Le Quotidien du pharmacien. Comment jugez-vous l’état de santé mentale des pharmaciens aujourd’hui ?
Dr Emmanuel Gourmet.- Les officinaux sont très exposés au risque de burn-out car ils en cumulent tous les facteurs de risques : la charge de travail qui s’est mathématiquement accrue jusqu’à exploser, la charge cognitive dans la mesure où ils doivent assimiler toujours plus d’informations en un temps de plus en plus restreint pour ensuite prendre des décisions et, enfin, la charge émotionnelle, celle de leurs patients, de plus en plus impatients, inquiets et agressifs, mais aussi leur propre charge émotionnelle.
Les professionnels de santé sont-ils particulièrement plus exposés à ce risque de burn-out ?
Oui, tout à fait, car ils présentent un quatrième facteur de risque lié à une personnalité très attachée à des principes de loyauté et d’exigence. Ainsi, par loyauté, le pharmacien va vouloir aller jusqu’au bout de ses engagements. En un mot, il veut « tout faire tout bien ». Mais ce qui est louable en temps normal peut être dangereux dans la période chaotique que nous connaissons. Nous ne sommes plus engagés dans un marathon mais dans un ultra-trail dont nous ne connaissons pas la ligne d’arrivée ! Aussi, à l’instar du sportif de haut niveau, l’officinal doit savoir s’arrêter avant l’épuisement total. Sa conscience professionnelle doit lui dicter de prendre soin de lui et de conserver au maximum des moments de plaisirs.
Comment repérer les signes de burn-out ?
Deux symptômes précurseurs doivent alerter avant que le cerveau ne disjoncte. La fatigue est telle qu’on n’arrive pas à récupérer dans les temps accordés au repos. Cela s’accompagne d’un stress permanent qui se manifeste par une tension et une fréquence cardiaque plus élevées, des troubles digestifs, une consommation plus importante, de l’agressivité, de l’hypersensibilité…
Quels leviers actionner avant qu’il ne soit trop tard ?
Actuellement, on ne peut baisser raisonnablement la charge de travail, ni la charge cognitive alors que les protocoles, aussi infernaux les uns que les autres, se multiplient, ni même la charge émotionnelle. Par conséquent, il faut veiller à prendre soin de soi, se préserver des facteurs de plaisir… L’entourage doit être sensibilisé à ce besoin et ne pas multiplier les sollicitations dans le cadre privé afin que le pharmacien puisse s’adonner à ses activités plaisir.
Parallèlement, l'officinal doit accepter de faire moins, de ne plus satisfaire tout le monde, voire de déléguer davantage lorsque cela est possible. Cette étape est difficile à franchir car elle suppose qu’on remette en cause un schéma cognitif. En effet, les pharmaciens, comme les autres professionnels de santé, sont conditionnés. Ils n’ont pas le droit à l’erreur, ils doivent répondre à un haut niveau d’exigences vis-à-vis de leurs patients. Et fait nouveau, ils doivent désormais se plier à de nouvelles exigences gouvernementales. Pourtant, dans la période que nous traversons, la prescription comportementale consiste justement à faire sauter ce verrou cognitif et savoir aussi se centrer sur le SOI.
* Tel : 0800 73 69 59
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