Quelques définitions
Insomnie : difficulté à dormir suffisamment ou à avoir un sommeil de qualité. Elle peut être transitoire, avec une amélioration spontanée, ou chronique. On distingue les insomnies primaires, et les insomnies secondaires survenant dans un contexte pathologique. Le sommeil est perturbé au moins 3 nuits par semaine pendant plus d'un mois.
Hypersomnie : besoin excessif de dormir.
Horloge circadienne : système interne régulé au niveau du cerveau (hypothalamus), permettant de contrôler les rythmes biologiques, dont le rythme veille sommeil. Cette horloge est influencée par la lumière du jour.
Mélatonine : hormone du sommeil, produite par la glande pinéale. Elle est sécrétée la nuit et favorise l'endormissement.
Un peu de physiopathologie
Le sommeil : quand le cycle déraille.
Le sommeil se compose de 4 à 6 cycles de 90 à 120 minutes, entrecoupés d'une brève phase d'éveil. Au cours de chaque cycle, une phase calme et une phase de sommeil paradoxal se succèdent. Le sommeil paradoxal est marqué par une activité cérébrale plus intense. Avec l'âge, la structure du sommeil évolue : le sommeil d'un nourrisson est différent de celui d'un adulte, et d'une personne âgée. Bien qu'attendus et normaux, ces changements sont perturbants et sont assimilés à des troubles du sommeil.
En dehors de cette évolution physiologique du sommeil, des épisodes de perturbations interviennent à tous les âges de la vie. Les causes sont diverses, du cauchemar chez l'enfant au deuil ou à la dépression chez l'adulte. Le stress ou une sursollicitation (par les téléphones portables dans la population adolescente notamment), l'anxiété ou les soucis, ont un retentissement négatif sur le sommeil, en quantité ou en qualité. L'environnement, tel que des nuisances sonores ou le changement d'heure, ou le mode de vie peuvent influencer le sommeil. Enfin, le sommeil peut être perturbé au cours d'une situation pathologique, notamment en cas de manifestations douloureuses. On parle d'insomnie secondaire.
Caractériser l'insomnie.
L'insomnie peut se manifester sous différentes formes : une difficulté à s'endormir, des réveils nocturnes, un réveil ultra-matinal… L'insomnie d'endormissement correspond à une incapacité à s'endormir dans un délai convenable, c'est-à-dire un délai que le sujet juge acceptable. Cette situation s'accompagne généralement d'une activité cognitive intense. La personne rumine et n'arrive pas à poser ses pensées, à s'apaiser. Autre forme d'insomnie, les réveils nocturnes donnent l'impression au patient de ne pas dormir, de faire une nuit blanche. Enfin, certaines personnes se plaignent d'un temps de sommeil écourté ; malgré un endormissement rapide, elles se réveillent anormalement tôt, seulement trois ou quatre heures après s'être couchées, sans pouvoir se rendormir.
À l'inverse de l'insomnie, l'hypersomnie se traduit par un besoin excessif de sommeil. La personne dort bien, mais a toujours envie de dormir davantage. Comme dans une situation d'insomnie, l'hypersomniaque a l'impression de ne pas avoir sa quantité de sommeil, mais pas pour les mêmes raisons. Cette sensation peut révéler une mauvaise qualité de sommeil, avec pour conséquence un défaut de récupération. Elle peut être la conséquence d'une apnée obstructive du sommeil.
Le sommeil, c'est la santé.
Le sommeil est important pour la santé, notamment pour le maintien des capacités cérébrales et cognitives. Chez l'enfant, le temps et la qualité du sommeil sont essentiels pour son développement intellectuel et physique. Chez l'adulte, un manque de sommeil est un facteur de risque de pathologies cardiovasculaires, de maladies métaboliques comme le diabète ou l'obésité, ou de troubles psychiatriques.
Les mots du conseil
Vous dormez mal comment et pourquoi ?
Le conseil à l'officine repose en premier sur une analyse approfondie de la plainte. Les questions posées doivent permettre de mieux comprendre les manifestations des troubles, les circonstances de survenue, et les répercussions sur la vie quotidienne.
Des problèmes de sommeil suite à un voyage avec décalage horaire, à l'arrivée d'un nouveau-né ou à deuil ne sont pas pris en charge de la même façon. Il arrive également qu'aucune cause particulière n'émerge de l'entretien.
La cause évitable ?
Lorsqu'une cause est identifiée, il faut évaluer si celle-ci est évitable, ou peut être facilement corrigée. Certaines causes sont évidentes, comme la pollution sonore, le ronflement du conjoint, un décalage horaire, ou un contexte familial ou professionnel perturbé. D'autres causes sont plus difficiles à identifier. Chez l'enfant par exemple, une infection parasitaire (oxyurose notamment) peut générer des cauchemars ou des insomnies. En traitant la parasitose, on favorise un retour à un meilleur sommeil. L'insomnie peut aussi survenir suite à la prise de médicaments excitants, sans que la personne ne fasse le rapprochement entre les deux. Enfin, l'insomnie ou des troubles du sommeil doivent être considérés comme des signaux d'alerte lorsqu'aucune cause n'est identifiée ; ces troubles peuvent révéler une maladie sous-jacente comme une dépression ou une maladie neurologique.
Prendre soin de son sommeil.
À l'officine, les conseils fondamentaux doivent être rappelés autant que possible ; il s'agit de gestes ou comportements de première intention, simples à mettre en œuvre mais dont l'efficacité peut être spectaculaire. Les boissons excitantes, l'alcool, les repas copieux sont des ennemis du sommeil. La pratique d'une activité physique ou intense le soir génère une excitation cérébrale, non propice au sommeil. De même, l'environnement doit favoriser le sommeil, qu'il s'agisse de la qualité de la literie ou du calme nécessaire à l'apaisement. Les rituels d'endormissement sont très dépendants de chaque personne, mais ils doivent être entretenus. Musique, lecture, méditation, il est important de retrouver le plaisir du repos.
Les hypnotiques : oui, mais pas à vie.
Depuis plusieurs années, les autorités de santé encouragent la maîtrise de la consommation des hypnotiques et apparentés. L'objectif est de ne pas avoir recours de manière systématique à ces médicaments pour prendre en charge une insomnie, et de limiter leur utilisation à une période courte. Autrement dit, l'arrêt de ces médicaments doit être programmé dès l'initiation du traitement par benzodiazépines ou molécules apparentées. Pour autant, les difficultés de sommeil peuvent persister après l'arrêt de ces médicaments. Il faut alors accompagner le patient vers d'autres solutions thérapeutiques, qu'il s'agisse de techniques non médicamenteuses ou d'alternatives telles que les compléments alimentaires ou l'homéopathie. Ce rôle revient de plus en plus aux équipes officinales.
Les produits du conseil
La mélatonine : méconnue il y a dix ans, cette hormone rencontre aujourd’hui un franc succès et entre dans la composition de nombreux compléments alimentaires, seule ou en association. Elle constitue aussi le principe actif de divers médicaments sur prescription médicale, pour traiter l'insomnie chez des patients de plus de 55 ans, ou des patients plus jeunes souffrant de pathologies telles que l'autisme. Dans les compléments alimentaires, la dose de mélatonine par unité de prise est généralement de 1 mg ; la réglementation actuelle fixe à moins de 2 mg la quantité de mélatonine pouvant être apportée par les compléments alimentaires. En 2018, l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) a émis des recommandations vis-à-vis de ces produits, sur la base de données de nutrivigilance recueillies en France. Elle recommande de ne pas utiliser la mélatonine chez les femmes enceintes, les enfants et adolescents, ou dans le cadre de certaines maladies chroniques (maladies auto-immunes, épilepsie, asthme…).
La doxylamine : cet antihistaminique H1 est utilisé pour ses propriétés sédatives en traitement court des insomnies occasionnelles chez l'adulte. La dose recommandée est de 7,5 mg à 15 mg par jour, jusqu'à 30 mg maximum. Le comprimé doit être pris 15 à 30 minutes avant le coucher. Ce médicament est également conseillé à l'occasion des voyages, pour aider à trouver le sommeil.
L'association brome et calcium : il s'agit de la spécialité CALCIBRONAT, indiquée en traitement des troubles légers du sommeil et de l'irritabilité. Le brome revendique une action sédative. La posologie est de 1 à 2 comprimés par jour chez l'adulte, et un comprimé chez l'enfant de plus de 30 kg. Ce médicament est contre-indiqué en cas d'acné, de dénutrition, ou de néphropathie.
La phytothérapie : plusieurs plantes sont bien connues pour leurs propriétés sédatives et entrent dans la composition de médicaments ou de compléments alimentaires. Ces plantes peuvent être conseillées selon des contextes bien spécifiques. Le pavot de Californie (Eschscholtzia californica) est privilégié pour les difficultés d'endormissement. L'aubépine est intéressante lorsque l'insomnie s'accompagne d'une anxiété avec des manifestations cardiaques. La passiflore est préconisée pour les troubles du sommeil liés à une excitabilité vespérale. La valériane améliore la qualité du sommeil. La littérature suggère un intérêt de cette plante lorsque l'insomnie survient au cours de la ménopause. D'autres plantes comme le houblon, la mélisse ou la ballote sont traditionnellement utilisées dans le traitement de l'insomnie.
Une réponse par les huiles essentielles : il s'agit principalement des huiles essentielles de camomille noble, de petit grain de bigaradier et de lavande officinale, utilisées soit par voie orale, soit en externe (voie cutanée ou diffusion).
L'alternative homéopathique : l'homéopathie présente l'avantage d'approfondir l'échange avec le patient, de demander des précisions sur le contexte de survenue et la description des manifestations. Par exemple, les troubles liés à un décalage horaire sont soulagés avec Cocculus indicus 15 CH. Pour corriger les réveils nocturnes, Arsenicum album est préconisé. Le conseil peut porter également sur Nux vomica, chez des patients hyperactifs et qui aiment les bons repas. Gelsemium est conseillé chez les personnes qui ont peur de ne pas bien dormir. Pour favoriser l'endormissement en cas d'excitation positive, Coffea cruda est un choix pertinent. Enfin, et de manière générale, Passiflora composé est généralement associé, en plusieurs prises par jour, pour rétablir l'équilibre veille sommeil.
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