Les médecins se sont engagés à prescrire moins de médicaments « à chaque fois que cela est possible », ou de manière plus pertinente, et à collaborer avec les pharmaciens. C’est inscrit noir sur blanc dans la convention médicale signée le 4 juin par l’assurance-maladie et cinq syndicats représentatifs des médecins libéraux sur six (MG France, Avenir-Spé Le Bloc, la CSMF, la FMF, le SML).
En effet, à plusieurs reprises, les médecins conventionnés s’engagent à travailler avec les pharmaciens dans plusieurs actions prioritaires mises en place avec l’assurance-maladie, visant à favoriser le bon usage des soins et à faire des économies. En premier lieu, la nouvelle convention médicale a l’ambition de réduire la polymédication « en s’appuyant autant que besoin sur une collaboration pharmacien-médecin ». L’assurance-maladie a fixé des objectifs : les médecins doivent diminuer de 4 molécules le traitement chronique des patients hyperpolymédiqués (plus de 10 molécules) et de 2 molécules le traitement des patients polymédiqués (plus de 5 molécules) de 65 ans et plus.
Une consultation longue de déprescription pour les patients âgés de plus de 80 ans hyperpolymédiqués
Pour cela est prévue, à partir de janvier 2026, une consultation longue de déprescription pour les patients âgés de plus de 80 ans hyperpolymédiqués, rémunérée 60 euros pour le médecin traitant à condition que le patient ait réalisé un bilan partagé de médication (BPM). Pour faire décoller la mission en pharmacie, les médecins s’engagent ainsi à prescrire des BPM, à « collaborer avec les pharmaciens à la suite des bilans partagés de médication pour déprescrire certains médicaments » et à « coopérer avec le pharmacien lorsqu’il identifie un risque iatrogène au moment de la dispensation », idéalement en passant par l’ordonnance numérique. Une bonne idée ? « Ce qui se passe dans la vraie vie, c’est que le médecin traitant se retrouve avec des ordonnances de polymédication basées sur des avis de spécialistes isolés. Comment prioriser ? Il n’y a que par le dialogue avec les spécialistes. Le BPM ne va pas lever la difficulté qui est la concertation entre médecins traitants et spécialistes. Ce que nous voulons, ce sont des réunions de concertation pluridisciplinaire », explique le Dr Sophie Bauer, présidente du Syndicat des médecins libéraux (SML).
Pour séduire aussi les pharmaciens, l’assurance-maladie a également proposé, dans l’avenant à la convention pharmaceutique, une revalorisation du tarif du BPM (+5 à + 10 euros selon les étapes) et un paiement à l’acte.
Des prescriptions conformes
L’assurance-maladie veut aussi réduire les volumes remboursés de plusieurs molécules. Dans le viseur : les antibiotiques (objectif : - 10 % dès 2025, puis - 25 % en 2027), les opioïdes (- 10 % dès 2025), les inhibiteurs de la pompe à protons (diminuer de 20 % chez l’adulte et les limiter chez l’enfant aux seules indications recommandées par la Haute Autorité de santé), les compléments nutritionnels oraux (- 5 % d’ici à 2027) ou encore les pansements techniques prescrits en postopératoires (- 5 % dès 2025, avec la volonté d’engager des travaux conventionnels avec les infirmiers et les pharmaciens pour adapter les prescriptions), et faire respecter le seuil réglementaire de 200 bandelettes/an pour les patients diabétiques éligibles.
L’autre grande ambition de l’assurance-maladie est de remettre les prescriptions en conformité avec les indications thérapeutiques remboursables. Et recadrer par-là les prescriptions hors AMM présentées au remboursement. Objectif : viser 80 % de prescriptions conformes sur quelques molécules prioritaires, notamment les analogues des GLP-1. De leur côté les médecins s’engagent utiliser la mention « NR » sur l’ordonnance, à utiliser les ordonnances de médicaments d’exception et à « coopérer avec le pharmacien qui s’interrogerait sur le caractère remboursable d’une prescription au moment de la dispensation ». Ils s’engagent aussi à respecter les « qualités techniques » des prescriptions, toujours en coopération avec les pharmaciens, et à déployer la e-prescription.
Enfin, l’assurance-maladie veut renforcer le juste recours à l’ordonnance bi-zone pour les patients en affection longue durée (ALD). « Le non-respect de cette distinction entraîne une dépense indue pour l’assurance-maladie », clame l’organisme payeur.
Nouveaux tarifs de consultation et lutte contre les déserts médicaux
La convention médicale acte des augmentations de tarifs pour les médecins :
- La consultation d’un médecin généraliste passera à 30 euros en décembre 2024 ;
- Mise en place d’une consultation longue du médecin traitant pour les plus de 80 ans à 60 euros, une fois par an et pour des situations complexes et chronophages : la sortie d’hospitalisation, l’entrée dans un parcours médicosocial, la déprescription en cas de polymédication (au 1er janvier 2026) ;
- Un effort a été fait sur la santé mentale : la consultation de psychiatrie passe à 57 euros, et la consultation de pédopsychiatrie à 75 euros ;
- Plusieurs consultations de spécialités, dont celles en perte d’attractivité, sont aussi revalorisées : la pédiatrie (dont la consultation classique de l’enfant de moins de 2 ans qui passe à 40 euros, 35 euros pour l’enfant de 2 à 6 ans ; revalorisation jusqu’à 60 euros pour les consultations obligatoires de l’enfant), la gériatrie (consultation de référence qui passe à 42 euros au 1er juillet 2025), la gynécologie (consultation de référence qui passe à 40 euros), la dermatologie (consultation de dépistage du mélanome à 60 euros), l’endocrinologie (consultation très complexe à 62 euros).
Pour améliorer l’accès aux soins, notamment dans les déserts médicaux, l’assurance-maladie met en place plusieurs mesures visant à soutenir l’activité des médecins dans certains territoires, ou encore à inciter l’installation en zone sous denses (primes d’installation, aides ponctuelles, consultations avancées, développement d’équipes de soins spécialisées…).
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