Médecins, pharmaciens, infirmiers, sages-femmes, kinésithérapeutes, dentistes : chacune de ces professions a un rôle à jouer dans la prévention des cancers. Les pharmaciens, qui démontrent une bonne connaissance des facteurs de risque, abordent pourtant moins souvent le sujet avec leurs patients, à l’exception notable de l’exposition aux ultraviolets (UV). En revanche, ils ciblent leurs recommandations et n’hésitent pas à évoquer le tabagisme (73 %), la pratique d’une activité physique régulière (52 %) ou l’alimentation (59 %) aux patients qu’ils jugent à risque. Les officinaux se révèlent d’ailleurs beaucoup plus prescripteurs de substituts nicotiniques que les autres professions (à l’exception du médecin), alors même que leur délivrance sans ordonnance ne permet toujours pas aux patients de bénéficier d’un remboursement par l’assurance-maladie.
Selon l’étude menée par BVA pour l’INCa de novembre 2020 à janvier 2021 auprès de 900 professionnels de santé libéraux de moins de 55 ans, les pharmaciens (et les kinésithérapeutes) se sentent investis d’un rôle moins important que les autres soignants dans le dépistage des cancers. « Attention ! Il faut tenir compte de la date de l’enquête », souligne Sarah Derhy, cheffe de projets au département prévention de l’INCa. En effet, le rôle du pharmacien a été renforcé en la matière par le biais de la dernière convention pharmaceutique, signée en mars 2022. Néanmoins, avant même cette nouvelle convention, les pharmaciens se sentaient déjà investis d’un rôle de prévention dans le dépistage des papillomavirus humains (HPV) et quant à l’exposition aux UV. En revanche, ils ne se sentent pas à l’aise pour évoquer la consommation excessive d’alcool, « mais il s’agit du facteur de risque le plus difficile à aborder, qui plus est en dehors d’un espace de confidentialité », note Sarah Derhy.
Freins et leviers
Le format de l’échange avec le patient, hors consultation, est l’un des freins le plus souvent mis en avant par les pharmaciens quant à leur engagement dans la prévention des cancers, juste après le déni des patients. Parce qu’ils se sentent moins légitimes que d’autres, les confrères craignent d’altérer les relations avec leurs patients en abordant certains sujets. Quant aux sources d’information pour être à jour sur la prévention des cancers, les pharmaciens se distinguent là encore des autres soignants en se tournant assez peu vers les sites institutionnels mais en privilégiant nettement la presse professionnelle.
Pour développer leur pratique, ils donnent la priorité à une rémunération spécifique pour les missions de prévention (46 %), une revendication que l’on retrouve chez tous les soignants, médecins (61 %), sages-femmes (56 %) et dentistes (54 %) en tête. Ils appellent aussi à des campagnes de communication grand public (37 %), à un travail davantage en équipe pluriprofessionnelle (31 %) et à des rappels automatiques intégrés aux dossiers des patients (24 %), mais sont assez peu friands des brochures à remettre à leur patientèle.
* D’après un atelier animé par l’INCa lors de la Journée nationale des URPS pharmaciens, le 13 avril dernier.
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