Si les amphithéâtres des facultés de pharmacie ne font plus guère recette, les « prépas » privées n’ont jamais été aussi populaires. Pour Cyprien Haffner, vice-président chargé de l'enseignement supérieur pour l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF), il ne s’agit pas d’une coïncidence : « Les prépas profitent de la détresse des étudiants en première année de santé, qui est vue comme insurmontable, et se présentent comme des sauveurs, dans le but premier de faire des bénéfices. » D’autant plus qu’avec un coût moyen de 5 541 euros par an, les prépas privées créent une « sélection par l’argent » en première année, au mépris de « l’égalité des chances » chère aux fédérations étudiantes.
Autre critique émise par les fédérations : beaucoup d’étudiants voient la prépa comme un passage obligé pour « réussir médecine ». « Les prépas focalisent l'attention sur l'accès aux études de médecine. Elles participent à l’invisibilisation des autres filières, dont la maïeutique et la pharmacie, et nourrissent une vision du système de santé centrée sur le médecin », note Cyprien Haffner, qui rappelle que « beaucoup d’étudiants découvrent l’existence de ces filières en première année ». Le problème n’est pas mince tandis que les facultés de pharmacies se retrouvent avec des centaines de sièges vides chaque année (483 en 2023). Des places qui pourraient être comblées si l'information sur les études de pharmacie était plus présente au niveau des lycées et des collèges, afin de faire naître des vocations en amont.
Promouvoir le tutorat
Pour cette raison, les fédérations étudiantes attendent beaucoup des rectorats. En effet, « le système de tutorat pour accompagner les élèves en première année existe et est très efficace, avec 95 % de satisfaction, mais beaucoup ignorent son existence ! », déplore Cyprien Haffner. D’autant que, contrairement aux prépas, les tutorats sont valorisés par un agrément du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, qui certifie leur efficacité. Mais ce label n’est pas assez mis en avant « Or, il fait toute la différence ! Les rectorats doivent faire la promotion des tutorats s’ils ne veulent pas laisser l’avenir de ces étudiants entre les mains des prépas », affirme Cyprien Haffner.
Autre attente : une prise de position nette du gouvernement, et la mise en place d’une réelle stratégie de lutte contre les prépas en santé. Deux pistes se dégagent : la création d’une enveloppe nationale de financement des coûts inhérents à la promotion des tutorats, et leur mise en avant au sein des dispositifs d’orientation tels que l'office national d'information sur les enseignements et les professions (Onisep). Car pour l’heure, la lutte est inégale : « les prépas ont beaucoup d’argent, et donc communiquent bien plus que nous ne le pouvons », regrette Cyprien Haffner. Reste à voir si le futur gouvernement acceptera de se saisir du sujet…
*Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) à laquelle appartient notamment l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF)
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