Les réticences des groupements envers les cabines sont nombreuses. Les règles sanitaires dans le cadre de l'épidémie se sont ajoutées aux réserves liées aux coûts élevés d'un tel investissement. « Certes, nous trouvons les cabines bien équipées, mais leur prix est prohibitif pour intéresser les groupements, et donc les pharmaciens », observe Alexis Bocahut, président de Pharmacyal. Le coût mensuel d'une cabine excède 1 000 euros. « Il faudrait faire des dizaines de téléconsultations par mois pour que ce soit rentable, ce qui est, à notre avis, peu réalisable », lâche-t-il.
« Less is more », telle pourrait être la devise des groupements qui proposent dans leur grande majorité un concept de téléconsultation à partir d'un ordinateur portable, voire d'une borne, et d'instruments connectés pour mesurer les constantes. Cela permet, constate Patrick Rémond, directeur des réseaux du groupement Les Pharmaciens associés, de limiter les coûts à l'installation. « Seuls des objets connectés et un abonnement à la plateforme sont nécessaires. Pour la partie matériels, si le pharmacien dispose d’un ordinateur avec une Webcam, deux objets connectés sont obligatoires afin d’être compatibles avec la plateforme. Il s’agit d’un stéthoscope et d’un otoscope pour un montant de 1 230 euros (avec possibilité de leasing à 28 euros/mois pendant 48 mois). À cela s’ajoutent deux objets connectés complémentaires : oxymètre et tensiomètre », détaille-t-il. « De plus, insiste-t-il, l’abonnement mensuel de 79 euros, résiliable à tout moment, comprend : l’accès à la plateforme de médecins téléconsultant et le transfert des informations des objets connectés directement aux médecins via USB. » Ces versions light, faciles à manipuler, sont plébiscitées par la plupart des groupements (voir pages 30 à 34).
Transmissions de l'ordo
La téléconsultation en version light ne doit cependant pas ignorer deux critères essentiels. La mesure des constantes, au besoin avec l'intervention des pharmaciens, est sans conteste la plus-value que les groupements mettent en avant pour justifier la téléconsultation versus sa version à domicile. « Nous recommandons à nos adhérents de prendre ces appareils médicaux de mesures des constantes qui ont pour avantage d'avoir un résultat instantané. Il existe même des stéthoscopes connectés synchrones, c’est-à-dire que le médecin peut à distance écouter en temps réel son patient », expose Hervé Jouves, président de Lafayette, dont le groupement a signé un premier partenariat avec la société Qare, d'autres négociations étant en cours.
Deuxième fonctionnalité incontournable : la possibilité de transmettre l'ordonnance directement au comptoir de l'officine, une fois la téléconsultation achevée. Sous réserve, bien entendu, de l'accord du patient, comme le prévoient les textes réglementaires. Dans la plupart des solutions, un logiciel permet la transmission de l'ordonnance, parfois sous forme de QR Code, à l'officine choisie par le patient. « L'installation de l'interface dans l'officine est réalisée par le LGO Smart RX », précise Vincent Le Floc'h, dont le groupement Alphega a opté pour la solution Maiia. « Nous avons prévu une interface avec la pharmacie. Quel que soit le prestataire de téléconsultation retenu par le pharmacien, en venant du site de la pharmacie, en se connectant sur cette interface, le patient peut cliquer sur la fonction téléconsultation et transmission de l'ordonnance », décrit Olivier Verdure, directeur marketing du groupement Apsara et directeur de Pharmonweb. Le groupement qui avait initialement conclu un partenariat avec Medicitus a poursuivi son engagement quand ce prestataire a rejoint Maiia.
Des solutions maison
Toutefois, certains groupements offrent à leurs adhérents, en fonction de leur situation financière et de l'espace de leur officine, le choix entre les deux solutions : borne ou cabine. C'est le cas de Mutualpharm, qui collabore avec Cegedim et Medadom, et d'Elsie, qui propose une cabine sur-mesure tout équipée à 18 000 euros, parallèlement à des équipements classiques de base pour une salle de confidentialité. Ou encore d'Évolupharm, qui travaille avec deux partenaires différents, Maiia et Tessan, et détient ainsi deux options : Maiia avec des appareils médicaux connectés, ou Tessan et ses bornes ou cabines. La version cabine est également déclinée par Excel-Pharma qui a développé, avec son partenaire Medadom, une solution de téléconsultation au moyen de « petites cabines type présentoirs ou de bornes ». Quelques rares groupements ont par ailleurs conçu leur propre modèle. C'est le cas de Pharmodel qui déploie Dconsult depuis juillet 2019 ! « Notre approche a vocation à être la plus adaptable possible afin de pouvoir offrir à tous nos affiliés la possibilité de la mettre en œuvre. Aussi, nos solutions peuvent se déployer du simple ordinateur à la cabine en passant par la borne tactile, tous dotés de tous les équipements connectés », expose Raphaël Grosjean. Toutefois, la plupart des groupements proposent la téléconsultation dans un format allégé, mais non moins opérationnel. L'enjeu étant de limiter les risques financiers en abordant ce terrain encore inconnu.