Il semblerait que ce service de téléconsultation à l'officine ne se suffise pas à lui-même. Certains groupements voient plus loin. Selon eux, la téléconsultation peut être considérée comme une véritable valeur ajoutée pour l'économie officinale à la seule condition d'être doublée d'une application mobile. C'est le cas de PHR, qui sortira son application dans le courant du mois. Mais aussi pour Elsie, dont l'application est reliée au site d’e-commerce, pour Pharmodel avec son application D santé, ou encore pour Pharmacorp, groupement pour lequel l'appli est déjà une réalité.
Car, selon ces groupements, cette application qui permet au patient d'entrer en contact avec la plateforme de téléconsultation doit drainer la prescription vers l'officine, but véritable de la téléconsultation. « L'objectif est de ne pas perdre les patients qui, pour 90 % d'entre eux, consultent depuis leur smartphone », affirme Laurent Filoche, président de Pharmacorp, dont les 50 pharmaciens reliés à Maiia proposent également l'appli mobile à leurs patients.
En écho, Alexis Bocahut, président de Pharmacyal, rappelle que « la téléconsultation est un service supplémentaire que peut apporter le pharmacien à son patient. Il ne faut cependant pas oublier que son vrai métier est la délivrance et le conseil associé ». Pas question donc pour les groupements les plus en pointe dans la téléconsultation de négliger cet aspect. Pour répondre aux exigences du patient 3.0, le groupement LeaderSanté a fait évoluer les fonctionnalités de son application mobile en intégrant la livraison de médicaments et de parapharmacie à domicile, note Alexis Berreby, l'un des dirigeants du groupement.
L'avantage d'un pack tout en un
Mais la téléconsultation est également considérée par les groupements comme un outil ouvrant la porte physique de l'officine vers le TROD, la vaccination, ou encore les entretiens pharmaceutiques. « Nous avons retenu comme partenaire Maiia qui a mis en place une version aboutie de la téléconsultation à l'officine en intégrant de façon native la gestion des rendez-vous et de l'agenda officinal. Cette nouvelle interface a été conçue pour abriter le télésoin qui a connu une accélération dans son lancement en officine dans cette période de gestion du Covid-19 », expose Christian-Eric Mauffré, directeur de Ceido. C'est du reste dans la globalité des périmètres de ces usages téléconsultation et télésoin et de leurs tarifications respectives que le groupement Ceido, appréhende le retour sur investissement du dispositif, « sans compter l'intérêt des prises de rendez-vous pour des TROD, la vaccination et les animations thématiques », ajoute Christian-Eric Mauffré.
De fait la technologie a d'ores et déjà intégré des services en distanciels. Anthony Hurault, directeur d'Aelia, indique ainsi que le partenariat conclu avec Maiia permet de proposer aux adhérents « un pack téléconsultation + télésoin + agenda ». « Le télésoin est une vidéo-consultation entre le pharmacien et le patient, permettant entre autres le renouvellement d'ordonnance », décrit-il. Même chose pour la fonction agenda qui permet de visualiser un planning en réservant des plages horaires, au-delà de la téléconsultation, à des bilans de médication, des entretiens pharmaceutiques ou encore des dépistages. Cette extension au télésoin a également été un élément décisif dans le choix de Pharmacyal pour Maiia. « Cette solution nous paraissait la plus proche de l'attente du pharmacien d'officine. En effet, outre la téléconsultation, elle permet le télésoin pour les entretiens pharmaceutiques et la délivrance de médicaments, avec prise de rendez-vous avec le pharmacien d'officine grâce à la mise en place d'un agenda », déclare Alexis Bocahut, président du groupement. Il insiste par ailleurs sur la sécurisation des envois d'ordonnances par Maiia grâce à son service de e-prescription que ne détiennent pas tous les acteurs de la téléconsultation.
Penser écosystème
PHR n'a pas hésité à étendre la téléconsultation médicale à un service qui lui est bien spécifique et qu'il propose dans ses officines adhérentes depuis de nombreuses années : les entretiens de diététiciennes. « Il est ainsi possible aux patients qui ont des questions particulières entre deux entretiens de contacter la diététicienne. L'intégration de ce service au dispositif de téléconsultation répond à une réelle demande des patients », expose Lucien Bennatan, président de PHR Groupe, dont 48 pharmacies adhérentes fonctionnent avec Tessan et 34 autres avec Maiia. « Il ne faut pas voir la téléconsultation comme un système isolé, mais bien comme un dispositif relié à l'ensemble de l'écosystème digital de l'officine », indique Lucien Bennatan.
Cette approche holistique de la pharmacie 3.0 semble en effet être la stratégie poursuivie par les groupements. « Notre principal enjeu est de positionner le pharmacien comme acteur clé de premier recours, avec l’arrivée prochaine de la dispensation sous protocole. Il s’agit de construire un vrai parcours client intégrant la téléconsultation, mais aussi le télésoin, qui vont contribuer à améliorer l’accompagnement des patients dans les prochaines années », confirme de son côté Gilles Unglik, directeur général opérationnel de Giropharm.
Une extension à l'interpro
La téléconsultation est une technologie qui permet d'inscrire l'officine dans son environnement pluri et interprofessionnel. Le texte de l'avenant 15 le rappelle, puisque le pharmacien est appelé à « veiller à ce que le parcours de soins soit respecté ». Certes la période du Covid a quelque peu brouillé les pistes de ce parcours de soins, notamment au plus fort de la crise, quand nombre de cabinets médicaux restaient fermés. Il n'en reste pas moins que plusieurs groupements, comme Ipharm et Univers Pharmacie, ont explicitement inscrit ce principe de l'avenant 15 à leur démarche. Ces groupements envisagent ainsi essentiellement l'acte de téléconsultation à l'officine dans le cadre d'une Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS). « Nous encourageons et accompagnons nos pharmaciens à la création et à la participation à des CPTS qui sont la pierre angulaire de la médecine de demain », affirme Franck Azouierat. Daniel Buchinger, président d'Univers Pharmacie, a ainsi déployé avec un partenaire dont il veut préserver l'anonymat, un concept de téléconsultation. « Ce dispositif permet de compléter l'offre de soins dans le périmètre immédiat de la pharmacie grâce à l'exercice coordonné (CPTS, SISA.) avec d'autres professionnels de santé, des pédiatres notamment », décrit-il. Il insiste sur la souplesse de ce concept qui repose par ailleurs sur une hiérarchisation du recours. Le premier praticien requis étant, par principe, le médecin traitant du patient. « Il ne faut pas se mettre en concurrence avec les médecins mais être intelligent pour être intelligible », souligne le président d’Univers Pharmacie.
La téléconsultation ne serait-elle donc que l'une des briques de la télésanté ? C'est la vision de nombreux groupements pour lesquelles la prochaine étape sera le déploiement de la télépharmacie.