SI 80 % DE LA POPULATION française se dit favorable à la vaccination (selon la dernière enquête de l’InVs qui remonte, certes, à 2011), un certain mouvement de défiance envers les vaccins est apparu dans l’Hexagone, et a pris de l’ampleur en 2009, lors du fiasco de la campagne de vaccination contre la grippe pandémique à virus A H1N1, qui aura convaincu au final seulement 7 % des Français. De plus, la polémique sur l’intérêt de la vaccination est ponctuellement alimentée par des affaires menées le plus souvent devant la justice. Avec, tout dernièrement, des parents qui passent en jugement pour avoir refusé de faire vacciner leur enfant contre le DTP, la seule vaccination encore obligatoire en France (voir encadré). Mais cette affaire, qui pourrait sembler anecdotique, n’est que la partie émergée de l’iceberg.
Il y a quelques années, c’était la vaccination (recommandée) contre l’hépatite B et le risque évoqué de sclérose en plaques qui agitait les foules, puis celle contre le papillomavirus, suspectée d’augmenter le risque de maladies auto-immunes. De même que la peur des adjuvants aluminiques, qui sont soupçonnés par certains d’induire des myofasciites à macrophages. Même si toutes les études réalisées sur ces vaccins ou adjuvants n’ont pas mis en évidence de surrisque dans la population vaccinée versus celle non vaccinée, même si les autorités sanitaires françaises et la majorité des experts insistent sur le fait que les vaccins sont sûrs et essentiels pour éviter des maladies et des décès, la méfiance ne cède pas pour autant. Elle est même un frein majeur pour certaines vaccinations.
Ainsi, moins de la moitié des adolescents sont aujourd’hui à jour de la vaccination contre l’hépatite B. Seulement environ un tiers des jeunes filles ont été complètement vaccinées contre le papillomavirus. Chez les plus de 65 ans, c’est la protection contre la grippe saisonnière qui est boudée, avec un taux de vaccination d’environ 50 %, soit nettement inférieur à l’objectif de 75 % (voir ci-dessous).
Heureusement, chez le nourrisson, la situation est plus satisfaisante, avec des couvertures vaccinales plutôt en progression ces dernières années (d’après les données publiées en avril 2013), pour la vaccination DTP, mais aussi celle de l’hépatite B ou du ROR, certaines dépassant les 90 %. En dépit de ces bons chiffres, l’exemple du couple Larère, qui refuse de faire vacciner leur fille de trois ans contre le DTP (voir encadré) est symptomatique de l’existence d’une défiance d’une partie de l’opinion vis-à-vis des vaccins – et notamment, dans ce cas précis, d’un vaccin obligatoire. Un mouvement jugé préoccupant par la ministre de la Santé. « Certaines personnes qui refusent par principe la vaccination au nom de la liberté. Mais la liberté s’arrête là ou commence la santé publique et la sécurité de l’ensemble de la population », souligne Marisol Touraine.
Une question à débattre.
Toutefois, ce cas particulier des Larère soulève aussi la question du maintien ou non de l’obligation vaccinale en France. Le Haut Conseil de santé publique (HCSP) estime qu’un « débat mérite d’être organisé par le gouvernement à ce sujet ». Parmi les pays industrialisés, seuls la France, l’Italie et quelques pays d’Europe de l’Est conservent des vaccinations obligatoires. « Malgré l’absence d’obligation dans la majorité des pays européens, les taux de couverture vaccinale y dépassent les 90 %, ce qui représente un bon niveau de protection », souligne le HCSP. Le Haut Conseil regrette aussi que le double régime de la vaccination en France - certaines obligatoires et d’autres recommandées - soit source d’incompréhension pour les Français : 53 % considèrent que les vaccins recommandés sont moins importants que les vaccins obligatoires, selon une enquête de l’INPES. Alors que des vaccins recommandés, comme celui contre l’hépatite B ou le cancer du col, offrent une protection contre des maladies qui font des centaines de morts chaque année : 1 300 morts par cirrhose et cancer du foie suite à une hépatite B, 1 000 décès par cancer du col de l’utérus, dont 80 % sont provoqués par un papillomavirus. Cependant, les autorités hésitent à supprimer la notion de vaccination obligatoire, de crainte de voir chuter le taux de couverture vaccinale, notamment de la vaccination DTP : « Dans l’hypothèse d’une suspension de l’obligation vaccinale contre le DTP, 23,3 % des Français s’interrogeraient sur le bien fondé d’administrer ces vaccins », rapporte l’enquête Nicolle. Si une telle mesure était décidée, elle devrait donc impérativement s’accompagner d’une communication appropriée auprès des médecins et du public, afin d’expliquer l’importance de la vaccination, et faire en sorte que les vaccinations recommandées ne soient pas perçues comme facultatives par la population.
Un pari risqué.
Surtout qu’un affaissement des vaccinations présenterait des risques non négligeables de voir réapparaître en France des maladies dont on se passerait bien. Un récent article publié dans la revue « Pediatrics » fait d’ailleurs écho d’une épidémie de rougeole qui a sévi dans une communauté sous-vaccinée du Minnesota, aux États-Unis. À partir d’un unique cas, 21 enfants ont contracté la maladie, dont 14 ont été hospitalisés. Et plus de 3 000 personnes - heureusement vaccinées - ont été exposées à la maladie. Autre exemple : la polio, qui a fait sa réapparition en 2013 en Syrie, pays dans lequel la couverture vaccinale a décliné fortement durant la guerre civile. S’il ne s’agit que d’exemples, ils montrent l’importance du maintien des vaccinations, avec des taux de couverture vaccinale suffisants pour atteindre une protection individuelle et communautaire. Ainsi, si la réflexion est légitime sur la révision du caractère obligatoire ou recommandé de la vaccination, celle-ci ne doit pas occulter les progrès remarquables que cette technique a permis dans l’histoire de l’infectiologie.
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