« J’EN APPELLE, une nouvelle fois, à la responsabilité et à l’esprit de solidarité et de civisme, en invitant chacun à aller vers son médecin traitant pour faire le bilan de ses vaccins et de ceux de son entourage », a indiqué Nora Berra, secrétaire d’État à la Santé lors du lancement de la Semaine européenne de la vaccination, organisée du 26 avril au 2 mai. « La vaccination est insuffisante dans notre pays », a-t-elle souligné. L’explosion actuelle de la rougeole, avec plus de 3 000 cas pour le seul mois de mars, inquiète, d’autant que le nombre de complications neurologiques (12 encéphalites-myélites et 1 syndrome de Guillain-Barré) et de décès a déjà atteint le niveau de l’année 2010. Et cette évolution « peut être précurseur de ce qui pourrait survenir avec d’autres pathologies ».
Quelles que soient les pathologies, les couvertures vaccinales restent au-dessous des objectifs fixés par la loi de santé publique de 2004 : au moins 95 % pour toutes les maladies à prévention vaccinale, sauf la grippe, pour laquelle l’objectif de 75 % est visé dans les groupes ciblés par la vaccination.
Chez les enfants, si l’objectif est atteint pour la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et la coqueluche, elle est insuffisante pour la rougeole, les oreillons, la rubéole, l’hépatite B, le pneumocoque et la méningite C. En ce qui concerne le BCG, la suspension de l’obligation vaccinale, en 2007, n’a pas eu, selon l’Institut de veille sanitaire (InVS), d’impact sur l’épidémiologie de la maladie, mais les couvertures vaccinales pour le BCG, en progrès restent insuffisantes, même si elles progressent en Île-de-France (77 % pour la population cible contre 50 % hors Île-de-France).
Disparités préoccupantes.
Chez les adolescents, « aucune vaccination n’atteint les 95 % de couverture vaccinale », a souligné la secrétaire d’État. Et « une jeune fille sur deux en âge d’être vaccinée contre le HPV ne l’est pas ».
Chez les adultes, les couvertures vaccinales sont très insuffisantes dans toutes les études réalisées. Des données provisoires chez les personnes âgées de 65 ans ou plus, obtenues à l’issue d’une enquête téléphonique réalisée en janvier 2011 par l’InVS montrent que seulement 48 % des sujets étaient à jour de leur rappel décennal diphtérie, tétanos, poliomyélite. « Chaque année, de 10 à 20 cas de tétanos sont toujours observés en France », a précisé Françoise Weber, directrice générale de l’Institut. De plus, « 50 % des cas de coqueluche chez les enfants de moins de 6 mois sont transmis par les parents », a-t-elle ajouté.
Les disparités observées en fonction de l’âge le sont aussi pour la répartition géographique des couvertures vaccinales. « Le sud de la France se vaccine moins que le nord », a déploré la secrétaire d’État. Là encore, la rougeole est un bon indicateur. Les dernières données de l’InVS montrent en effet qu’en Rhône-Alpes, où la couverture est largement insuffisante, l’incidence de l’infection rougeoleuse est de près de 78 cas pour 100 000, alors qu’elle est de 3,30 pour 100 000 dans les Pays de la Loire et de 0,38 pour 100 000 habitants en Lorraine. « Cela démontre s’il était encore nécessaire que le vaccin contre la rougeole est efficace », a relevé Françoise Weber.
Réflexion sur la stratégie.
Pour Nora Berra, dans cet état des lieux, un constat semble particulièrement préoccupant : les couvertures vaccinales très inégales chez les professionnels de santé. Bonne pour les vaccins obligatoires (95 % pour le DTP, 91 % pour l’hépatite B et 95 % pour le BCG), la couverture vaccinale « est très faible pour les vaccinations recommandées », a-t-elle observé. Selon les données disponibles, elle était en 2009 de 11,4 % pour le rappel décennal contenant la valence coqueluche, de 49,7 % pour au moins une dose du vaccin contre la rougeole, de 29 % pour la varicelle et de 25,6 % pour la grippe. « L’ensemble des professionnels de santé doit aussi montrer l’exemple à nos concitoyens pour mieux les convaincre », insiste Nora Berra.
Outre l’appel adressé à chacun, à chaque foyer et à chaque famille, de regarder son carnet de santé et de faire le point sur ses vaccins, la secrétaire d’État à la Santé a décidé de lancer une réflexion globale sur la meilleure stratégie vaccinale. Des travaux vont être organisés avec les représentations professionnelles afin de mieux impliquer les médecins et d’élaborer conjointement cette stratégie destinée à retrouver la confiance des patients. Les syndicats de médecins libéraux seront également associés à ces travaux « qui devront aboutir pour la rentrée », précise Nora Berra. En parallèle, le Haut Conseil de la santé publique va être saisi pour une réflexion plus technique, portant notamment sur une éventuelle simplification du calendrier vaccinal et sur le statut de certaines vaccinations. « On peut se demander si le fait que la vaccination contre la rougeole n’est pas obligatoire mais fortement recommandée n’a pas contribué à faire croire que cette vaccination est facultative », a indiqué Didier Houssin, directeur général de la Santé. L’existence d’un double statut (pas d’obligation pour les vaccins apparus après 1970) tout comme la multiplicité des vaccins et la complexité du calendrier pourraient être un frein à la vaccination.
Quant à la polémique suscitée par le vaccin pandémique H1N1, il semble qu’elle n’ait eu que peu d’impact sur la campagne de vaccination contre la grippe saisonnière (2010-2011). Les niveaux de la couverture vaccinale sont identiques à ceux de 2009-2010 (61 % chez les 65 ans et plus et 46,6 % chez les sujets à risque de moins de 65 ans en 2010-2011, contre 63 % et 36 % en 2009-2010). Nora Berra a néanmoins appelé à un apaisement du débat autour de la vaccination : « Il faut rétablir la raison autant que la sérénité », a-t-elle indiqué.
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