DE QUOI DÉPEND LE VIEILLISSEMENT des êtres humains ? « En partie de leur environnement extérieur, mais aussi en grande partie du système hormonal », explique le Pr Étienne Émile Baulieu qui a consacré sa vie de chercheur aux hormones stéroïdes. L’éminent médecin endocrinologue présentait à l’occasion de la troisième journée nationale de formation de l’UTIP, deux voies de recherches originales qui ouvrent la porte à de futures applications thérapeutiques.
Nous connaissons les hormones stéroïdes, molécules synthétisées par les glandes surrénales (qui secrètent les corticostéroïdes) et les gonades (qui sécrètent les hormones sexuelles, progestérone pour les femmes, testostérone pour les hommes). Le fait marquant est que des stéroïdes existent dans le cerveau indépendamment de ceux synthétisés par les organes périphériques. Ils sont synthétisés dans le système nerveux central à partir du cholestérol, en quantité relativement faible. Parmi les principaux neurostéroïdes, on retiendra la prégnénolone (PREG), la progestérone (PROG) et leurs dérivés.
Les neurostéroïdes sont dotés d’une pléiade d’effets, a rappelé l’endocrinologue : sur la mémoire, l’anxiété, la réponse au stress, la dépression et aussi sur le sommeil et la douleur.
Quant à la relation entre neurostéroïdes et mémoire, elle a été particulièrement étudiée chez le rongeur où l’on distingue deux effets. Un effet promnésiant, car certains neurostéroïdes sont capables d’induire une amélioration spontanée des performances mnésiques. Et un effet anti-amnésiant, qui implique la restauration de déficits mnésiques induits par des agents extérieurs, par le vieillissement ou encore par des peptides ß-amyloïdes.
Les bons résultats du sulfate de prégnénolone.
À côté de leurs effets sur la mémoire, les neurostéroïdes sont capables de protéger les neurones, particulièrement ceux de l’hippocampe, structure clé de la mémoire. Ces effets neuroprotecteurs s’observent également contre les assauts de la protéine ß-amyloïde ; cette protéine qui s’accumule anormalement dans le cerveau et conduit à la neurodégénérescence.
Mais administrer directement de la prégnénolone s’avère impossible du fait de son caractère précurseur d’autres hormones, explique Étienne Émile Baulieu. Les chercheurs (équipe d’Yvette Akwa, INSERM 788) ont toutefois obtenu des résultats probants avec le sulfate de prégnénolone. Et récemment, mieux encore, un énantiomère de cette molécule qui s’est révélé plus actif et plus stable que le produit naturel. Une promesse pour la pilule de la mémoire ? Le chercheur ne cache pas son enthousiasme. Ces résultats, obtenus sur le rongeur, ont encouragé le lancement d’études rigoureuses chez l’homme afin d’envisager l’administration par voie générale d’une telle molécule.
Traiter demain les traumatismes médullaires.
Mais la prégnénolone possède d’autres atouts à valoriser, puisqu’on la retrouve sur le front des microtubules qui, dans le système nerveux, transfèrent les ingrédients nutritifs nécessaires au développement des neurones. PREG, en se liant avec des récepteurs particuliers aux microtubules, les MAP2 (Microtubules Associated Protéine de type 2), induit la polymérisation de la tubuline en microtubules. Une fois adulte, les neurones sont sujets à des variations morphologiques pour former des synapses avec d’autres neurones. Construire des synapses ou des dendrites nécessite la fabrication d’extensions cytoplasmiques et requiert un apport de nouveaux matériaux, assuré par les microtubules. Ainsi donc, en se liant au MAP2, la prégnénolone stimule la synthèse neuronale. Les chercheurs de la start-up MAPREG, ont sélectionné une molécule de synthèse (MAP4343), mimant les effets de la prégnénolone, sans interagir avec le métabolisme des hormones stéroïdiennes. Premier terrain d’études : la paralysie consécutive au traumatisme de la moelle épinière. Sur des modèles animaux, cette molécule favorise la réparation du mécanisme des microtubules. Et puisqu’elle passe la barrière hématoencéphalique, tous les espoirs sont permis pour son action thérapeutique dans les traumatismes cérébraux, les accidents vasculaires cérébraux ou encore la maladie d’Alzheimer. Un espoir encouragé par l’obtention récente pour cette molécule de synthèse, du statut de médicament orphelin du traumatisme de la moelle épinière par l’EMEA (European Medecin Agency) et là aussi, la poursuite de l’odyssée chez l’homme.
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