TOTALEMENT dépassée par la cavale d’un très dangereux criminel échappé jeudi soir de prison, la police allemande fait appel aux pharmaciens du pays pour qu’ils l’aident à le retrouver : le fugitif a, en effet, besoin d’un certain nombre de médicaments contre la douleur, et aurait pu en acheter, ou en faire acheter, depuis son évasion. Les pharmaciens sont donc priés de fournir à la police des indices sur cet éventuel client bien peu… recommandable. Condamné pour plusieurs attaques à main armée puis pour meurtre, Peter Paul Michalski s’est évadé jeudi soir de la prison d’Aix-la-Chapelle, avec un complice réputé encore plus dangereux que lui, vraisemblablement grâce à la complicité d’un gardien de prison intérimaire. Il a ensuite pris successivement en otage une étudiante, puis deux chauffeurs de taxi et un couple, afin de s’enfuir dans leurs voitures, et se trouverait actuellement dans la région de Cologne. Si son complice a pu être rattrapé dès dimanche soir, Michalski avait, jusqu’à présent, échappé à toutes les unités de police lancées à ses trousses, bien qu’elles l’aient manqué de peu lundi matin.
Ne négligeant aucune piste, la police a demandé officiellement aux pharmaciens de l’aider à retrouver le criminel, en leur faisant passer son signalement par les canaux d’information officiels réservés d’ordinaire aux questions pharmaceutiques urgentes. Elle leur demande de leur fournir tout indice sur les clients ayant acheté, depuis jeudi, les médicaments correspondants à ceux pris par Michalski. Elle leur rappelle par ailleurs que ce dernier est très dangereux et ne doit surtout pas se sentir reconnu, ni, bien sûr, être interpellé par des non spécialistes… L’évadé a finalement été arrêté mardi matin.
Impossible en France.
Tout à fait légale en Allemagne, qui dispose d’une législation libérant les professionnels de santé du secret professionnel dans un certain nombre de situations, notamment criminelles, cette requête, toute justifiée qu’elle soit, n’en pose pas moins d’intéressantes questions éthiques. Comme le rappelle le président de l’Ordre régional des pharmaciens d’Alsace, Christian Barth, « en France, nous aurions besoin d’une commission rogatoire d’un juge pour être délivrés du secret professionnel et pouvoir répondre à la demande de la police ». Régulièrement, poursuit-il, des pharmaciens se retranchent derrière cette règle (article R 4235-5 du code de la santé publique) pour refuser de fournir « en urgence » des informations à la police ou la gendarmerie. « C’est peut-être contradictoire, rappelle M. Barth, mais si nous dénoncions un criminel sans respecter cette règle, il pourrait ensuite se retourner contre nous et nous faire condamner… »
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