Combien les Jeux olympiques ont-ils coûté aux pharmaciens ? Cher, si l’on en croit les premiers chiffres (à consolider) remontés par plusieurs pharmaciens parisiens. La profession s’organise pour demander des aides compensatrices aux autorités. Explications.
L’enthousiasme soulevé par les JO de Paris 2024 ne se retrouve pas dans les premiers chiffres remontés par plusieurs pharmaciens à leur URPS d’Île-de-France au lendemain de la fête olympique : -15 % de chiffre d’affaires en juillet 2024 par rapport à juillet 2023 en Seine-Saint-Denis, -23 % dans le 4e arrondissement de Paris, -40 % dans le 6e, -50 % dans le 8e… indique Maud Mingeau, vice-présidente de l’URPS pharmaciens d’Île-de-France. Les données relevées par le Gers-Data sur la première semaine des Jeux olympiques et la semaine précédente vont dans le même sens. « Ça n’a pas été une bonne période pour l’officine parisienne : les Parisiens ont quitté Paris et les Franciliens sont restés en télétravail. Les touristes habituels ont été absents avant et pendant les JO. Donc dans le centre de Paris, c’est une moyenne de -50 %. Seules quelques officines à proximité des sites des JO ont pu tirer leur épingle du jeu », rapporte Yorick Berger, titulaire dans le 13e arrondissent et responsable des relations avec la chaîne du médicament à la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
« Les Jeux olympiques sont une très grosse déception pour toutes les officines », résume René Maarek, président UPRP-USPO (Union des syndicats de pharmaciens d’officine) d'Île-de-France et de Paris, qui lui-même enregistre une perte de CA de 57 % dans son officine du quartier de Bastille dans le 4e arrondissement. Il cite aussi l’exemple d’une officine du 16e arrondissement qui constate une perte de CA de 80 %. Sans compter les stocks immobilisés revus à la hausse pour éviter les problèmes d’approvisionnement et le surcoût de charges de personnels venus en renfort. « Certains titulaires ont même recruté des pharmaciens ou des préparateurs bilingues pour l’occasion », déplore René Maarek. Les pharmaciens parisiens s’étaient préparés mais « ça ne s’est pas passé comme on l’espérait », ajoute le président UPRP-USPO. Barrières, stations de métro fermées, bus déviés, population passive, « exode » sont autant de raisons relevées par l’URPS pharmaciens Île-de-France, après le retour des premiers questionnaires adressés aux officines de la région.
« Les pharmacies qui ne sont pas intra-muros n’ont pas autant souffert, constate à chaud René Maarek. Car le gros problème, c’est que les Parisiens ont fui Paris et on a perdu nos ordonnances. On s’est rattrapé sur l’OTC et la parapharmacie, mais cela n’a pas compensé la perte des ordonnances. Les autres années, on constate une baisse sur 10 à 15 jours, mais cette année, c’est plus long. Les Parisiens sont partis plus tôt, bien avant le début des JO ! ».
C’est pourquoi la profession réfléchit à une demande d’aides pour compenser les pertes.
« Le sinistre est en cours »
« C’est une démarche en deux étapes, décrit René Maarek. Nous comptons d’abord demander une aide d’urgence car certains pharmaciens n’ont pas la trésorerie pour faire face maintenant, puis une aide définitive avec des arguments comptables. » Mais pour cela, il faut attendre les chiffres complets et définitifs. « L’idée c’est de ne pas se précipiter, il faut prendre le temps de construire le dossier pour mettre toutes les chances de notre côté, poursuit René Maarek. Et l’histoire n’est pas finie ! Il y a aussi les Jeux paralympiques. » « Ça ne peut pas être pire, raille Maud Mingeau, sauf pour la logistique. Ce qui a œuvré pour que tout soit fluide, c’est le fait que tout le monde était parti. Ce sera un peu plus compliqué à la rentrée avec les Jeux paralympiques. »
Schématiquement, « c’est un peu comme une fuite d’eau ! Le sinistre est en cours, on prévient d’abord l’assurance pour signaler qu’il se passe quelque chose, puis on chiffre les dégâts quand tout est fini », explique René Maarek, qui présente un plan d’action : prévenir les autorités en demandant tout d’abord une aide auprès de l’Agence régionale de santé (ARS) puis, dans un second temps, pourquoi pas à la Mairie de Paris, à l’instar des restaurateurs et des commerçants de la ville. « On va essayer d’aller chercher des fonds partout, mais c’est pour récupérer nos pertes », complète le président UPRP-USPO, qui propose une demande d’aide individuelle plutôt que collective, « pour éviter d’autres inégalités. »
URPS et UPRP construisent ensemble la démarche. Les pharmaciens devraient rapidement recevoir un questionnaire pour lister leurs pertes en détail. « On va faire en sorte que les pharmaciens s’en sortent bien et de le faire de manière collégiale », conclut René Maarek.
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