Pour ce dernier groupe de travail avant la multilatérale du 5 mars, la CNAM a voulu mettre sur la table une proposition autour de la dispensation adaptée, mais elle n’a pas opté pour la simplicité. « Le système proposé est tellement complexe que je pense que personne autour de la table n'a réellement compris comment cela devait fonctionner », résume le président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), Pierre-Olivier Variot. En résumé, l’idée de la CNAM serait la suivante : rémunérer les pharmaciens, par le biais d’une ROSP, s’ils délivrent le moins de boîtes possible. Outre l’immense complexité des critères précis que semble envisager la CNAM, un deuxième point pose problème aux syndicats. Le dispositif ne concernerait que… le paracétamol et associés (tramadol, produits codéinés…) et rien d’autre ! « Pourquoi vouloir le restreindre ? se demande Pierre-Olivier Variot. La convention pharmaceutique prévoit que la dispensation adaptée puisse concerner les compléments nutritionnels oraux, les bandelettes glycémiques, les pansements… Encore hier, j’ai été auditionné par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), qui m'a d’ailleurs demandé pourquoi ce n’était pas encore appliqué. Il ne faut pas limiter, au contraire cela pourrait être étendu à d'autres médicaments, ceux contre la constipation ou les maux de ventre par exemple », évoque le président de l’USPO.
Du côté de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), le procédé échafaudé par l’assurance-maladie n’a pas soulevé d’enthousiasme non plus. « C’est une usine à gaz », résume le président du syndicat, Philippe Besset, qui a rappelé son opposition plus générale au système des ROSP. En réponse aux projets de la CNAM, les deux syndicats ont pu faire quelques contre-propositions. « Notre sujet, c'est le bon usage plus que la dispensation adaptée, a évoqué Philippe Besset. Nous voulons que l’intervention pharmaceutique soit valorisée avec une rémunération de 1 euro à l'acte. » Une idée dont la mise en œuvre serait facilitée dans les prochains mois par la montée en puissance de l’ordonnance numérique, selon Philippe Besset. Ainsi, à chaque fois que le pharmacien modifierait un dosage, ou adapterait une posologie, tout cela dans une logique de bon usage, il pourrait prétendre à un paiement immédiat et non pas à « une ROSP payée une fois par an et pas toujours dans les temps », complète Pierre-Olivier Variot. Parmi les autres pistes soumises à la CNAM par les syndicats, la mise en place d’un groupe de travail médecins-pharmaciens sur le sujet du bon usage. Les représentants des officinaux pourraient ainsi profiter de cette occasion pour encourager l’initiation, par les praticiens, des bilans partagés de médication (BPM).
Ce dernier groupe de travail maintenant derrière eux, les présidents des deux syndicats se tournent vers la multilatérale du mardi 5 mars. À cette occasion, l’assurance-maladie, qui s’est souvent contentée d’écouter les propositions des représentants de la profession sans se risquer à les commenter, devrait commencer à dévoiler son jeu. « Je suis déterminé, confie Pierre-Olivier Variot. Ces négociations s’annoncent rudes mais trouver des moyens propres pour financer le réseau est obligatoire. Sans quoi nous nous dirigeons tout droit vers la situation que connaissent aujourd’hui les laboratoires de biologie médicale, soumis à la financiarisation et à ses dérives », insiste-t-il. Utilisant une métaphore peut-être inspirée par l’imminence des Jeux Olympiques, Philippe Besset espère que ces négociations « ne seront ni un sprint, ni un marathon mais plutôt un demi-fond. Comme les négociations avec les médecins se déroulent en même temps que les nôtres, on perd du temps. Les équipes de la CNAM ne sont pas extensibles et on a du mal à aller vite », observe-t-il aujourd’hui.
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