L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) annonce son intention de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État contre une décision de la cour administrative d’appel (CAA) de Bordeaux. Celle-ci avait annulé l’interdiction prononcée par l'autorité sanitaire contre l’essai clinique illégal mené par le « fonds Joséfa » et les Prs Joyeux et Fourtillan.
La cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du tribunal administratif de Poitiers et les décisions de police sanitaire de l’ANSM interdisant l’essai clinique conduit illégalement par le « Fonds Joséfa » chez des patients atteints de Parkinson et d’Alzheimer, et suspendant l'utilisation des patchs concernés, qui contenaient deux molécules, la valentonine et le 6-méthoxy-harmalan (deux dérivés de la mélatonine).
Mais l’ANSM a annoncé qu'elle allait se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État. Elle demande également la suspension de la décision de la cour d'appel de Bordeaux afin de protéger les patients. Il s’agit en effet pour l’autorité sanitaire de « maintenir l’interdiction de réaliser illégalement des recherches sur la personne humaine et de suspendre l’utilisation de ces patchs ».
Certes, la cour d'appel de Bordeaux ne remet pas en cause l’action de l’ANSM. Cependant, elle fonde sa décision d’annulation sur des vices de procédure et sur le défaut de contradictoire. Selon elle, la situation d'urgence justifiant de passer outre le contradictoire n'était pas établie.
L’affaire avait fait grand bruit à l’automne 2019. Des patients atteints de la maladie de Parkinson et d'Alzheimer s’étaient vus proposer par l’association « Fonds Joséfa » de participer à un « essai clinique », dans une abbaye près de Poitiers. L’ANSM, saisie par des patients, avait établi la mise en œuvre d’un essai clinique non autorisé sur plus de 350 personnes vulnérables. De plus, la substance administrée sous forme de patch, présentée aux malades comme un médicament, n’avait fait l’objet d’aucune autorisation, ni d'aucune donnée sur sa qualité, sa sécurité et son efficacité.
L’autorité sanitaire avait donc prononcé deux interdictions en septembre 2019, l’une portant sur la recherche, l’autre sur le médicament. Mais le « Fonds Joséfa » n’en était pas resté là. Débouté par le tribunal administratif de Poitiers auprès duquel il avait déposé deux requêtes en annulation contre ces deux décisions, il avait ensuite interjeté appel de cette décision devant la cour d'appel de Bordeaux.
Il faut dire que le « Fonds Joséfa » avait à sa tête deux personnages pour le moins sulfureux, le Pr Jean-Bernard Fourtillan, pharmacien, et le Pr Henri Joyeux, médecin, tous deux connus pour leurs positions antivax. Ils n’avaient d’ailleurs pas hésité à assigner le directeur de l'inspection de l'ANSM, Bernard Celli, pour avoir déclaré : « Les personnes ont été abusées puisqu'on leur a fait croire que ces patchs soignaient leurs maladies (...) En outre, les substances qui étaient administrées ne sont pas connues. Donc, on est à la limite de pratiques charlatanesques. »
Ne démordant pas du caractère révolutionnaire du traitement, le Pr Joyeux avait annoncé sur le site du « Fonds Joséfa », l’arrivée des patchs en pharmacie courant 2020. L’ANSM avait par ailleurs mis en garde les patients contre ces molécules qui ne sont pas « sans risque pour la santé des participants ». Elle avait également demandé aux participants de « réaliser un bilan de santé et de conserver les patchs afin de permettre la réalisation éventuelle de futures analyses ».
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