Les pharmaciens et l’assurance-maladie sont d’accord sur un point : il faut lutter contre ces fraudes. En revanche, difficile pour les deux parties de se mettre d’accord sur les méthodes à employer. « Nous réclamons depuis longtemps la généralisation de l’ordonnance numérique opposable et notamment son déploiement dans le milieu hospitalier, explique Valérian Ponsinet, président de la commission Convention et système d'information de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Or, depuis la signature de la dernière convention pharmaceutique, en mars 2022, la politique de l’assurance-maladie consiste à venir récupérer les sous au niveau du pharmacien, sous la forme d’indus, au lieu de s’attaquer au problème à la source. Elle nous explique en effet qu’accélérer le déploiement de l’ordonnance numérique n’est pas dans son champ d’action. Elle ne peut contraindre les prescripteurs, notamment hospitaliers, à l’utiliser davantage… », déplore-t-il. « Lutter contre les fraudes, les pharmaciens sont évidemment pour, ajoute Guillaume Racle, conseiller économie et offre de santé pour l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Le problème c’est que l’assurance-maladie nous impose pour cela des outils beaucoup trop complexes et chronophages », résume-t-il.
Les syndicats regrettent notamment la trop grande complexité du système de déclaration des fausses ordonnances pour les médicaments chers (plus de 300 euros). Un système qui est, de plus, difficile à mettre en œuvre dans la pratique. « On semble parfois oublier que le pharmacien doit réaliser ce travail… avec le patient en face de lui. Parfois, l’officinal peut être confronté à des individus agressifs ou qui ne parlent pas français. Des personnes influençables qui sont parfois envoyées en pharmacie par des bandes organisées. Ce sont des situations très stressantes pour les équipes », veut rappeler le représentant de la FSPF.
Lors de la réunion tenue ce mercredi, la CNAM a exposé une nouvelle idée. Généraliser, peut-être dès le printemps, le dispositif ASAFO, une solution d’alerte aux fausses ordonnances en ligne uniquement accessible en Île-de-France jusqu’à maintenant. Pour encourager les pharmaciens à utiliser cet outil, les têtes pensantes de la CNAM ont évoqué la possibilité d’une ROSP à l’usage. Une idée qui a fait l’unanimité contre elle du côté des syndicats. Si ce projet n’est pas encore sûr d’aboutir, il illustre en tout cas le fossé qui existe entre les solutions envisagées par les décideurs et la réalité du terrain. « La cellule fraudes de la CNAM est fermement décidée à avancer sur le sujet de la lutte contre les fraudes. Le problème c’est qu’elle ne se préoccupe pas de vérifier si leurs outils sont compatibles avec ce dont les pharmaciens ont besoin sur le plan pratico-pratique », résume Guillaume Racle. « Pour l’instant, nous ne parvenons pas à utiliser les bonnes solutions contre un problème qui, lui, est pourtant bien défini », conclut Valérian Ponsinet.
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