« Le principal objectif de notre étude était de prouver que des cellules souches productrices d’ovocytes existent vraiment dans les ovaires des femmes en âge de procréer, ce qui, selon nous, est démontré très clairement dans cette étude », souligne le Pr Jonathan Tilly (Massachusetts General Hospital, Boston) qui a dirigé ce travail publié dans « Nature Medicine ».
« La découverte de cellules précurseurs d’ovocytes dans les ovaires des femmes, et le fait que ces cellules partagent les mêmes caractéristiques que les cellules équivalentes de la souris qui produisent des ovocytes totalement fonctionnels, ouvrent la voie au développement de technologies sans précédent pour surmonter la stérilité chez les femmes et peut-être retarder le moment de l’insuffisance ovarienne. »
En 2004, une étude chez la souris (Johnson, Tilly et coll., « Nature ») remettait en question le dogme, enraciné depuis les années 1950, selon lequel l’ovogenèse s’arrête avant la naissance chez les femelles mammifères, et donc la réserve des follicules contenant les ovocytes est définitivement fixée à la naissance et ne pourra que s’épuiser progressivement avec l’âge.
Au début, septicisme et résistance.
Bien que ce changement majeur de paradigme fut d’abord accueilli avec scepticisme et résistance, d’autres études indépendantes ont confirmé depuis que des cellules souches germinales peuvent être isolées dans les ovaires de souris adultes. Ces cellules peuvent proliférer in vitro pendant des mois ; après transplantation dans les ovaires de souris traitées par chimiothérapie, elles se différencient en ovocytes matures qui sont « ovulés », fécondés et produisent des souriceaux vivants.
Il restait toutefois à démontrer que des cellules souches productrices d’ovocytes peuvent également être isolées chez les femmes adultes.
Dans un premier pas vers cet objectif, l’équipe de Tilly et coll. a d’abord développé une approche plus fine pour isoler les cellules souches productrices d’ovocytes (CSO) sans contamination par d’autres cellules.
En effet, en 2009, une équipe chinoise avait isolé des CSO par une approche de capture immunomagnétique, couplant des billes magnétiques et un anticorps reconnaissant une protéine de surface cellulaire Ddx4, mais l’approche n’était pas sans contamination. De plus, la protéine Ddx4 n’avait été trouvée auparavant que dans le cytoplasme des ovocytes, ce qui soulevait des doutes sur la validité de cette technique.
White, Tilly et coll. ont d’abord vérifié que la protéine Ddx4, bien que située dans le cytoplasme des ovocytes, est effectivement exprimée à la surface de rares cellules identifiées comme étant des CSO par les marqueurs génétiques et les tests fonctionnels. En utilisant l’anticorps anti-Ddx4 et un système de capture des cellules activées par fluorescence, ils ont pu purifier de façon fiable les CSO dans les ovaires de souris adultes.
Lorsque ces CSO de souris marquées par la protéine vert fluorescent (GFP) sont injectées dans les ovaires de souris adultes (non traitées par chimiothérapie), elles produisent des ovocytes qui sont ovulés et, après fécondation in vitro, produisent des embryons normaux.
En utilisant cette technique de capture par immunofluorescence, l’équipe a isolé une population équivalente de cellules souches germinales dans les ovaires de jeunes femmes.
L’équipe a pu utiliser des ovaires cryopréservés après leur retrait chez de jeunes femmes consentantes (âgées de 20 à 30 ans) subissant une opération de changement de sexe, grâce à la collaboration du Dr Yasushi Takai (université médicale de Saitama au Japon), un ancien assistant de recherche dans l’équipe de Tilly.
Ces cellules souches germinales humaines peuvent se multiplier in vitro pendant des mois et produire spontanément des cellules qui ont toutes les caractéristiques d’ovocytes (morphologie, expression génique et progression vers la méiose avec un état haploïde unique).
Lorsque ces CSO humaines, marquées par la protéine fluorescente GFP, sont injectées dans des biopsies de tissu ovarien humain qui sont ensuite greffées en sous-cutané chez des souris immunodéficientes, il se forme des follicules contenant des ovocytes GFP-positifs.
« Ces expériences apportent la preuve de concept que les CSO humaines réintroduites dans le tissu ovarien adulte accomplissent leur fonction de produire des ovocytes », souligne le Dr Tilly.
Applications potentielles.
L’équipe explore plusieurs applications cliniques potentielles de ces résultats : 1) établir des banques de CSO humaines, puisque ces cellules peuvent être congelées sans dommage, à la différence des ovocytes?;?
2) identifier des hormones et des facteurs accélérant la formation
des ovocytes à partir des CSO humaines?; 3) développer des ovocytes humains matures à partir des CSO pour la fécondation in vitro ; 4) développer d’autres approches pour améliorer les résultats de la FIV et d’autres traitements de la stérilité.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques