Longtemps le syndrome tumoral et son évaluation (classification TNM, imagerie, analyse moléculaire de la tumeur) ont focalisé l’attention en vue de proposer une réponse antitumorale adaptée (médicaments, chirurgie, rayons). Cela change.
Des publications récentes attirent l’attention sur la fonte musculaire. Ce 2e syndrome lié à la dénutrition progressive et à la diminution de l’activité physique est aussi préoccupant que le syndrome tumoral. Il entraîne une fatigue croissante et peut provoquer le décès par épuisement, en dehors de toute défaillance d’organe vital.
Car le décès par cancer peut résulter de deux mécanismes indépendants, concomitants ou concurrents : la décompensation d’un organe vital (dû au syndrome tumoral) et l’épuisement (dû à la cachexie). « Le patient atteint de cancer peut être menacé par l’un, l’autre ou les deux. Se polariser sur le syndrome tumoral revient à ignorer la moitié des problèmes. Contrôler la prolifération des cellules malignes pour éviter la décompensation d’un organe vital n’est donc pas une réponse suffisante. Les traitements cytotoxiques sont des poisons. N’en abusons pas», précise le Pr Goldwasser.
Une arme anticancer
Les cellules tumorales et musculaires sont en concurrence pour l’énergie. « Si l’on fait un PETscan à jeun à un patient atteint de cancer qui a couru avant l’examen, ses muscles des membres inférieurs fixeront le sucre radioactif, au dépend de sa tumeur et de ses métastases ! C’est la preuve que l’activité musculaire détourne dans la vraie vie le métabolisme cellulaire du glucose des cellules cancéreuses vers les myocytes et constitue à ce titre une arme anti-cancer ! », explique avec enthousiasme le Pr Goldwasser.
La fonte musculaire réduit la concurrence pour l’énergie. Elle facilite ainsi le développement des cellules cancéreuses (à tumeur du sein identique et de même stade, la survie liée au cancer est plus faible en cas de sarcopénie). Réciproquement le travail musculaire pénalise la prolifération des cellules cancéreuses.
La sarcopénie est un élément pronostic transversal dans les cancers (lymphomes, cancer du sein, cancers digestifs…), un facteur de fragilité influençant la décision thérapeutique mais aussi une cible thérapeutique (si la condition le permet, une activité physique intense peut l’éviter).
Évaluer et combattre la sarcopénie
« L’évaluation de la fonte musculaire est aujourd’hui essentiellement clinique. Elle repose sur une attention à la fatigue, à son retentissement sur la vie quotidienne, à la variation de poids et de l’IMC et à la mesure par dynamomètre de la force musculaire », rappelle le Pr Goldwasser. La masse musculaire peut être évaluée de façon plus fine et sensible sur une coupe scanographique axiale passant par la 3e vertèbre lombaire (surface des psoas et muscles pariétaux rapportée à la taille au carré du patient avec abaques selon le sexe). Cette mesure de la masse musculaire totale était jusqu’ici chronophage et réservée à la recherche clinique. Elle devrait devenir reproductible, précise et accessible en routine grâce à l’arrivée de logiciels de mesure automatique courant 2018.
Les études se multiplient. Soumise à l’ASCO 2017, l’étude SCAN sur 700 patients atteints de cancer a montré par la mesure de la masse musculaire totale au scanner que 3/2 d’entre eux ont une sarcopénie sous diagnostiquée et insuffisamment prise en compte (kinésithérapie, activité physique). « Dans le service, deux études cliniques évaluent l’impact de l’activité physique (sur la survie dans le cancer du poumon métastatique et sur le risque de rechute après traitement adjuvant). Une 3e étude est prévue chez des non répondeurs à l’immunothérapie, pour réévaluer la réponse après avoir réduit la sarcopénie par un programme diététique et d’activité physique. D’autres pistes sont à explorer, par exemple une séance de vélo d’appartement juste avant d’administrer la chimiothérapie », précise le Pr Goldwasser.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques