Les cas de suicides au paracétamol ont doublé chez les mineurs depuis 2019. L’agence du médicament a discuté de l’interdiction de la dispensation sans ordonnance de la molécule pour les moins de 18 ans. Compte-rendu.
Selon le « coup de sonde » réalisé par le centre antipoison de Nancy (Meurthe-et-Moselle), le nombre de cas d’intoxications volontaires par ingestion de paracétamol dans un contexte suicidaire chez les moins de 18 ans a doublé entre 2019 et 2022, avec des chiffres qui restent stables en 2023. La majorité des cas concernent les 10-15 ans. Les chiffres impliquant l’acide acétylsalicylique et l’ibuprofène dans les suicides chez les enfants sont moins préoccupants car en baisse ou moins élevés, sans précision sur les chiffres.
Inquiète, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a interrogé, en mars dernier, son Comité scientifique permanent « Interface avec le réseau de toxicovigilance » sur l’impact d’une interdiction de la délivrance sans prescription du paracétamol chez les mineurs sur les intoxications volontaires, voire une interdiction ciblée pour les 10-15 ans. « Les médicaments utilisés dans la grande majorité des intoxications volontaires chez les mineurs sont ceux présents dans la pharmacie familiale », répond le Comité, selon le compte-rendu de la réunion. De plus, une telle interdiction ne réduirait « sans doute pas » le nombre de suicides car, en 2020, les cas d’intoxications volontaires avec le paracétamol avaient augmenté malgré les restrictions de délivrance à une ou deux boîtes par patient pour faire face aux tensions d’approvisionnement en pleine pandémie de Covid-19. Sans compter que « cette restriction pourrait amener à l’utilisation de produits encore plus dangereux », souligne encore le Comité.
Autres raisons qui ne justifient pas une interdiction de la vente libre de paracétamol aux mineurs, selon le comité : la difficulté pour le pharmacien d’identifier l’âge des mineurs, l’absence de dose d’exonération définissant le nombre maximal de boîtes de paracétamol pouvant être délivrées sans ordonnance, et l’existence d’un antidote pour le paracétamol.
« En conclusion, il revient au pharmacien d’officine de maîtriser au mieux la délivrance de ces spécialités, note le comité scientifique. Un message éducatif à l’attention des parents apparaît comme une première étape avant une éventuelle restriction de la délivrance aux mineurs. »
Dans les années 1980, l’agence du médicament avait déjà limité le conditionnement des spécialités à base de paracétamol à 8 grammes par boîte pour ne pas dépasser la dose potentiellement mortelle.
En 2022, l’assurance-maladie avait publié un article pour assurer « la sécurisation de la dispensation de paracétamol » et divers outils pratiques pour les officinaux et les patients.
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