Paris en fête ? Dans les officines, pas vraiment. L’organisation des Jeux olympiques dans la capitale a pesé lourd sur l’économie des pharmacies parisiennes au milieu de l’été. « On remarque que Paris est plus de deux fois moins dynamique que la France entière », analyse David Syr, directeur général adjoint du Gers Data et directeur exécutif de Cegedim Pharma, à l’issue de la première phase des JO. En effet, en termes de chiffre d’affaires (CA), les officines parisiennes enregistrent, sur la semaine d’ouverture (semaine du 26 juillet) et sur les deux semaines de compétition (du 29 juillet au 9 août), un CA de +2 % par rapport à 2023, quand la France est à +5 %. Les officines situées à proximité des sites de compétition, elles, dévissent complètement : -14 % pour les Champs-Élysées et le Trocadéro sur les trois semaines, avec un pic à -29 % à l’issue de la première semaine de compétition. « Les Jeux olympiques sont une très grosse déception pour tout le monde », résume René Maarek, président UPRP-USPO d'Île-de-France et de Paris, qui lui-même enregistrait une perte de CA de 57 % dans son officine du quartier de Bastille. Barrières, stations de métro fermées, bus déviés, population passive, exode des Parisiens et absence des touristes habituels sont autant de raisons relevées par les pharmaciens pour expliquer ce fiasco.
Plombées par la perte des ordonnances
Les résultats sont surtout plombés par les prescriptions – ou l’absence de prescriptions – à Paris (-1 % sur 3 semaines), plus encore pour les pharmacies proches des sites olympiques (-13 %), alors que le réseau national enregistre un CA positif par rapport à 2023 sur la période (+4 %). Signe que les Parisiens ont fui Paris, avec leurs ordonnances. « Les autres années, on constate une baisse sur 10 à 15 jours, mais cette année, c’est plus long, les Parisiens sont partis plus tôt, avant le début des JO ! », constate René Maarek.
En 3 semaines, les prescriptions ont chuté de 13 % dans les pharmacies proches des sites olympiques
Sur le rayon conseil, il n’y a pas de différence significative sur la période entre Paris et la France entière en chiffre d’affaires (+10 % sur la France, +9 % à Paris), mais les pharmacies proches des sites olympiques perdent définitivement sur tous les tableaux avec -14 % sur l’OTC et la parapharmacie. En plus des pertes de revenus, il faut tenir compte des stocks immobilisés revus à la hausse pour éviter les problèmes d’approvisionnement et le surcoût de charges de personnels venus en renfort, qui alourdissent le bilan intermédiaire. C’est pourquoi la profession réfléchit à une demande d’aides compensatrices.
Un sinistre en cours
« C’est une démarche en deux étapes, décrit René Maarek. Nous comptons d’abord demander une aide d’urgence car certains pharmaciens n’ont pas la trésorerie pour faire face maintenant, puis une aide définitive avec des arguments comptables. » Mais pour cela, il faut attendre les chiffres complets et définitifs. « L’idée c’est de ne pas se précipiter, il faut prendre le temps de construire le dossier pour mettre toutes les chances de notre côté, poursuit René Maarek. Et l’histoire n’est pas finie ! Il y a aussi les Jeux paralympiques. »
Schématiquement, « c’est un peu comme une fuite d’eau ! Le sinistre est en cours, on prévient d’abord l’assurance pour signaler qu’il se passe quelque chose, puis on chiffre les dégâts quand tout est fini », explique René Maarek, qui présente un plan d’action : les pharmaciens devraient d’abord demander une aide auprès de l’Agence régionale de santé (ARS) puis, dans un second temps, pourquoi pas à la Mairie de Paris, à l’instar des restaurateurs et des commerçants de la ville. « On va essayer d’aller chercher des fonds partout, mais c’est pour récupérer nos pertes », complète le président UPRP-USPO, qui propose une demande d’aide individuelle plutôt que collective, « pour éviter d’autres inégalités. »
De son côté, l’État avait anticipé avec la mise en place d’une commission nationale « chargée d’instruire les demandes d’indemnisation des professionnels qui s’estiment pénalisés économiquement par les mesures de restriction ou d’interdiction de la circulation, de la navigation fluviale ou de l’accès à certaines zones prises par l’État pour la bonne organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ». Mais il faudra s’armer de patience. Le dossier, justifié, ne pourra être déposé en ligne qu’à partir de début 2025, « une fois que les comptes 2024 auront été arrêtés et feront apparaître le préjudice dont l’indemnisation est demandée », indique Bercy.
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