CHIFFRER la douleur de façon absolue est impossible. Expérience sensorielle et émotionnelle, la douleur est intrinsèquement suggestive. Chez l’enfant, cela suppose un développement cognitif suffisant pour repérer et identifier cette expérience. Tout dépend de la compréhension qu’il a de sa maladie, de son vécu et de sa possibilité d’expression par le langage. Pour ces raisons, la douleur de l’enfant a été longtemps méconnue et négligée car on pensait qu’il ne la percevait pas. Aujourd’hui, il est totalement admis que les enfants, y compris en période néonatale et même s’ils sont prématurés, réagissent à la douleur de façon parfois plus importante que les adultes. Comme chez l’adulte, les quatre grands types de mécanismes de douleur sont différenciés mais la douleur aiguë est de loin la plus fréquente chez l’enfant. La prise en charge requiert les mêmes médicaments que chez l’adulte mais les AMM sont plus ou moins restreintes et les formes galéniques sont adaptées selon l’âge.
Des échelles d’évaluation en fonction de l’âge.
La sémiologie spécifique de la douleur de l’enfant fait appel à des échelles rapides et simples. L’enfant de plus de cinq ans commence à avoir une bonne maîtrise de son corps et un vocabulaire conséquent, il est le plus souvent capable d’exprimer sa douleur (siège, intensité…). Les méthodes d’autoévaluation sont alors fiables, l’échelle visuelle analogique (EVA) doit être utilisée dès que possible. Elle est composée d’une droite et d’un curseur que l’enfant déplace de gauche (douleur absente) à droite (douleur maximale) en fonction de son ressenti. Elle permet de suivre le niveau de douleur et les modifications dues à la thérapeutique. L’échelle verbale (EV) simple permet de la qualifier selon 4 catégories (de 0 à3).
Chez le très jeune enfant, quand la communication orale n’est pas possible, le dessin est un moyen de communication intéressant : l’enfant indique la région douloureuse qui le concerne sur un « bonhomme douleur » avec un code couleur en fonction de l’intensité de la douleur (rouge pour une douleur intense et vert pour l’absence de douleur). Il peut aussi choisir parmi des planches de six visages, celui qui exprime le mieux sa douleur ; cette échelle reflète surtout l’aspect émotionnel du vécu de la douleur. Chez le petit enfant, de dix-huit mois à cinq ans, la douleur peut avoir des manifestations cliniques très sévères, et des échelles d’observation comportementales ont été mises au point. Les signes émotionnels comme les cris, les pleurs, les larmes sont les marqueurs classiques de la douleur aiguë. A ces signes peuvent s’associer des signes plus spécifiques : l’enfant peut garder une position antalgique et avoir des gestes de retrait et de protection de la zone douloureuse. En cas de douleur durable, l’enfant est trop sage, il ne joue pas et parle peu ; un état d’atonie psychomotrice s’installe : l’enfant reste immobile, prostré, le corps figé, le regard triste. Des échelles se basant sur les réactions faciales (mimiques, grimaces), corporelles, et les gestes d’évitement ont été mises au point pour les moins de 18 mois.
L’impact de la douleur chez l’enfant.
La douleur est incontestablement un signal d’alarme. Aucune douleur durable n’est « profitable » à l’enfant et il est inconcevable de le laisser sans soins. Quand elle persiste, elle peut avoir des effets néfastes sur sa santé surtout après un acte chirurgical : elle entrave le processus de réparation tissulaire. La morbidité et la mortalité post-chirurgicales peuvent être plus élevées en cas de mauvaise prise en charge. Sur le plan psychologique, après un épisode douloureux intense et prolongé, l’enfant peut garder pendant quelques mois des troubles du sommeil, des terreurs nocturnes et des troubles de l’appétit. Il a même été démontré qu’une douleur subie en période néonatale pouvait modifier les réactions comportementales futures de l’enfant par un processus de mémorisation de la douleur. La prise en charge par des méthodes non médicamenteuses, seules ou en association aux traitements médicamenteux, prend de plus en plus d’importance. On distingue les méthodes physiques (kinésithérapie, acupuncture, stimulation par le chaud ou le froid), les méthodes comportementales (relaxation, désensibilisation), et les méthodes cognitives (hypnose, distraction).
Article précédent
Comment mettre un terme à l’escalade du mal
Article suivant
« Existera-t-il bientôt une alternative aux morphiniques ? »
Du millepertuis au tricyclique : le très large arsenal anti « déprime »
M. Gérard C., 77 ans
La crème des soins antidouleurs
Voyage aux confins de la douleur
Aux frontières de l’antalgie
Une trilogie salvatrice
Comment mettre un terme à l’escalade du mal
Quand l’enfant souffre
« Existera-t-il bientôt une alternative aux morphiniques ? »
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques