Dans une décision rendue le 29 mars 2023, la Cour de cassation a reconnu le Laboratoire Biogaran responsable d’un manquement d’information sur la notice d’un produit, en l’occurrence l’amiodarone, dans le cas d'un décès par fibrose pulmonaire.
Les faits remontent à mars 2009. Un patient du Sud-Ouest se voit prescrire par son cardiologue de l’amiodarone Biogaran 200 mg pour une fibrillation auriculaire. Cinq mois plus tard, il consulte un pneumologue pour une hypoxie sévère. Une pneumopathie interstitielle diffuse « compatible à l’amiodarone », est diagnostiquée par le médecin. Le traitement est arrêté et le patient hospitalisé. Mais fin juin 2010, il décède d’une fibrose pulmonaire. Cet effet indésirable, inscrit depuis sur la notice d’utilisation du médicament, ne figurait pas à l’époque dans l’information aux patients. Il était en revanche connu du prescripteur, le cardiologue du patient, pour être mentionné au RCP (résumé des caractéristiques du produit).
Au cours de plusieurs années de procédure, les ayants droit du patient ont tout d’abord porté l’affaire devant le tribunal de grande instance de Nanterre. Dans un jugement rendu fin 2019, celui-ci a reconnu la responsabilité du laboratoire et l'a condamné à des réparations financières envers les ayants droit. Après avoir interjeté appel, le laboratoire a vu la décision confirmée par un arrêt de la cour d’appel de Versailles deux ans plus tard. S’étant pourvu en cassation, Biogaran vient à nouveau d’être reconnu responsable et condamné aux dépens.
La Cour de cassation a en effet conclu à la défectuosité de l’amiodarone, en raison de l’insuffisance d’informations dans la notice sur les risques et effets indésirables du médicament. Elle n’a pas retenu les arguments avancés par le laboratoire, dont deux concernaient la notice d’information aux patients. D’une part, objectait Biogaran, « le producteur d’un médicament n’a pas l’obligation de reproduire à l’identique dans la notice le contenu du RCP, mais doit rédiger cette notice de manière claire et compréhensible pour le patient, afin de lui permettre d’agir de manière appropriée en cas d’effets indésirables ». Une obligation dont le laboratoire estime s’être acquitté puisque la notice en vigueur en 2009 (mise à jour en 2003) portait la mention au titre des effets indésirables « troubles respiratoires, (essoufflement, fièvre, toux…) ». Elle précisait même « en cas d’apparition d’essoufflements inhabituels, d’une toux, d’une fatigue ou d’une fièvre prolongés ou inexpliqués, (…) prévenez votre médecin traitant ». Aussi, Biogaran a estimé que ces éléments traduisaient, en langage courant, le risque de manifestations pulmonaires comme la fibrose pulmonaire. D’autre part, l’industriel a réfuté l’argument du juge qui avait caractérisé le défaut de l’amiodarone, en 2009, au motif que la mise à jour de la notice en 2015, avait notifié des problèmes respiratoires comme « pouvant être graves ».
Enfin, Biogaran avait contesté la seule mise en cause de son produit alors que le patient s’était vu par la suite administrer de la Flécaïne (flécaïnide) lors de son hospitalisation.
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