L'assurance-maladie a envoyé le 25 octobre un mail détaillant la procédure à suivre concernant le contrôle des ordonnances pour les médicaments chers (plus de 300 euros TTC). Un document « incompréhensible » selon l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO) qui a reçu plusieurs signalements de pharmaciens perplexes sur la mise en œuvre de cette mesure.
Mesure prévue dans la dernière mouture de la convention pharmaceutique, la lutte contre la fraude sur les médicaments chers, en particulier les anticancéreux et les traitements contre l'hépatite C, est une priorité pour l'assurance-maladie. Un mail, transmis aux officinaux en début de semaine, résume la marche à suivre pour repérer et signaler les ordonnances falsifiées, qui proviennent de l'hôpital pour la majorité d'entre elles. Problème, ce document manque semble-t-il de clarté aux yeux de nombreux pharmaciens selon les impressions recueillies par l'USPO. « La fiche envoyée par l'assurance-maladie est incompréhensible », observe le président du syndicat, Pierre-Olivier Variot. Selon lui, l'assurance-maladie a agi dans la précipitation. « Le document a été diffusé le 25 octobre pour une application le 24. Nous allons préparer une nouvelle fiche pour résumer de manière plus lisible la procédure à suivre », promet-il.
Selon un sondage mené par l'USPO cette semaine, 77 % des pharmaciens affirment qu'ils ne dispenseront désormais un médicament cher que s'ils connaissent le patient. Si le fait de connaître le patient, ou le prescripteur, dispense le pharmacien de tout contrôle, l'assurance-maladie stipule également « qu'en l’absence d’information permettant de confirmer l’authenticité de l’ordonnance, (...) le pharmacien peut délivrer le conditionnement minimal associé au traitement et continuer (ses) vérifications (notamment vis-à-vis du prescripteur libéral), dans le laps de temps entre la délivrance initiale et son renouvellement ».
Cependant, Pour Pierre-Olivier Variot, il n'existe pas seulement un problème sur la forme, il y en a également un sur le fond. « La CNAM fait peser la lutte contre la fraude sur la seule pharmacie et cela, ce n'est pas bien », critique-t-il. Certaines idées soumises par l'USPO (obliger le patient à utiliser sa carte vitale, possibilité d'appeler le pharmacien conseil en cas de doute) n'ont pas été retenues, ou seulement dans le cadre d'une expérimentation en Île-de-France pour la seconde. « Des patients, par exemple s'ils ont besoin d'un médicament et sont loin de chez eux, risquent de se le voir refuser parce que la pharmacie ne voudra pas prendre de risque. Les associations de patients ne vont pas être satisfaites non plus. » Pierre-Olivier Variot et son syndicat vont faire parvenir des courriers aux directeurs des caisses primaires d'assurance-maladie pour les prévenir de ces difficultés. Il y a grand intérêt à simplifier le système selon lui, car la e-prescription (qui devrait permettre de prévenir tout risque d'ordonnances falsifiées), ce n'est pas pour tout de suite. « La e-prescription va permettre de sécuriser les ordonnances mais on ne l'aura pas avant 2024 en ville et à cette date il y a un grand risque que les hôpitaux ne soient pas encore prêts… », prévient Pierre-Olivier Variot. En attendant, les réseaux à l'origine des trafics sont de plus en plus professionnels et produisent des ordonnances toujours plus réalistes et difficiles à repérer pour les pharmaciens.
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