En 2007 naissait Hemarina, une petite entreprise de biotechnologie en Bretagne, spécialisée dans la recherche sur les transporteurs d’oxygène universels d’origine marine. « Le Quotidien du Pharmacien » avait alors présenté la biotech et son projet phare : utiliser le ver marin arenicola marina comme source de substitut sanguin.
Huit ans plus tard, Hemarina lance le premier essai clinique pour évaluer la molécule issue du sang de ce ver marin, le transporteur d’oxygène HEMO2life, dans la préservation des greffons rénaux. C’était déjà, lors de la création d’Hemarina, la toute première indication imaginée par les chercheurs : améliorer la préservation d’organes en attente de transplantation et réduire ainsi le risque de rejet de greffe.
Car le greffon subit de potentielles lésions irréversibles dues à la carence en oxygène lors de son prélèvement et de sa conservation, ainsi qu’à la réoxygénation brutale lors de la transplantation. Actuellement aucun procédé ne permet de compenser la carence en oxygène. C’est dire si les espoirs placés dans le ver marin sont forts.
Dès 2007, l’équipe de chercheurs d’Hemarina s’émerveillait : l’arénicole, connu pour les tortillons qu’il laisse dans le sable des plages de l’Atlantique et ses capacités d’appât pour les pêcheurs, est une usine à hémoglobine. Mieux, sans typage, il est sans doute donneur de sang universel. L’hémoglobine extracellulaire de ce proche cousin du ver de terre est « naturellement polymérisée, avec un haut poids moléculaire (50 fois plus grosse que l’hémoglobine humaine), stable à 4 °C, très fonctionnelle, non glycosylée, homogène : c’est un produit unique et un excellent transporteur d’oxygène », expliquait alors Morgane Rousselot, de la société Hemarina.
Pénurie mondiale
Les essais cliniques vont débuter d’ici à quelques semaines et incluent 60 patients dans six centres de transplantation : Brest, Paris, Lyon, Tours, Poitiers et Limoges. La transplantation rénale est actuellement le seul traitement de l’insuffisance rénale terminale et permet a des patients aux reins détruits par la maladie de retrouver une espérance de vie et une qualité de vie proches de la normale.
En 2014, 3 232 personnes ont bénéficié d’une greffe, alors que 4 695 patients étaient inscrits sur liste d’attente. Le substitut sanguin d’Hemarina pourrait « permettre de mieux préserver les greffons, d’élargir le nombre de greffons disponibles et d’apporter une réponse au moins partielle à la pénurie d’organes », indique Benoît Barrou, président de la Société francophone de transplantation, responsable du programme de transplantations rénales à l’hôpital universitaire de La Pitié-Salpêtrière à Paris et coordinateur chirurgical de l’essai.
Des essais cliniques réussis feront de l’homme un nouveau prédateur à grande échelle de l’arénicole. D’autant que les applications envisagées ne s’arrêtent pas à la préservation des greffons. Hemarina poursuit ses recherches dans la cicatrisation des plaies ischémiques, les transfusions, les AVC, les chocs septiques… Aujourd’hui, la biotech développe trois applications médicales potentielles : HEMOXYCarrier (transporteur d’oxygène), HEMO2life (additif aux solutions de préservations d’organes) et HEMHealing (pansement oxygénant). Quand on sait que la pénurie de sang au niveau mondial est de 50 millions de litres par an, le ver des pêcheurs peut se faire du mauvais sang.
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