EN DÉCEMBRE dernier, lors d’une conférence sur le bon usage du médicament organisée par le CISS Poitou-Charentes, la question des génériques était abordée. Une vive discussion s’était alors engagée entre les représentants des associations de patients présents et les intervenants, pharmaciens principalement. Ces derniers eurent fort à faire pour répondre aux interpellations et aux questions du public qui désignait volontiers le générique comme le vilain petit canard de la famille médicaments. Cette anecdote provinciale n’est certainement pas isolée. Surtout, elle illustre à quel point le générique anime voire électrise l’opinion publique, que ce soit au comptoir, en assemblée, sur la Toile ou chez le médecin. Elle démontre aussi, et c’est très positif, la curiosité, le désir d’une juste information qu’éprouvent les patients français à propos de ce médicament.
Le générique, coupable de n’être qu’une copie.
Il faut dire qu’il y a de quoi y perdre son latin et, vu le contexte houleux de ces derniers mois, on ne sait plus à quel saint se vouer. Ce qui est sûr, c’est que les génériques ont pris un faux départ et ont parfois enchaîné les maladresses. Des brèches ont été laissées ouvertes, dans lesquelles les médias se sont engouffrés. Ce qui est apparu comme des révélations pour les non initiés au médicament n’était finalement qu’omission ou simplification des messages. On l’a vu pour les excipients (à effet notoire), que le public a découverts grâce au générique. Le même scénario s’est reproduit pour le prix. Les marges thérapeutiques étroites et les différences de sel (impliquant une différence de dosage) ont compliqué l’affaire. Il y a quelques mois, l’Académie de médecine a ravivé la polémique, en soulevant la question de la qualité et de l’origine des matières premières. Tiens ? On ne s’est jamais posé ce genre de question pour les autres médicaments. Récemment, c’est la bioéquivalence et les marges d’erreur tolérées qui ont été dénoncées. C’est surtout l’interprétation et la compréhension de cette notion très pharmacologique qui a posé problème. En fait, contrairement aux autres médicaments, le générique doit constamment se justifier.
Des études et des rapports.
En 2010, une étude colombienne (Vesga O et al) réalisée sur la vancomycine administrée par voie intraveineuse chez des souris infectées par un staphylocoque avait suggéré une moindre efficacité des génériques. Deux ans plus tard, les résultats de l’étude française pilotée par Anne-Claude Crémieux, professeur de maladies infectieuses à Versailles-Saint-Quentin s’opposent à cette conclusion colombienne, et démontre l’équivalence d’efficacité de six génériques de la vancomycine. L’étude a été réalisée sur des lapins (animal de référence pour tester l’efficacité des antibiotiques) présentant une infection cardiaque grave par staphylocoque. Le mode d’évaluation des médicaments génériques, basés sur la bioéquivalence (dont la méthodologie est définie par des normes internationales), semble donc satisfaisant pour garantir une efficacité thérapeutique similaire. C’est en tout cas ce que soulignent les nombreux rapports qui se sont succédé en fin d’année 2012. L’IGAS (Inspection générale des affaires sociales), l’Académie de pharmacie, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) et la Mutualité française s’y sont mises tour à tour et ont apporté des réponses claires et précises, notamment concernant le contrôle de la qualité des médicaments génériques, les sites de production (situés à plus de 95 % sur le territoire de l’Union européenne), la bioéquivalence et les marges d’erreur autorisées, ou la politique des prix de ces médicaments. Ces documents convergents sont des supports techniques et d’information indispensables aux professionnels de santé pour répondre aux interrogations de leurs patients.
Un désir d’information entendu par le GEMME.
Car il reste un important travail à faire auprès des patients pour dissiper les doutes et les appréhensions, même si la progression du taux de substitution a été fulgurante (en 6 mois, 12 points ont été regagnés !). C’est l’avis du GEMME et de ses adhérents, lesquels ont décidé de mener campagne pour restaurer la confiance dans le générique. « Depuis deux ans, nous avions analysé le besoin d’information sur les génériques, et de nombreux acteurs, professionnels de santé ou institutions, soutenaient ce point de vue », explique Catherine Bourrienne-Bautista, déléguée générale du GEMME. Articulée autour de messages à la fois percutants et amusants, cette campagne qui s’est déroulée en janvier 2013, visait surtout à apporter des explications claires et précises aux diverses interrogations des patients. « La confiance ne se décrète pas, elle se construit. Il faut expliquer et rassurer pour obtenir cette confiance », insiste la représentante du GEMME. Si pour le moment, il n’est pas prévu de renouveler cette opération, cette éventualité n’est pas écartée. « Pour mesurer l’impact de cette campagne et pour que les patients s’approprient les messages, il serait intéressant de la renouveler, et que celle-ci soit portée par une autorité institutionnelle », souligne Catherine Bourrienne-Bautista. En outre, d’autres actions de communication sont mises en place ; le groupement de pharmaciens PHR propose par exemple une bande dessinée pour expliquer le générique, et le laboratoire Biogaran produit une Web série.
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