CELA fait dix jours qu’un pharmacien de Cholet ne peut plus vendre de médicaments. Les descentes de son officine ont été recouvertes de nappes en papier blanc. Seule l’activité de parapharmacie reste autorisée à cette officine réalisant un chiffre d’affaires de 2,6 millions d’euros. « J’ai déjà dû licencier l’un de mes huit salariés fin mars, et je ne sais combien de temps je pourrai encore tenir », déclare, désespéré, Alain Besseau, le titulaire interdit d’exercice. À 60 ans, ce confrère s’est vu radié le 28 mars dernier. En application de la procédure, l’Ordre des pharmaciens a suivi le verdict du tribunal administratif de Nantes qui a annulé, en février dernier, la licence du titulaire pour « abandon de clientèle ».
Les faits remontent à 2011. Alain Besseau, alors installé dans un centre commercial de Bonnevay, un quartier de 2 500 habitants réputé difficile, doute de la pérennité de ce complexe de commerçants et de la reconduction du bail par le groupe Auchan. Il demande son transfert à 700 mètres de là, au-delà du boulevard périphérique qui délimite le quartier. Cependant, le Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens lui rend un avis défavorable arguant d’un « abandon de clientèle ». « La licence avait été décernée dans les années 1980 pour desservir la population de ce quartier », rappelle Isabelle Nicolleau, présidente de l’Ordre des pharmaciens des Pays de la Loire. L’ARS propose à Alain Besseau de rechercher un autre local dans le quartier Bonnevay. Au bout de six mois, le titulaire ayant apporté les preuves qu’aucun local approprié n’est disponible, l’ARS lui décerne un avis favorable à son transfert. L’Ordre cependant dépose immédiatement un recours estimant que la nouvelle implantation d’Alain Besseau n’apporte aucun nouveau service rendu, mais surtout qu’elle empiète sur le périmètre d’une autre officine. La titulaire de cette dernière dépose également un recours. Colette Dault explique aujourd’hui sa décision par « un problème d’entreprises à sauver dans une ville de 56 000 habitants occupée par quinze pharmacies ». La titulaire de la pharmacie des Plantes avait été approchée par Alain Besseau dans la perspective d’un regroupement, mais sans succès.
Ce quartier a besoin d’une officine.
En ce début d’année, soit quarante mois après les deux recours, le tribunal administratif de Nantes rend son jugement. Il affirme qu’il y a eu abandon de clientèle et, par conséquent, non-application du code de la Santé publique. La licence est retirée à Alain Besseau. Il aura fallu plus de trois ans pour que celui-ci soit fixé sur son sort.
Le pharmacien qui a fait appel de cette décision, est désemparé. « Je vais devoir attendre à nouveau 18 à 24 mois pour obtenir un verdict », déclare-t-il, faisant allusion à l’encombrement de la juridiction nantaise par les recours contre l’aéroport de Notre-Dame des Landes. Alain Besseau sait qu’il ne pourra attendre ce délai pour se sortir de l’impasse. Il devra bientôt prendre des décisions douloureuses pour son entourage et ses salariés.
L’Ordre, soucieux de préserver le maillage du territoire, continue d’affirmer que « Bonnevay a besoin d’une officine ». « Nous disposions autrefois d’une bonne répartition. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une zone désertifiée. Ce transfert de l’officine a modifié le paysage, mais surtout les habitudes des habitants qui, désormais, répartissent leurs achats dans plusieurs pharmacies. Il s’agit de rétablir l’équilibre dans un souci de santé publique », juge Isabelle Nicolleau. Elle précise qu’Alain Besseau détient toujours une licence pour son ancien lieu d’implantation. Il peut en disposer à tout moment, à la seule condition d’exercer dans le quartier de Bonnevay.
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