vaut se faire assister dans cet examen par son expert-comptable, un avocat spécialisé ou un notaire. « Il faut prendre le temps de la réflexion et, plutôt que d’utiliser un contrat prérédigé, faire rédiger le bail par un notaire. Le bail authentique améliore la protection du preneur », conseillent les notaires du réseau Pharmétudes.
En pratique, cet examen doit surtout porter sur les points suivants.
La durée du bail.
Le bail commercial doit avoir une durée minimale de neuf ans… mais pas davantage ! En effet, au moment du renouvellement du bail - soit neuf ans après la signature du bail initial -, la hausse du loyer est normalement plafonnée à hauteur de l’évolution de l’indice INSEE du coût de la construction constatée dans ce délai. Pour ce calcul, on prend en compte, à défaut de clause du bail fixant un trimestre de référence, le dernier indice trimestriel publié au jour du renouvellement effectif et l’indice correspondant publié neuf ans auparavant.
Mais attention : le principe du plafonnement est écarté si le bail qui vient à échéance avait une durée supérieure à neuf ans ou si le bail est renouvelé pour une durée supérieure à neuf ans, ou encore si le bail qui vient à échéance, même conclu pour neuf ans, s’est poursuivi tacitement au-delà de douze ans à défaut de renouvellement proposé par le bailleur ou de demande de renouvellement du locataire. Dans ces trois hypothèses, le nouveau bail peut donc être déplafonné et le loyer augmenté considérablement. Même si ce loyer renouvelé doit correspondre à la valeur locative des locaux, il faudra alors négocier pied à pied cette augmentation avec le bailleur… En pratique, d’ailleurs, la procédure de renouvellement fait que c’est le bailleur qui détermine le prix du nouveau loyer, à charge pour le pharmacien de l’accepter ou de le contester, ou sinon d’être obligé de quitter les lieux. Attention aussi car de nombreuses autres situations permettent au bailleur de déplafonner le montant du loyer au moment du renouvellement et de demander ainsi un prix plus élevé que celui qui résulte de la variation de l’indice INSEE. Pour une officine, ces cas de déplafonnement peuvent tenir aux caractéristiques des locaux (si des gros travaux ont augmenté leur valeur locative), aux facteurs locaux de commercialité (si le quartier s’est beaucoup développé) et, dans une certaine mesure, aux conditions de prix pratiqués dans le voisinage.
La question des charges.
Autre point épineux : la répartition des charges et des travaux. Le statut des baux commerciaux ne fixant pas de liste de charges récupérables, la clause relative aux charges doit être surveillée avec attention. Il faut donc en négocier la répartition avec le bailleur, sachant que les dépenses courantes d’eau, de gaz et d’électricité, les impôts locaux et les frais de copropriété sont en principe à la charge du locataire. En revanche, le pharmacien ne peut en principe supporter les charges incombant normalement au bailleur - assurances de l’immeuble, taxe foncière… - que si cette obligation est prévue expressément dans le contrat.
Il en est de même pour les travaux d’entretien et de réparation. Le décret de 1953 ne définissant pas précisément les travaux qui doivent être pris en charge par le locataire et ceux qui doivent être réglés par le bailleur, la rédaction des clauses correspondantes est capitale. En vertu de la jurisprudence et des règles civiles sur le contrat de louage, toutefois, c’est normalement au locataire d’effectuer les réparations locatives et le petit entretien, et au bailleur d’assumer les grosses réparations et les dépenses d’entretien dues à la vétusté. En cas de litige, il faut savoir que la jurisprudence interprète ces clauses de manière restrictive : le pharmacien ne peut donc pas être tenu de payer des travaux qui ne sont pas prévus dans le contrat, même si l’usage les met normalement à sa charge.
La cession du bail.
Le statut des baux commerciaux prévoit qu’à partir du moment où le titulaire d’un bail commercial cède son droit au bail à une personne qui reprend en même temps le fonds de commerce, la cession du droit au bail est libre, et ni le bailleur ni une clause quelconque du contrat de bail ne peuvent s’y opposer.
Cependant, le contrat peut prévoir des modalités pour la cession du droit au bail : ainsi, il est souvent prévu que le successeur dans le fonds de commerce devra être « agréé » par le propriétaire. Certains baux, plus rares, prévoient également la rédaction d’un acte authentique entre l’acquéreur et le vendeur et sur lequel le propriétaire devra porter sa signature. Or, pouvoir céder le droit au bail au moment de la vente de l’officine est absolument essentiel : il faut donc relire le bail ou le faire examiner par un juriste pour connaître les clauses éventuelles concernant la cession du bail et du fonds. À noter également que, malgré une pratique contraire qui tend à se développer chez certains bailleurs, le propriétaire des locaux ne peut pas profiter de la cession du fonds pour augmenter le loyer. En effet, le loyer commercial d’une officine ne peut être augmenté que lors de la révision triennale du bail (après trois ans) ou lors du renouvellement (après neuf ans). De plus, la cession du bail à l’acquéreur de l’officine ne modifie pas le bail primitif, qui subsiste en l’état et avec le même loyer. Le changement de titulaire du fonds ne constitue donc pas, à lui seul, un motif suffisant pour revaloriser le loyer.
Toutefois, si la commercialité de l’officine a augmenté peu de temps avant la cession, le bailleur pourra demander au nouveau locataire, à certaines conditions, un déplafonnement du loyer lors de la prochaine révision ou lors du renouvellement suivant. De même si l’ancien locataire a effectué des travaux d’amélioration qui ont accru la valeur locative des locaux. De même encore, si des travaux de réparation étaient à la charge du vendeur : cette obligation sera transmise au nouveau locataire qui devra faire effectuer ces travaux à sa charge. Là aussi, la prudence recommande donc au pharmacien acquéreur du fonds de vérifier que les conditions du bail et son exécution par le vendeur ne sont pas susceptibles d’entraîner une hausse de loyer ou des frais à sa charge…
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