Repéré en décembre par les autorités chinoises, le Covid-19 est devenu en quelques semaines l’ennemi à abattre pour la planète tout entière. Face à cette maladie nouvelle, il n'existe aucun traitement ou vaccin. Le monde entier, à quelques exceptions notables, est alors contraint de prendre des mesures sanitaires strictes, alliant confinement, mesures barrières, restriction des déplacements… dans l’attente d’un remède miracle.
Sur le pont dès les prémices de la pandémie, les chercheurs se sont lancés dans une course de fond. Mais la précipitation l’emporte parfois sur l’habituelle rigueur scientifique. Certains désignent un traitement comme la solution universelle sur la foi d’études in vitro ou testées uniquement sur des animaux, d’autres donnent voix à des prépublications non validées scientifiquement ou mènent des essais hors des standards internationaux de recherche, pendant que des revues médicales reconnues cèdent au besoin de publier plus rapidement les travaux qu’on leur soumet au risque de baisser leurs critères de vérification et de perdre leur crédibilité. Dans un entretien à « Libération » paru le 15 juin, Richard Horton, rédacteur en chef du « Lancet », qualifie « d’échec complet de la science » le feuilleton de l’étude qui a provoqué la suspension de plusieurs essais cliniques sur l’hydroxychloroquine avant d’être retirée après la rétractation de trois de ses quatre auteurs. « L’évaluation par les pairs consiste à tester l’acceptabilité d’un papier. Cet article apparaissait plausible. Les pairs auraient dû vérifier s’il y avait des données fiables, mais avant eux, les auteurs aussi auraient dû étudier les données ! »
Déontologie et éthique
Malgré ces écueils, la recherche continue. À la mi-juin, plus de 1 400 essais cliniques étaient en cours de par le monde, dont une centaine rien qu’en France. La stratégie donne la part belle au repositionnement de molécules, mais elle n’a pas encore livré de traitement reconnu comme efficace. Pour lutter contre le SARS-Cov-2, les chercheurs ont mis en place deux approches : privilégier des antiviraux pour bloquer le virus lorsqu’il entre dans l’organisme et utiliser des médicaments capables d’empêcher l’emballement de l’organisme (l’orage cytokinique) une fois le virus installé, emballement à l’origine de l’aggravation de la maladie et pouvant conduire au décès. À ce jour, seul le remdesivir semble suffisamment prometteur pour justifier d’une demande d’autorisation de mise de sur le marché (AMM) conditionnelle auprès de l’Agence européenne du médicament (EMA). A contrario, la chloroquine et son dérivé, l’hydroxychloroquine, cumulent davantage d’études négatives quant à leur efficacité et leur tolérance, y compris en association avec l’azithromycine. D’autres traitements sont toujours en cours d’étude : corticoïdes, inhibiteurs d’interleukine, anticorps monoclonaux, plasma de convalescents…
La recherche se penche également sur des candidats médicaments totalement nouveaux. Des laboratoires comme Eli Lilly, Abivax ou Xenothera se sont lancés dans cette recherche ciblée qui ne devrait pas donner de résultats avant plusieurs semaines ou mois. « La rigueur scientifique ne peut être escamotée au prétexte de la gravité de la situation, ni la rapidité d’action aux dépens de la qualité de la conception et de la réalisation, rappellent les Académies de médecine, de pharmacie et des sciences. Un essai thérapeutique répond à des règles méthodologiques et à l’observation d’impératifs déontologiques et éthiques. La transgression de ces principes ne favorise pas la découverte rapide d’un traitement. Tout au contraire, elle peut aboutir à une confusion qui réduit les chances de trouver des indications thérapeutiques irréfutables. »
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