C’EST un pavé dans la marre que lance le Pr Alain Astier dans « l’Observatoire » (publication de l’Académie nationale de pharmacie). L’article qu’il signe dans le numéro de décembre 2008, serait presque passé inaperçu s’il n’avait remis en cause en profondeur les origines de la rupture de stock. S’intéressant aux ruptures d’approvisionnement en matières premières pharmaceutiques, l’académicien déplore les conséquences en termes de santé publique d’un phénomène selon lui non inéluctable. « La santé publique ne semble plus faire le poids devant les contraintes techniques, financières et environnementales qui grèvent les décisions », estime-t-il. Certaines fabrications, « jugées non rentables », sont abandonnées, tandis que les laboratoires se tournent de plus en plus vers des fournisseurs étrangers « moins sourcilleux sur la qualité », pour s’approvisionner en matières premières. La raison ? « la chimie européenne a été la cible de mesures sécuritaires et écologiques particulièrement décourageantes », avance-t-il.
Par ailleurs, note également Alain Astier, la fragilité des sources d’approvisionnement tient aussi, pour les fabrications de très haute technologie, au regroupement de la production sur un seul site pour des raisons techniques, d’environnement et de coût.
Quant aux solutions à apporter au problème, l’académicien souligne le fait que, dans le cas d’arrêt définitif de commercialisation, même si la décision industrielle est unilatérale, « aucune loi ne permet de contraindre à poursuivre la mise à disposition d’un médicament, même essentiel ». D’autre part, l’État ne saurait intervenir sur les choix d’implantation et de transfert des sites de production. Pour autant, estime Alain Astier, le médicament étant essentiellement lié au principe actif, dont la qualité est essentielle, il devrait échapper aux règles économiques et commerciales classiques. « Il n’est donc pas illogique de poser aux industriels la question de ces difficultés d’approvisionnement en termes de santé publique et d’envisager des contraintes spécifiques », suggère-t-il.
Voilà qui devrait interpeller les industriels du médicament. Ces derniers pourraient déjà arguer d’une réflexion aboutie sur ces questions. En effet, rappelle Alain Astier, depuis plus de dix ans, l’AFSSAPS, le LEEM et l’Ordre des pharmaciens se sont impliqués fortement pour prévoir les pénuries de médicaments en amont de leur survenue. La loi du 5 mars 2007, fait ainsi obligation aux laboratoires d’informer l’Agence au moins six mois avant la date envisagée d’arrêt de commercialisation d’un médicament ne disposant pas d’alternative thérapeutique.
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