Le Quotidien du pharmacien.- Que sait-on de l’efficacité du vaccin d’AstraZeneca face au variant sud-africain ?
Marie-Paule Kieny.- Ce que l’on sait surtout aujourd’hui c’est que les données de non-efficacité ne sont pas probantes. L’étude menée en Afrique du Sud est intéressante mais ne permet pas de répondre aux questions que l’on se pose aujourd’hui sur le plan de la santé publique. La première stratégie d’utilisation des vaccins vise à protéger les personnes vulnérables contre les formes sévères du Covid-19, et par ce biais de réduire la tension sur le système de santé. Or l’étude sud-africaine s’est intéressée à 2 000 volontaires – un effectif limité – plutôt jeunes puisque la moyenne d’âge est de 31 ans, qui ne sont pas enclins à développer un Covid sévère. Conclure que le vaccin ne protège pas d’un Covid léger ou modéré une population jeune ne permet pas de conclure que le vaccin ne protège pas d’un Covid sévère.
Les réinfections observées à Manaus (Brésil) et le cas documenté par l’AP-HP d’une réinfection plus sévère avec le variant sud-africain sont-ils des motifs d’inquiétude ?
Le problème est que nous avons peu de données validées concernant Manaus. Il semble qu’il y ait eu beaucoup de cas de réinfections, qui ne sont d’ailleurs pas toujours documentées comme des réinfections et quand elles le sont, nous manquons d’informations sur les souches de la première et de la deuxième infection. Des données britanniques ont montré que cinq mois après une première infection, les soignants étaient protégés à 85 % contre une deuxième infection. Il y a eu énormément d’infections à Manaus lors de la première vague, on ne sait pas finalement si le nombre de réinfections observées a une correspondance avec ce taux de 85 % de protection observé en Grande-Bretagne. Quant au cas de réinfection sévère documenté par l’AP-HP, il ne permet pas de généralisation à ce stade.
Les effets indésirables – des syndromes pseudo-grippaux – du vaccin AstraZeneca étaient-ils attendus ?
C’est un peu inattendu car les effets étaient moins intenses dans les essais cliniques. On pense que, pour un certain nombre de cas, ces effets sont liés au fait que les personnes vaccinées avaient déjà fait la maladie, peut-être de façon asymptomatique, et cette première dose de vaccin agirait comme un rappel. Or le rappel de vaccination entraîne souvent une réaction plus marquée. Des collègues en Suisse nous ont fait part d’une réactogénicité similaire mais cette fois avec le vaccin Pfizer-BioNTech. La plateforme Covireivac va commencer des études sur la sécurité et l’immunogénicité de la première dose de vaccin AstraZeneca chez les personnes ayant déjà fait un Covid-19 pour éclaircir tout cela.
Aujourd’hui des soignants en France et dans d’autres pays refusent le vaccin d’AstraZeneca. Comment les convaincre de son efficacité ?
Il faut parvenir à démystifier l’idée que le vaccin ne fonctionne pas, notamment chez les personnes âgées, rien ne permet de l’affirmer puisque toutes les données concernant une inefficacité ne sont pas probantes, y compris concernant le variant sud-africain. Une étude en préprint sur des données écossaises en vie réelle pourrait les convaincre, ses résultats sont très prometteurs pour le vaccin d’AstraZeneca, y compris chez les personnes très âgées*.
* Le critère d’efficacité était l’absence d’hospitalisation à 28-34 jours après la première injection : avec le vaccin AstraZeneca, l’efficacité est de 94 % pour l’ensemble de la population observée.
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