Comment expliquer les complications cardiovasculaires chez les patients atteints de forme grave d'infection à SARS-CoV-2 ? Des anatomopathologistes de Zürich montrent à partir de prélèvements chez trois patients ayant eu une forme grave de l'infection (deux décédés, un opéré) qu'il n'y a pas qu'une inflammation du tissu pulmonaire, mais aussi au niveau du tissu endothélial des vaisseaux au sein de plusieurs organes.
L'équipe suisse a également mis en évidence au microscope électronique que le virus est bel et bien présent dans les tissus et qu'il entraîne une nécrose du tissu endothélial. Ces éléments microcirculatoires plaident en faveur d'une endothélite systémique, pouvant toucher le poumon, le cœur, le cerveau, le rein et les intestins.
Pour cette démonstration, les chercheurs sont partis du fait que le récepteur ACE2, la porte d'entrée du virus, est exprimé non seulement au niveau du poumon, mais aussi d'autres organes. De plus, les cellules endothéliales expriment également ACE2 et le coronavirus s'est révélé capable d'infecter des vaisseaux organoïdes à partir de cellules humaines in vitro.
Deux autopsies et une chirurgie
Dans ce travail, l'équipe du Pr Zsuzsanna Varga a d'abord constaté chez un patient greffé rénal de 71 ans, coronarien et hypertendu, des inclusions virales dans les cellules endothéliales du rein. À l'histologie, a été observée une accumulation de cellules inflammatoires dans l'endothélium avec des corps apoptotiques, au niveau du cœur, de l'intestin grêle et du poumon. Des cellules mononucléées étaient retrouvées en grand nombre au niveau du poumon, la plupart des vaisseaux étant congestifs.
Le second cas était une femme de 58 ans diabétique, hypertendue et obèse, ayant présenté une ischémie mésentérique à J16 de l'infection puis une insuffisance cardiaque droite post-infarctus ayant entraîné le décès. L'histologie a mis en évidence l'infarctus myocardique sans aucun signe de myocardite lymphocytaire. L'intestin grêle était le siège d'une endothélite des vaisseaux sous-muqueux.
Quant au troisième cas, un homme âgé de 69 ans ayant présenté une détresse respiratoire, une résection intestinale a dû être réalisée pour ischémie mésentérique. Le patient a survécu et seul le tissu réséqué a été analysé à l'histologie. Là encore, une endothélite de vaisseaux sous-muqueux a été observée avec des corps apoptotiques.
Des pistes de traitement
Comme le rappellent les auteurs, une dysfonction endothéliale se traduit par une vasoconstriction, qui peut ensuite entraîner une ischémie d'organe, une inflammation avec œdème tissulaire et un état procoagulant. L'endothélite Covid-19 pourrait ainsi expliquer les dysfonctions microcirculatoires systémiques et les conséquences cliniques observées chez les patients infectés.
Les médecins suisses proposent ainsi une piste de traitement visant à stabiliser l'endothélium à l'aide de molécules anticytokines, d'inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine et des statines, notamment chez les patients fragiles ayant une dysfonction endothéliale préexistante (hypertension, diabète, antécédent cardiovasculaire).
Z Varga et al.The Lancet. doi.org/10.1016/S0140-6736(20)3093-S