Mesure prise sans consultation des pharmaciens, l’obligation de prescription médicale pour la codéine continue de susciter l’incompréhension de la profession. L’union des pharmaciens de la région parisienne tient à en informer Agnès Buzyn, ministre de la Santé par courrier en lui demandant d'être reçue.
C’est pour lui la contradiction la plus totale. Et René Maarek, président de l’Union des pharmaciens de la région parisienne, n’en revient toujours pas. « D’un côté, la nouvelle convention pharmaceutique nous promet un rôle d’acteur de santé avec des missions de santé publique, et d’un autre côté, on nous prive simultanément de ce rôle par une décision précipitée, prise sans consultation préalable des pharmaciens », expose le titulaire.
René Maarek ne remet pas en cause le fondement de cette décision motivée par le mésusage. Également président de Pharmaddict, il ne connaît qu'assez les détournements de ces produits. Pour autant, la décision de la ministre ne lui apparaît pas être « un bon signe ».
Et ce, à deux titres, note René Maarek. L’arrêt immédiat de la vente sans ordonnance des produits à base de codéine, d’éthylmorphine, de dextrométhorphane ou de noscapine prive tout d’abord le pharmacien d’une plus-value de taille. « En supprimant les seuls médicaments conseils pour la douleur et la toux sèche, que nous reste-t-il à conseiller à nos patients ? De même, que faire lorsqu’ils viendront nous trouver en pleine nuit avec une rage de dents ? », s’interroge le président de l’UPRP. Il ne manque pas de relever par exemple que le mésusage est minoritaire par rapport au bénéfice et à l'utilité du Prontalgine, pour une écrasante majorité de patients, en cas de douleur. En revanche, souligne-t-il, « le Phenergan, non concerné par la mesure ministérielle, est l’un des ingrédients essentiels des mixtures».
Cependant, la perte du rôle de conseil du pharmacien n’est pas la seule conséquence en termes de santé publique de l'obligation de prescription de la codéine. « Avec cette annonce, les jeunes qui détournaient ces produits ne vont plus se rendre à la pharmacie. Ce sera donc toute une population avec laquelle nous pouvions communiquer et à laquelle nous délivrions des messages pédagogiques qui va nous échapper », déplore le pharmacien qui compare la situation avec celle des tests de grossesse, vecteurs de communication avec les patients sur la sexualité et la prévention.
Sans parler également des conséquences économiques de cet arrêté ministériel alors que les pharmaciens viennent de se réapprovisionner en prévision de la période hivernale. Sur le seul volet économique, la perte se chiffre, selon les estimations de l’UPRP, entre 20 000 et 30 000 euros par pharmacie.
Estimant que le ministère n’a pas perçu l’ampleur des conséquences de sa décision, le président de l’UPRP s’apprête à adresser un courrier à Agnès Buzyn, ministre de la Santé en formulant le souhait de la rencontrer pour lui exposer ces divers aspects du dossier de la codéine.
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