« JE LEUR AI DIT qu’ils fermaient la plus vieille pharmacie de Fécamp », constate, amer, l’opticien de la rue Alexandre-Legros. Cette rue de l’hyper-centre du port normand vire d’ailleurs au désert commercial : il reste bien des banques et un musée, mais un parfumeur est parti pour la rue piétonne, et plusieurs commerces cherchent repreneur. Coralie et Pierre-Gilles Soussan, les titulaires de cette officine (créée en 1775 !) ont, en effet, rejoint début mars Stéphanie Isaac et Luc Peray à la pharmacie de la Croix-verte, 100 mètres plus loin.
Le problème est d’abord démographique. Fécamp (Seine-Maritime) comptait plus de 21 000 habitants il y a 15 ans, 19 000 aujourd’hui et huit officines - en surnombre -, toutes concentrées en centre-ville. L’attractivité commerciale, ensuite, a évolué, en particulier depuis l’extension d’un centre commercial en périphérie, sur la route du Havre, avec un hypermarché, des magasins de bricolage, d’articles de sports, de vêtements, de la parapharmacie, et un espace culturel, « très agréable pour les enfants », convient Coralie Soussan.
Pierre-Gilles Soussan avait repris l’officine paternelle il y a quinze ans. Il emploie quatre équivalents temps plein, pour 1,2 million d’euros de chiffre d’affaires, « en baisse depuis deux ou trois ans ». « C’était la plus petite pharmacie de Fécamp, reprend Coralie Soussan, mais les fins de semaine étaient sympas : on n’ouvrait pas le lundi, cela faisait deux jours pleins avec les enfants. » Quand les pharmaciens de Fécamp ont décidé d’ouvrir le lundi après midi, les Soussan ont suivi. « Ca n’a rien changé : on a réalisé le même chiffre, en cinq jours et demi, au lieu de cinq jours. »
Les époux Soussan ont alors décidé de vendre, quand ils ont reçu la visite de leurs voisins, Stéphanie Isaac et Luc Peray. « Leur projet de fusion nous a plu, travailler autrement était très séduisant », rappelle Coralie Soussan. « Les confrères de Fécamp se sont interrogés sur les raisons de notre choix, indique Stéphanie Isaac, mais c’est une anticipation sur l’évolution de notre métier. Nous avons tous été motivés par de nouvelles conditions de travail, par le fait de nous regrouper pour optimiser notre prestation, d’associer nos compétences et nos complémentarités. » « C’était sûrement le meilleur choix pour nous quatre », confirme Luc Peray.
L’avis favorable de l’agence régionale de santé (ARS) a été très rapide : « Ils sont toujours plutôt enclins à fermer un point de vente. » Le Conseil de l’Ordre a aussi été favorable.
La pharmacie de la Croix-verte compte à présent quatre pharmaciens titulaires, un adjoint, sept préparateurs, et une apprentie. Et le projet de développer l’orthopédie, la micronutrition, l’aromathérapie, notamment.
« C’est vrai que les commerçants locaux sont déçus de notre choix, reconnaît Coralie Soussan, car une pharmacie draine beaucoup de flux. Mais Fécamp compte deux centres ville, ici nous sommes éloignés du front de mer, et ce centre-ville n’a pas été une priorité urbaine. Aucun élu n’est d’ailleurs venu s’inquiéter de notre fermeture. »
La pharmacie de la Croix-verte réalisait 2,2 millions de chiffre d’affaires, avec six équivalents temps plein. « Un point de vente réuni fait a priori moins que deux points de vente », estime Pierre-Gilles Soussan. « Nous visons 1,75 à 1,90 fois nos chiffres cumulés », précise Luc Peray. Mais d’autres officines en ville voient déjà leur chiffre évoluer, en hausse.
La pharmacie de la Croix-verte devra en passer par l’Ordre après le dépôt d’une plainte pour une communication « un peu agressive, convient Stéphanie Isaac. Les confrères nous ont trouvés un peu border line, mais la communication envers la clientèle était un enjeu majeur ».
Légende ph (J.Gravend) De gauche à droite : Coralie et Pierre-Gilles Soussan, Stéphanie Isaac et Luc Peray
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