« Chaque année, nous recevons 4 à 500 appels pour des intoxications aux champignons, explique le Dr Noël Amouroux, pharmacien du Centre antipoison et de toxicovigilance (CAPTV) de Toulouse. Ce chiffre est stable, malgré les campagnes de prévention. Heureusement, cette année, nous n’avons encore enregistré aucun décès. » 24h/24, l’équipe du CAPTV toulousain (7 médecins et 1 pharmacien) reçoit les appels venus principalement de Midi-Pyrénées et du Limousin. La plupart se soldent par des conseils simples : prise d’un antidiarrhéique, renvoi vers une consultation médicale, parfois vers une hospitalisation pour examens, et plus rarement une hospitalisation d’urgence (le CAPTV partage les locaux du SAMU).
Côté champignons, les principaux coupables demeurent les mortelles amanites phalloïdes, les petites lépiotes et le bolet de satan, trop souvent confondu avec le cèpe. La période à risque s’étend désormais à toute l’année car nombre de personnes congèlent leur cueillette. On a même constaté des problèmes digestifs sur des champignons surgelés achetés en grandes surfaces, mais trop insuffisamment cuits.
Surveiller les personnes fragiles
Certains champignons inoffensifs peuvent aussi se révéler dangereux, voire mortels, s’ils sont consommés en trop grande quantité (Bidaou ou tricholome équestre). On peut aussi citer des intoxications aux polluants ou pesticides (organophosphorés) concentrés par les champignons, et les interactions possibles entre champignons et médicaments (anticoagulants). Sans oublier qu’une faible intoxication peut avoir des conséquences graves sur des patients fragiles (enfants, personnes âgées, cardiaques).
« À l’officine, le pharmacien doit envisager une intoxication aux champignons en cas de diarrhée, maux de tête, sueurs, nez qui coule, explique Noël Amouroux, également titulaire d’une officine à Toulouse. Il doit interroger le patient sur son dernier et avant-dernier repas, demander les coordonnées des convives et, si l’intoxication est avérée, les contacter. Il ne doit pas hésiter à contacter le CAPTV, son appel sera alors horodaté et sa responsabilité transférée au régulateur. »
Ne pas laisser le patient sans réponse
Quant à l’identification de la cueillette, certains pharmaciens ne l’apprécient guère : « C’est un acte gratuit qui prend du temps et représente une lourde responsabilité, reconnaît Noël Amouroux. D’autant qu’il faut absolument voir l’intégralité de la cueillette. Mais refuser ce service donne une mauvaise image de notre profession, et introduit le doute sur nos compétences. »
Alors, plutôt que de laisser le client sans réponse, l’officine peut l’orienter vers de bons mycologues du secteur ou envoyer la photo des champignons au CAPTV qui les diffusera sur le site Mycoliste* où ils seront identifiés. Quant aux pharmaciens souhaitant développer leurs connaissances, ils pourront rejoindre une association mycologique ou suivre la formation continue, créée l’an dernier par Noël Amouroux, à la faculté de pharmacie de Toulouse.
« Notre capacité à apporter des réponses aux questions mycologiques crédibilise nos officines et renforce la confiance des patients, conclut Noël Amouroux. Je me sens davantage dans mon rôle en identifiant une cueillette de champignons qu’en faisant une vaccination. »
À quand un honoraire pour cet acte de santé publique ?
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