Alors que s’achève la seconde semaine mondiale pour un bon usage des antibiotiques, les ministères des Affaires sociales et de la Santé, de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer et de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, ont lancé un programme interministériel de maîtrise de l’antibiorésistance.
« C’est une bonne nouvelle que l’antibiorésistance sera une des grandes causes nationales de 2017 », se réjouit le Dr Carlet, co-auteur d’un rapport en juin 2015 sur l’antibiorésistance, dont s’inspire largement le programme présenté par la ministre de la santé Marisol Touraine. Pour le président de l’alliance mondiale de lutte contre l’antibiorésistance, les 4 axes choisis (communication grand public, formation, recherche et surveillance) « vont dans la bonne direction, il sera intéressant de voir ce que sera la quarantaine de mesures qu’on nous a promise ».
Le médecin regrette toutefois les incertitudes concernant le financement. Selon la feuille de route du programme, écrite par le Pr Christian Brun-Buisson, du service de réanimation de l’hôpital Henry Mondor, l’état va réorienter 330 millions d’euros et espère économiser ainsi « au moins 385 millions d’euros » via la réduction de l’impact hospitalier de l’antibiorésistance. « Cet argent est destiné à la recherche, précise le Dr Carlet, mais on préférerait que ce soit de nouveaux financements. Si ces sommes "réorientées" sont récupérées au détriment d’autres programmes, c’est moins intéressant. Par ailleurs nous ne savons rien des sommes qui seront consacrées aux 3 autres axes du programme. »
Une grande campagne prévue pour 2017
Une des mesures phares est le lancement d’une campagne de communication grand public en association avec la caisse nationale d’assurance maladie. Il s’agit de réitérer l’exploit de la campagne du début des années 2000 qui avait contribué à réduire de plus de 20 % les consommations d’antibiotiques en France. Le programme entend aussi favoriser la collecte de données et la surveillance de l’antibiorésistance.
Le Dr Carlet note toutefois « un point noir : il y a peu de chose sur la surveillance et la maîtrise des antibiotiques dans l’environnement alors que nous avions un groupe de travail spécifique dans notre task force sur ce sujet ». Il regrette aussi l’absence de volonté de renforcer les unités hospitalières de bon usage des antibiotiques. « Il y a des référents mais ils ne sont pas assez nombreux et peu formés. Nous avons l’intention de monter aux créneaux sur ce sujet », prévient-il.
Un deuxième plan en demi-teinte
Le programme ministériel se veut le prolongement du plan national d’alerte sur les antibiotiques 2011-2016 qui « n’avait pas atteint tous ses objectifs », selon le Dr Carlet. Le plan avait pour but la baisse de 25 % des consommations d’antibiotiques qui ont au contraire augmenté, passant de 28,9 à 29,9 doses/1 000 habitants/jour en médecine de ville (93 % des prescriptions) et stagnant en milieu hospitalier.
L’autre objectif était la baisse des taux de résistances aux antibiotiques. « Certaines résistances ont bien baissé, comme celles du staphylocoque grâce à la généralisation des mesures d’hygiène, ou celles des pneumocoques grâce à la vaccination », constate le Dr Carlet.
Selon le premier rapport commun de l’ANSM de l’ANSES et de l’agence Santé publique France, les résistances des Escherichia coli aux céphalosporines de 3e génération ont en revanche explosé (de 1 à 4 % en ville, et de 1,4 à 11,9 % en établissement de santé). Le Dr Carlet relativise ce constat : « Les entérobactéries résistantes ont augmenté entre 2005 et 2011, mais restent stables depuis 4 ans. »
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