Pour obtenir la première image de ce nouveau virus, quelques mois seulement avaient suffi. Une première image publiée le 20 mai 1983 dans la revue « Science ». Depuis, 40 ans sont passés qui ont dessiné les méandres d'une recherche tour à tour fructueuse et aride. Celle de la lutte contre le sida.
La découverte du virus du sida a 40 ans. Tout a commencé fin 1982. Françoise Barré-Sinoussi, jeune chercheuse à l'Institut Pasteur, travaille alors dans le laboratoire de Jean-Claude Chermann, au sein de l’unité Oncologie virale de Luc Montagnier. En décembre 1982, ces derniers sont contactés par les cliniciens et virologistes de l’hôpital Bichat, qui ont en charge des premiers patients atteints du sida en France. Ces médecins souhaitent que les Pasteuriens démasquent l’agent infectieux à l’origine de cette nouvelle maladie, un rétrovirus semblable ou proche du HTLV1, selon leur intuition. En janvier 1983, un premier échantillon ganglionnaire de patient en phase pré-sida est donc apporté au laboratoire. Les investigations peuvent commencer. Françoise Barré-Sinoussi tente de détecter, dans les surnageants de cultures cellulaires, une activité enzymatique bien particulière, celle de la transcriptase inverse (ou reverse transcriptase en anglais), enzyme indispensable à la multiplication et donc à la survie des rétrovirus. « On testait différentes activités de reverse transcriptase avec différents réactifs, se souvient Françoise Barré-Sinoussi en feuilletant les pages de son ancien cahier de laboratoire. Et ça a été extrêmement rapide : on a fait les premiers tests le 12 janvier 1983, et on avait déjà une activité reverse transcriptase significative le 27 janvier. » C’est ainsi, en l’espace de quelques jours, qu’un nouveau rétrovirus humain, alors baptisé virus associé à une lymphadénopathie (LAV), est détecté.
« On avait détecté la présence d’un rétrovirus dans le surnageant de culture : il y avait de l’activité reverse transcriptase, des particules virales, de l’ARN… Maintenant il fallait le visualiser sous le microscope », poursuit la chercheuse. C’est à Charles Dauguet, microscopiste du laboratoire, que revient cette délicate mission. « Nous lui avons donné des indications : il devait chercher des particules virales d’environ 100 nanomètres de diamètre, qui possédaient une enveloppe, et voir des bourgeonnements à la surface des lymphocytes en culture… se souvient Françoise Barré- Sinoussi. Charlie a mis des heures et des heures à trouver le virus, jusqu’à ce qu’il nous téléphone pour nous dire " Je crois que je l’ai, venez voir ! " » La première photo du virus est réalisée le 4 février 1983, et le 20 mai 1983, les premiers travaux menés sur ce nouveau rétrovirus humain sont publiés dans la revue « Science ». La longue saga thérapeutique et médicale de la lutte contre le sida venait de débuter.