Les systèmes nationaux de santés ont dû se mettre en conformité avec les grands principes de liberté de circulation des personnes, des services et des biens, principes à l’origine de la reconnaissance des diplômes, puis du droit d’exercice et d’installation des professionnels de santé dans tous les États membres. De même, les soins transfrontaliers permettent aux patients de se faire soigner, sous certaines conditions, dans un autre État membre, et les ordonnances, aujourd’hui manuelles et demain électroniques, y sont acceptées comme dans leur pays d’origine. Le Parlement européen a toujours plaidé pour un renforcement des politiques de santé, d’autant que les Européens soutiennent largement cet objectif. Pour lui, la santé et l’environnement sont étroitement liés, une vision qu’il défendait bien avant qu’elle ne s’impose dans tous les États. De même, il s’est toujours prononcé pour le renforcement des droits des patients et la prise en compte de leurs opinions. Cette vision influe sur la manière dont le Parlement étudie et amende les règlements présentés par la Commission ou le Conseil, et se retrouve aussi dans les rapports d’initiative, non contraignants, qu’il présente sur des sujets de santé, ainsi que sur ses choix concernant la répartition des financements accordés à la recherche.
Les pharmaciens, soutien des programmes de santé européens
Globalement, les pharmaciens soutiennent les programmes de santé européens et se félicitent des campagnes de santé publique en cours. Ils sont représentés à Bruxelles par le « Groupement pharmaceutique de l’UE » réunissant les Ordres et les syndicats des États membres. Ce dernier constate d’ailleurs que la pandémie a contribué, dans toute l’Europe, à rendre les officinaux plus « visibles », et s’est traduite par le développement, voire la généralisation, de nouveaux services, en premier lieu les vaccinations et certains actes de prévention ou de soins.
Toutefois, l’Europe reste aussi, voire d’abord, un grand espace économique fortement teinté de libéralisme, et le dogme de la libre circulation vient parfois percuter les réglementations nationales de nombreuses professions, dont la pharmacie. Les angles s’arrondissent souvent lors des conciliations et débats, mais les cas de blocage ne sont pas rares. L’UE n’apprécie guère les monopoles et tout ce qu’elle considère comme des entraves à la concurrence, et rappelle à l’ordre les États qui prennent selon elle des mesures « disproportionnées » pour protéger tel ou tel pan de leur économie. Les pharmaciens en savent quelque chose : pendant près de dix ans, ils ont eu à défendre la pertinence de leurs organisations nationales, en particulier les monopoles et les règles de propriété du capital, face aux requêtes lancées contre plusieurs pays par la Cour de Justice Européenne au nom de la concurrence et du Marché intérieur. Après des années de procédures, une jurisprudence a fini par s’imposer au profit des situations existantes. La Cour a maintes fois affirmé que certaines restrictions à l’achat, à la répartition ou au fonctionnement des officines constituent bien des entraves au droit européen, mais les tolère dans la mesure où elles sont nécessaires à la protection de la santé des citoyens. De plus, cette protection n’est pas seulement sanitaire, mais implique aussi de garantir un accès équitable au réseau pharmaceutique, y compris sur le plan géographique. Ce principe impose donc aux pharmaciens, ou aux autres professionnels concernés, de pouvoir justifier en permanence la nécessité de leurs statuts particuliers.
Le dogme de la libre circulation vient parfois percuter les réglementations nationales de nombreuses professions, dont la pharmacie
Il n’en reste pas moins que les pharmaciens restent vigilants face à ces procédures susceptibles de bouleverser en profondeur les structures et l’organisation de leur profession, d’autant que les juges européens, mêmes s’ils incarnent le droit qui s’applique à tous, n’ont pas la légitimité démocratique des députés. « Nous aimerions que l’on définisse plus clairement les limites de compétence entre l’Union et les États en ce qui concerne l’organisation du système de soins », expliquent à l’unisson les représentants des pharmaciens, des médecins et des dentistes. De même, ils souhaitent que l’Europe prenne conscience de l’importance et des spécificités des professions libérales indépendantes, et les aide à s’opposer à la financiarisation et à la déréglementation du système de santé, face auxquelles les patients n’ont rien à gagner.
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