Alors qu’en France les pharmaciens subissent un nouvel assaut de E.Leclerc, qui pousse pour obtenir l’autorisation de vendre des autotests dans ses hypermarchés, en Belgique un autre combat met aux prises les officinaux et une enseigne de la grande distribution.
Chaîne de magasins bien connue en Belgique et aux Pays-Bas, Kruidvat est spécialisé dans la vente de produits de parapharmacie, d’hygiène mais aussi de jouets et d’articles divers. L’enseigne est également implantée en France avec quatre adresses dans le département du Nord. Depuis la fin des années 1970, Kruidvat vend également des médicaments en vente libre dans ses drogueries aux Pays-Bas. L’entreprise milite désormais pour obtenir ce droit dans ses quelque 300 magasins belges. Or, comme c’est le cas en France, la loi belge réserve la vente des médicaments sans ordonnance aux seuls pharmaciens, au grand dam du directeur général de Kruidvat Belgique, Bert Verhoef. Selon lui, une évolution législative offrirait un avantage de taille aux patients belges : celui de pouvoir acheter des médicaments qui ne sont pas soumis à prescription médicale à des prix beaucoup plus compétitifs. « Les médicaments en vente libre comme le paracétamol sont au moins trois fois plus chers en Belgique qu'aux Pays-Bas, où ils peuvent également être vendus par les drogueries. (…) La version générique (du paracétamol) est en Belgique cinq fois plus chère qu’une version comparable aux Pays-Bas », affirme-t-il par exemple.
Pour défendre sa position, Kruidvat a commandé un sondage à l’institut Ipsos I & O. Une consultation menée auprès d’un échantillon de 1 000 personnes et selon laquelle « la moitié des Belges souhaite que les médicaments délivrés sans ordonnance en Belgique ne soient pas uniquement disponibles/vendus en pharmacie ». Par ailleurs, 67 % des sondés belges estiment que les médicaments en vente libre sont trop chers dans leur pays. Toujours selon ce sondage, pas moins de huit Belges sur dix « attendent du gouvernement qu'il prenne des mesures pour rendre les médicaments délivrés sans ordonnance moins chers ».
Pour le directeur général de Kruidvat Belgique, ces résultats ne peuvent qu’inciter le gouvernement belge à agir. « Aux Pays-Bas, la grande majorité des ventes de médicaments en automédication se fait via les chaînes de drogueries. Si cela était également possible en Belgique, les prix baisseraient considérablement (…) Il s'agit là, à notre avis, d'une opportunité importante pour le gouvernement belge. L'ouverture du marché, de manière responsable, rendrait les soins de santé en Belgique plus abordables et plus accessibles. Et cela est plus important que jamais en période d'inflation », argumente-t-il. Bert Verhoef affirme enfin que le personnel de ses drogueries est parfaitement capable de conseiller les patients/clients, voire de les orienter vers un médecin le cas échéant.
Kruidvat n’en est pas à sa première offensive pour obtenir le droit de vendre des médicaments en vente libre en Belgique. Cette nouvelle attaque sur le monopole n’a bien sûr pas échappé à l’Association pharmaceutique belge (APB), fermement opposée à l’idée de voir des spécialités OTC vendues dans les drogueries, entre des cartes Pokémon et des ventilateurs. Interrogé par « L’Avenir », le porte-parole de l’APB, Nicolas Echement, a rappelé à son adversaire que les officinaux du Plat pays ne se laisseraient pas faire. « Les médicaments ne sont pas des poudres à lessiver », a-t-il notamment voulu rappeler, insistant également sur l’importance de ne pas laisser « n’importe qui (comprenez les salariés d’une droguerie) pouvoir diagnostiquer des maladies ».
Si les autorités belges n’ont pas encore annoncé vouloir exaucer les souhaits de Kruidvat, une potentielle vente de médicaments OTC dans les magasins de moyenne ou grande distribution du pays aurait des conséquences pour les pharmaciens français installés près de la frontière. Ces derniers pourraient par exemple voir leur patientèle privilégier les achats de paracétamol dans ces magasins belges si les prix y sont beaucoup plus avantageux. Une victoire de Kruidvat dans ce dossier pourrait aussi aiguiser de nouveau l’appétit des acteurs français de la GMS.
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