La xylazine, un sédatif pour animaux, n'est pas autorisée pour un usage humain par l'agence américaine des médicaments (FDA), mais elle a pénétré le marché américain des drogues illégales. À tel point que la Maison Blanche a récemment qualifié le « tranq » (autre nom de la xylazine) de « menace émergente ».
Facilement accessible sur le Web, la xylazine est très souvent couplée au fentanyl, l'opioïde de synthèse 50 fois plus puissant que l'héroïne, qui a fait grimper en flèche le nombre d'overdoses mortelles dans le pays, à près de 110 000 en 2022, un record. Selon des données des Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC), l'estimation du nombre d'overdoses mortelles dans lesquelles la xylazine est impliquée a été multipliée par 15 en 3 ans (de 260 en 2018 à 3 480 en 2021). Si Philadelphie fait figure d'épicentre de la « tranq », New York n'est pas épargnée : 19 % des overdoses aux opioïdes, soit 419 décès, impliquaient aussi de la xylazine en 2021, selon la ville.
Pourquoi la xylazine est-elle associée au fentanyl par les toxicomanes ? « L'hypothèse est qu'elle a été ajoutée pour prolonger la durée de vie du fentanyl. Mais les effets secondaires sont très importants », explique Jazmyna Fanini, une infirmière de St. Ann's Corner of Harm Reduction, une association d'aide et d'échange de seringues ouverte depuis 1990 dans l'arrondissement du Bronx. Car l'effet du fentanyl est de courte durée et des symptômes d'anxiété très poussés sont associés au manque. Outre le caractère addictif de cette nouvelle drogue, les effets nécrosants du « tranq » sont terribles.
Des blessures, les soignants de St Ann's Corner of Harm Reduction en voient de plus en plus souvent quand ils sortent avec leur camionnette dans les rues du Bronx. « Les gens disent qu'elles apparaissent comme de petits bleus ou des marques noires, puis c'est comme si les tissus mouraient dans la zone concernée », explique l'infirmière de St Ann's. Pour elle, il y a encore beaucoup d'inconnues autour de ces nécroses. « Les blessures peuvent s'aggraver, jusqu'à l'os (...) Parfois, les gens ont besoin d'une amputation ou d'une greffe de peau », ajoute-t-elle.
À New York, les services municipaux et les associations mettent le paquet sur la naloxone, un spray nasal qui sert d'antidote en cas d'overdose au fentanyl. Mais en ralentissant la respiration et le rythme cardiaque, la xylazine ne facilite pas la situation. Autorisé pour les animaux, le produit n'a pas le statut de « substance contrôlée » au niveau fédéral, comme le sont les drogues dures, ce qui complique la tâche des enquêteurs, selon la procureure spéciale chargée des stupéfiants à New York, Bridget Brennan. « Nous pouvons garder un œil dessus. Mais même si nous en trouvions une grande quantité, nous ne pourrions pas poursuivre quelqu'un pour cela » et donc « pas remonter à la source », explique-t-elle.
Avec l'AFP
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