Pharmacien adjoint dynamique, rigoureux, qui souhaite évoluer à l’officine, qui désire s’investir pour sécuriser les actes pharmaceutiques et optimiser la prise en charge et la satisfaction du patient… Si vous vous reconnaissez dans cette description, c’est l’occasion de proposer à votre titulaire de devenir le référent Assurance Qualité au sein de l’officine.
Une place de choix pour l’adjoint
Si le choix d’instaurer la qualité à l’officine revient au titulaire (il est en effet le seul décisionnaire sur ce point), l’adjoint est bien placé pour mettre en place ce système : « d’une part le titulaire a beaucoup de choses à gérer et déléguera volontiers cette tâche à un adjoint. D’autre part l’adjoint, en tant que cadre, a un rôle de management et pourra mettre celui-ci à profit. Enfin, l’adjoint est bien placé pour coordonner la qualité à l’officine car il est la courroie de transmission entre l’équipe et titulaire, et parfois l’équipe s’adresse plus facilement à lui pour gérer des problèmes (vacances, conflits…) », évoque Françoise Amouroux, pharmacien adjoint en Gironde et coresponsable du DU de Qualité à la faculté de pharmacie de Bordeaux.
Par ailleurs, s’investir dans l’assurance qualité peut être bien plus motivant qu’il n’y paraît. Contre toute attente, « ce travail est très stimulant intellectuellement : il faut observer, discuter, échanger, proposer, rédiger, vérifier… », témoigne Nathalie Fabre, pharmacien adjoint dans une officine parisienne qui compte 40 salariés et qui fait également office de laboratoire sous traitant de préparations pharmaceutiques.
La jeune femme apprécie le côté transversal de sa mission : « Cela me permet de toucher à toutes les activités de l’entreprise, et de faire autre chose que le travail au comptoir. » Même discours pour Aurore Henno-Duribreux, pharmacien adjoint dans le Nord, qui considère l’assurance qualité comme « une fonction enrichissante, lui ayant permis d’évoluer professionnellement et de mieux communiquer avec l’équipe ».
En revanche, il ne faut pas en attendre une réévaluation du salaire à la hausse. « C’est loin d’être entré dans les mœurs ! », sourit Nathalie Fabre. Mais, pour les pharmaciens en recherche d’emploi, des notions d’assurance qualité seront un atout supplémentaire pour décrocher un poste.
D’ailleurs, avant de se lancer, une formation peut s’avérer utile, même si elle n’est pas obligatoire. Il existe une formation dispensée par l’UTIP (en une journée + un module d’e-learning validant) ou des formations universitaires de quelques semaines.
Une équipe partante
Une fois que le projet lui a été confié, le pharmacien adjoint responsable de l’assurance qualité (PRAQ) devra rapidement organiser une réunion pour informer toute l’équipe officinale. « L’assurance qualité est une affaire d’équipe avant tout ! Sans l’adhésion de tous, rien ne pourra se concrétiser », précise Marcelline Grillon, titulaire dans le Loiret et vice-présidente du conseil A de l’Ordre des pharmaciens.
Néanmoins, le PRAQ peut être confronté à des réticences de la part d’employés, surtout s’ils ont de la bouteille. « Au début, l’équipe n’a pas vu l’intérêt de la démarche qualité, mais tout le monde a joué le jeu », se souvient Aurore Henno-Duribreux. En cas de blocage, des petits riens peuvent suffire pour dégripper la situation. « On peut commencer par évoquer un dysfonctionnement dont tout le monde se souvient : une erreur de commande, une confusion entre deux patients lors de la remise d’un bon de promis, une inversion de médicaments… Au final, tout le monde comprendra le bénéfice qu’il y a à régler définitivement ces points fragiles », propose Marcelline Grillon.
Autre écueil : certains employés qui se sont approprié des tâches précises à l’officine pourront être inquiets à l’idée de divulguer leur savoir, car c’est ce qui les valorise. « Il faut alors bien expliquer que la qualité vise à ce que tout me monde sache tout faire à l’officine. Donner son savoir, mais aussi recevoir celui de l’autre et gagner en qualité pour l’équipe, et surtout pour le patient », souligne Nathalie Fabre.
Enfin, rappelons que les procédures ne sont pas forcément rédigées par le PRAQ. Tout membre de l’équipe officinale peut être rédacteur d’une procédure qu’il signera de son nom. « Ce qui est en général bien apprécié », observe Nathalie Fabre. Par exemple, « La personne en charge des mutuelles a rédigé la procédure correspondante, l’assistante de direction s’est occupée de la procédure incendie… », illustre Aurore Henno-Duribreux.
Des réunions primordiales
Une fois le personnel convaincu, le travail consiste à mettre en place, de façon systématique, une réunion bimensuelle ou mensuelle. Cette réunion, même d’une dizaine de minutes, est primordiale. Lors de ces rendez-vous, il peut être utile de faire le bilan de la qualité déjà existante à l’officine. Pour cela, l’Ordre national des pharmaciens, met à disposition deux outils très utiles.
Le site ACQO (Accueil Qualité Officine), dédié à l’optimisation de l’accueil des patients, et le site EQO (Évaluation de la qualité à l’officine), qui propose des questionnaires courts et ludiques afin de s’autoévaluer. Ensuite, c’est lors de la réunion que l’on aborde les points qui coincent (notés au fur et à mesure sur un cahier des erreurs) et que l’on suit l’évolution des solutions mises en place.
À chaque problème résolu, une procédure écrite est rédigée. Par exemple, une pour les médicaments d’exception, pour les stupéfiants, pour les médicaments du sang, pour l’utilisation du tire-lait, pour la location de matériel médical… on peut aussi créer un cahier d’appel des médecins pour tracer une décision commune de changer un médicament ou un dosage, sachant que cette information doit être opposable en cas de litige.
Le passage à l’écrit représente un bouleversement de l’ordre établi dans les officines. « On s’y transmet depuis des générations les informations par oral… Mais l’oral s’oublie. On laisse encore des messages sur des post-it… Mais ils se décollent, et il y en a partout. Alors, la mise en place de procédures écrites permet de pérenniser les choses », analyse Françoise Amouroux.
Vers la norme ISO
Par ailleurs, certaines pharmacies sont allées plus loin et se sont fixées comme objectif l’obtention de la certification qualité ISO 9001, comme les pharmacies dans lesquelles travaillent Aurore Henno-Duribreux et Nathalie Fabre. Pour cette mise en place plus complexe, ces pharmacies ont été épaulées par un groupement. En effet, quatorze groupements et quelques pharmacies indépendantes se sont réunis pour proposer une démarche commune de qualité à leurs adhérents, baptisée QMS Pharma. Au total, 2 200 pharmacies se sont volontairement engagées, dont 1 850 sont certifiées.
Ainsi, « pendant près d’un an, nous avons bénéficié d’un accompagnement minutieusement protocolisé par l’envoi régulier d’outils et de supports. Différents thèmes ont été abordés : l’organisation des tâches, la gestion des dysfonctionnements, les préparations, les commandes… et même, des enquêtes satisfaction clients, détaille Aurore Henno-Duribreux. Pour vérifier la conformité à la norme ISO 9001, nous avons réalisé en interne une autoévaluation, puis sollicité le contrôle d’un auditeur externe. En mars 2012, nous avons obtenu la certification ISO 9001 : 2008 pour un cycle de 3 ans. Idem pour 2015. Ce fut une grande satisfaction, l’aboutissement d’un travail de longue haleine. »
Demain, les bonnes pratiques dans toutes les officines ?
Si l’obtention de la norme ISO 9 001 n’est pas transposable à toutes les officines, l’Ordre des pharmaciens espère qu’un jour une certification, adaptée aux pharmacies, soit mise en place. Mais le gouvernement n’a pas tenu compte de ce vœu ordinal dans la nouvelle loi de santé, qui n’a rien prévu en la matière.
« Nous n’avons donc toujours pas l’obligation de respecter de bonnes pratiques, hormis pour le préparatoire, alors que cette exigence existe pour les autres circuits du médicament comme l’industrie et la répartition », regrette Marceline Grillon. Pourtant, « ce serait grâce à une démarche de qualité commune que les pharmaciens pourront conserver leur monopole et prouver la sécurité apportée dans la dispensation du médicament », relève Nathalie Fabre.
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