L’Italie serait-elle en train de s’acheminer vers une pénurie de pharmaciens ? C’est du moins ce qu’affirment certains ordres régionaux de pharmaciens car si le nombre d’officines reste stable avec 19 997 pharmacies, en revanche, les candidats au métier ne se bousculent plus. Le secteur peine à attirer les jeunes et à fidéliser des salariés découragés par de faibles rémunérations et l’absence d’avancement professionnel. La situation est particulièrement dramatique dans certaines régions comme le triangle du Frioul-Vénétie-Julienne (nord) où quelque 200 pharmaciens manquent désormais à l’appel. Dans le centre du pays à Bologne, le scénario est identique tout comme dans les régions du sud et certaines officines envisagent de réduire leurs heures d’ouverture.
1 600 euros net après 10 ans d’ancienneté
Pour inverser la tendance et inciter les jeunes à choisir l’officine, il faudrait en premier lieu rehausser les salaires insuffisants par rapport à la surcharge de travail, notamment depuis la pandémie. « Pendant des années, les pharmaciens ont plaidé pour une revalorisation de la profession car ils estimaient qu’ils étaient en train de se transformer en de simples commerçant » confie le pharmacien Mario Bertolaso. Avec la création des « super pharmacies » qui peuvent effectuer des réservations pour les patients dans des structures publiques et conventionnées, réaliser certaines analyses de sang, les pharmaciens ont obtenu la revalorisation professionnelle réclamée. Mais depuis le Covid, d’autres tâches se sont ajoutées et les pharmaciens constatent désormais une surcharge de travail qui n’a pas été suivie de hausses de rémunération pour les pharmaciens salariés. « En quatre ans, notre rôle a changé, nous vaccinons, nous testons, nous assurons même le suivi médical de certains patients notamment les jeunes, nous sommes devenus finalement un maillon essentiel de la chaîne de santé » constate Luca Pagano, titulaire d’une officine située dans le centre de Rome.
« En Italie, le salaire moyen d’un pharmacien est à 1 400 euros net et 1 600 euros net avec dix ans d’ancienneté, c’est trop peu par rapport à nos conditions de travail, les jeunes pharmaciens préfèrent opter pour le travail en entreprise ou l’enseignement » explique une pharmacienne. « Il faudrait rediscuter la convention collective et indexer les salaires à l’inflation pour enrayer le désamour des pharmaciens pour leur métier » réclame pour sa part Benedetta Mariani, coordinatrice régionale de la branche pharmaciens du syndicat Filcams-Cgil. Au problème des salaires, s’ajoutent les obstacles à l’avancement professionnel. « J’ai eu de la chance lorsque l’officine qui m’emploie a été rachetée par la chaîne thèque Dr Max, après avoir été nommé directeur à 28 ans, je peux devenir cadre dans le groupe, ce qui aurait été impossible si j’avais continué à travailler pour une pharmacie dirigée par un petit patron », confie le Dr Marco Galliani.
Selon l’Association nationale des pharmaciens non titulaires d’une officine (Conasfa), 3 pharmaciens sur 4, soit 74 % des personnes interrogées, seraient prêts à quitter l’officine et à travailler dans le public ou dans les entreprises pharmaceutiques.
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