Le Sénat a adopté un article visant à supprimer l'aide médicale d’État (AME), réservée aux sans-papiers, dans le cadre de l'examen du projet de loi immigration. Alors que le texte doit maintenant être débattu à l'Assemblée nationale, le vote des sénateurs a été violemment critiqué par le ministre de la Santé et par la ministre déléguée aux Professions de santé.
À une large majorité, 200 voix pour et 136 contre, le Sénat a voté pour la suppression de l'AME dans sa forme actuelle. Ce dispositif, en place depuis plus de vingt ans, offre une couverture intégrale des frais médicaux et hospitaliers aux étrangers en situation irrégulière présents en France depuis au moins trois mois. Selon l'article adopté par les sénateurs, l'idée est d'introduire à la place une aide médicale d'urgence (AMU), recentrée sur la prise en charge « des maladies graves et des douleurs aiguës », ainsi que de la prophylaxie, réduisant le panier de soins actuellement accordé à quelque 400 000 bénéficiaires. La mesure doit également permettre la prise en charge des soins liés à la grossesse, les vaccinations et les examens de médecine préventive.
Cette remise en cause de l'AME, réclamée de longue date par la droite et appuyée par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, est fortement critiquée, y compris au sein du gouvernement. La veille du vote, des étudiants en santé ont manifesté devant le palais du Luxembourg pour rappeler la nécessité de conserver l'AME en l'état. Quelques jours plus tôt, plus de 3 000 soignants avaient signé une tribune dans le journal « Le Monde » pour rappeler les conséquences désastreuses que pourrait entraîner une suppression de l'AME.
À la suite du vote, le mardi 7 novembre, le ministre de la Santé ne s'est pas privé de dire tout le mal qu'il pensait du projet soutenu par les sénateurs. Sur le plateau de l'émission « Quotidien », Aurélien Rousseau l'a qualifié de « profonde erreur » et même de « faute ». De son côté, la ministre déléguée aux Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, a tenu à préciser que le gouvernement était très « très attaché à l'AME ». Pour l'officinale de formation, « mélanger les débats sur l'AME et le contrôle de l'immigration est un non-sens. (...) L'AME n'est pas un facteur d'attractivité pour les candidats à l'immigration dans notre pays », a-t-elle ajouté, ouvrant la voie à une annulation de la mesure par l'Assemblée nationale, qui se penchera à son tour sur le texte à partir du 11 décembre. Si la suppression de l'aide médicale d'urgence n'était pas retoquée au palais Bourbon, elle entraînerait « de vrais risques pour notre système de soins. Il est préférable de prendre en charge une maladie bénigne, avant qu'elle ne se transforme en pathologie grave, ou avant qu'elle ne se propage », insiste Agnès Firmin Le Bodo, précisant néanmoins que l'exécutif est prêt à débattre sur de potentielles évolutions de l'AME.
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